dimanche 15 mars 2015

VITAL PROCESS



VITAL
PROCESS
Etre soi, etre Fier d’etre in.dividu
 
La peur de commencer, la peur d’entreprendre, la peur d’un résultat, la peur d’un « à quoi çà sert ». Tant pis je me lance voyant déjà l’autre bord du précipice dont je me sens si loin, si inapte à en franchir la distance et les difficultés. Le cœur de notre nous-mêmes est bien cette appréhension entre désir et vision de son résultat. La vision du désir est belle alors qu’au même moment intellectuel, dans notre tête, nous en construisons déjà une réalisation imparfaite, insatisfaisante au point de nous provoquer la paralysie de commencer réellement. La boucle de nos désirs insatisfaits parce que jamais entrepris est bouclée. Ainsi va le cycle de notre vie sauf si nous fermons en nous la case de nos inquiétudes et ne gardons toujours ouverte que la case du temps présent, dans le déroulement exact et exhaustif de tout ce qu’il advient que nous absorbons pleinement en nos vies devenant ainsi des envies se transformant en potentialités de notre vie.
Le premier souvenir est mon refus d’être obligé à faire ce que l’on vous oblige sans explication ; à dire, ou à penser ce que les autres vous intiment. J’avais 4 ans refusant de faire garçon d’honneur au mariage de ma sœur dont le mari, mon beau-frère, ne me plaisait pas. J’avais 15 ans seul dans ma chambre rêvant d’être un grand homme comme Charles De Gaulle. J’avais 16 ans, recevant de mon père la recommandation et le cri de son cœur de ne jamais me laisser faire par les autres dans la vie. D’oser revendiquer mon moi-même,  alors que sa famille dont j’étais le dixième, était ordre et respect. Je découvre que le rituel de bonne famille était un moyen de bien vivre social pour que chacun ait sa place matérielle et intellectuelle. Le carcan n’allait pas plus loin et, au contraire, il permettait à chacun de s’en élever pour devenir ce qu’il est. Ensuite les caractères de chacun décident de nos parcours parce que souvent ils confondent la forme et le fond. Nos parents nous instruisent par la forme qui est le rituel de notre éducation particulière et de notre culture en général. La formation nous est ainsi gymnastique de comportement pour trouver en nous le fond, le véritable fond, l’unique nous même, le cristal de notre rencontre en un seul point ici et maintenant avec la vie. Ainsi me faisait penser mon père avec une bonhommie que ma mère trouvait quant à elle simpliste ou du moins simplificatrice. Elle raisonnait en grandeur et culture universelle. Il ramenait au quotidien bien-être. Je suis de eux deux, sans une inclinaison à choisir un camp. Le bien-être épicurien de mon père ne serait que vase clos s’il ne voulait pas se remplir de toute la connaissance du monde de ma mère. Je n’ai pas souvenir visuel de leur intimité, de leur proximité dans une époque de règles à se tenir en public, devant les enfants et même en pudeur devant soi-même. Je ne les ai jamais vus se plaindre. Ordre des sentiments, ordre des comportements afin que la maison, physique et morale, fut toujours un lieu de repère pour chacun qui devait y retrouver son réconfort. Etres et choses allaient de soi, allaient ensemble sans que les moments de pauvreté ou de richesse, de bonheur ou de détresse, ne puissent ébranler l’édifice de la maison commune. Cette armature matérielle et morale pouvait plier mais ne se cassait jamais car elle plongeait sa racine dans la promesse de devoir, d’une femme et d’un homme puis du couple qu’ils étaient, envers les enfants qu’ils engendraient, dans une société qu’ils avaient défendue de leur corps en temps de guerre et de leur sens civil et moral en temps de paix. Mon constat de ce temps n’est pas regret qu’il ne soit plus dans les détails exactement pareils puisque notre paysage physique et intellectuel bouge à tout instant. Nous voyons, de nos propres yeux, et sentons, de nos propres sens, ce défilé de manifestations de la vie avec justement cette possibilité, unique au genre humain, de la comparaison. Cette continuité dans la vision du défilé de la vie signifie que les mécanismes du comportement humain restent les mêmes depuis la nuit des temps. Les changer n’est pas dans notre périmètre. Ce n’est pas par respect mais par simplicité de voir ce qui existe sans nous, ou presque sans nous,. Remontant d’une église que je ne peux éviter « au milieu du village » je considère sa présence physique de bâtisse au milieu des éléments de la nature et de l’humanité. D’autres temps, autant que l’on s’en souvienne, ont toujours planté de quelque façon un lieu de culte ou du moins de parenthèse au milieu de la matérialité ambiante, à l’abri du contact frontal des hommes. Pouvoir parler et m’interroger sur le pourquoi de ces lieux est ma liberté,  ma non inféodation à qui et à quoi que ce soit. Ne pourrait-on jamais envisager que l’homme puisse réfléchir en liberté à ce qui existe, sans devoir prendre, pour ou contre, parti ? Il est paradoxal que la libération des religions ait abouti à un « contre » les religions dans une idéologie de laïcité, partisane au lieu d’être laïquement neutre, avec permanent besoin viscéral de faire combat à tout ce qui n’est pas elle. Le détour religieux, comme  d’autres, ne semble pouvoir grandir qu’en se dressant contre ce qui précède. Ou bien, plus subtil encore, en sélectionnant dans le passé ce qui valorise aujourd’hui,  et en en rejetant, comme un héritier  ingrat, ce qui a entaché, ce qui lui fait honte dans son paroxysme perfectionniste du maintenant. Cette séparation louable du bon grain de l’ivraie, de ce qui est – ou aurait été – bien ou mal, ne peut rien changer de l’événement passé qui d’ailleurs ne réclame aucune reconnaissance. Simplement maillon suivant de la chaîne de l’humanité nous sommes, avec aucun pouvoir de déformer l’anneau précédent et peu de coercition pour forger le lien suivant. Seule la plénitude consubstantielle, dans son matériau énergétique et sa volonté, est notre possibilité d’être anneau de maximale transition. Accroché au passé, par ce lien physique de la génétique et de la suite des matériaux de la terre et des idées des hommes, nous ne pouvons que suivre dans une évolution mécanique de l’édifice. Nous ne sommes qu’un étage de plus dans l’humanité. La reconsidération des modes de construction précédents se heurte donc à la réalité de tout ce qui s’est sédimenté jusqu’ici. Le perfectionnisme de notre libre arbitre, devenu liberté, nous pousse à reculer toujours le possible et notamment notre possible par rapport à l’autre. L’invention de la liberté, dans sa version de citoyens égaux, place notre individu comme un monde à lui tout seul, une terre promise pour nous seul ! Cette indépendance nous est promise pour qu’intervienne le libre arbitre de chacun d’y travailler lui-même ou de l’attendre des autres. Liberté non acquise par soi-même est aliénation à celui qui vous l’a promise ou qui vous l’a donnée. Ces temps de mon enfance nous laissaient dans cette possibilité de faire, avec les rites éducatifs ou religieux ou institutionnels, qui nous servaient de tuteurs si tel était notre besoin dans le cas comme le mien d’un accompagnement parental ouvert à la personnalité de l’enfant. Le rejet en bloc de toutes ces structures, de bonne ou de mauvaise volonté, ampute les individus trop vite devenus seuls livrés à eux-mêmes. La déritualisation de la société, laïcisation forcenée, a fait fi de l’état grégaire des éléments du troupeau qui aimaient leurs repères, qui voulaient en grandir doucement sans être poussés répartis dans une nouvelle clairière épurée de toutes statues d’exemplarité. Le processus émancipatoire était louable. J’y ai participé  non pour conspuer le passé mais parce que qu’une humanité aseptisée de dogmes donnait, théoriquement, plus d’égalité pour tous. Que chacun puisse se construire sans exemple déifiant dominateur a de la gueule ! Mais ce do-it-yourself de nos vies ne peut se faire qu’avec un plan, de grand petit ou moyen architecte. Un plan il en faut pour qu’au quotidien de nos instants rencontrés nous sachions ce que nous sommes et ce que nous voulons. Sans lecture à portée de main de notre plan mode d’emploi de notre vie nous sommes vivants objets; mais objets manipulés par événements ou personnes trouvant intérêt à influencer notre comportement dans un sens qui leur est favorable. Connais-toi toi-même, qui peut vouloir dire renais en permanence avec toi ; ou bien encore construis-toi toi-même. Mais en tous cas, ne te laisse pas construire par les autres. Parce que la meilleure construction de l’autre, à supposer que l’on nous veuille du bien, ne sera jamais qu’une projection de ce que l’on croit bon pour nous. Nous seuls pouvons vérifier-valider les matériaux et les plans pour nous construire et y puiser, dans l’éducation familiale, institutionnelle, religieuse, culturelle, les processus ayant fait leurs preuves de bien aller. Pour autant que l’on puisse faire référence à ces bien-aller forcément passés, alors que la course effrénée vers l’avenir les ringardise. Ce qui était serait forcément suranné parce que portant la charge – péché – originelle d’avoir existé, pis d’avoir fait leurs preuves quand l’absolu nombrilisme du temps présent ne veut voir que « nos » preuves. Et encore, puisque la fuite inexorable du temps ne laisse plus l’opportunité de voir ce que l’on fait : ne semble pouvoir être perçu que le mouvement du temps, comme si l’horloge montrait ses mécanismes sans nous laisser saisir l’heure qu’il est. C’est une énigme de l’évolution que cette aimantation magnétique de la nature humaine aux rouages qui la manipulent ; au lieu qu’elle se pose, se repose, à regarder les résultats et l’ambiance de la mécanique du temps. Nous venons de la famille au sens qu’il faut un géniteur qui rencontre une génitrice dans une fécondation de plaisir au départ. Ceci est le cadre. Nous en résultons. Les formes varient et évoluent selon les civilisations et les cultures. Selon les mœurs dirait-on aujourd’hui. Mais qu’importe il faut un père et une mère et un désir au départ. C’est un constat qui n’a pas besoin de morale pour être admis par tous. Pourtant la remise en cause est en cours sans qu’un plan de changement puisse être perçu. L’origine en est l’évolution des dites mœurs, et la réclamation des individus à être à la fois seul pour avoir la jouissance d’un enfant, et à avoir besoin d’un couple donneur de semence réceptacle pour le féconder, ce qui s’appelle mécaniquement, et bien avant la morale, un couple ; technologiquement un couple. Aucune tolérance ni aucun progrès ne pourra aller à l’encontre de cette nécessité mécanique. Au lieu que de l’admettre, les insatisfaits de cette exigence primaire s’en prennent au creuset qui incarne dans la société ce couple ; je veux parler de la famille. La continuation sociale du couple biologique est en effet la famille dont les conjoints se promettent des règles à suivre pour accompagner ceux qu’ils procréent. La difficulté d’étaler ces évidences est paradoxalement énorme alors que les progrès de la connaissance, de l’éducation, du civisme et de la prise de conscience en général devraient nous rendre mature à pour le moins comprendre. Au lieu de cela, la famille, par son nom enfermant l’individu, est rejetée comme si elle était notre anti-liberté, notre respect  désuet des ancêtres, notre habitude passive aux gestes et pensées d’antan; alors que le discours ambiant nous ordonne d’être neuf. On parle d’obsolescence des objets, de date de péremption des aliments. Nous aussi nous sommes condamnés par la société à ne pas penser passé, à ne pas vivre recettes connues. Non point parce qu’il y aurait meilleur et qui voudrait donc qu’on l’essaye ! Mais de manière injonctive il nous faut changer pour le changement dans une suite progressiste d’un « il faut consommer pour donner du travail aux manufacturiers de la consommation ». Cette roue là est désormais plus grande que nous et elle va nous chercher dans les moindres recoins de la terre, dans le plus fin interstice de nos vies. Je ne crois pas à des mains invisibles  de puissants faisant tourner la roue pour profiter de nous jusqu’à nous y broyer. La roue tourne toute seule par le simple mouvement de tout un chacun, inconscient de ses effets sur la marche du monde. Il en fut toujours ainsi dans l’espace temps rythmé soutenable. La réflexion, le recul, la non adhésion immédiate quand la diligence ne passait qu’à intervalles espacées. Libre était la possibilité de descendre et de remonter. L’abolition des distances physiques et l’amélioration, que dis-je l’immédiateté, des vitesses rend la diligence, devenue fusée ou bits informatiques, toujours en situation de nous happer. Ne restent ou plutôt ne restaient que les stations haltes de nos familles, institutions, religions, cadres civiques tannés comme un vieil arbre centenaire sous lequel on pouvait faire halte-pause salutaire. De là nous pouvions regarder le temps qui passe trop vite, le laisser filer ; remonter dedans ensuite. La fuite du temps ne se contente pas de nous faire avancer pour ou contre notre gré. Elle éprouve le besoin, afin de dégager ses voies et buts, d’aller toujours plus vite, de démolir, en les rendant ridicules, ce qui lui fait obstacle. Il n’y a rien à en redire puisque telle est la force de gravité du phénomène physique, caractéristique purement mécanique et sans aucune morale du phénomène. Phénomène devenant processus auto-propulsif, par son poids intrinsèque et l’absence de tout obstacle humain  à son exponentielle progression. Est-ce la première fois dans l’histoire de l’humanité qu’un phénomène va plus vite que les hommes ? De tous temps l’imprévu physique et humain a surpris l’humanité qui en faisait contre mauvaise fortune bon cœur, dans ce retranchement de modes de pensées qu’elle avait encore le temps d’avoir. Aujourd’hui l’immédiateté arrive avant la pensée, qui devient un luxe pour les seuls sachant arrêter le temps, sachant s’arracher à l’emprise de la grande roue. La nouveauté est grande, immense, révolutionnaire au sens de capacité de changer l’évolution. Nous semble loin de quémander un vain « oh temps suspend ton vol ». Sauf si  l’on sait revenir au fondement de notre caractéristique d’Etre humain qui est de savoir dire Oui ou Non, qui est de se joindre ou pas aux courants, qui est de se construire un Soi possible rien que pour soi. Nous commençons ce parcours, vers un nous construit dans la fragilité de notre naissance faisant de nous des êtres déjà respirant sur terre mais non finis pour y évoluer seuls. Les dispositions matérielles et morales que représente la famille sont nécessités de survie, à la différence d’autres règnes où les êtres sont autonomes dès le premier jour. La contrainte de cette infinitude, laquelle entre parenthèses nous poursuit toute notre vie, nous oblige à trouver ce qui va nous former, transformer. Sans entourage nous ne pourrions pas décoller de notre état de bébé. Cette nécessité de la famille, ou de toute autre appellation clan-tribu-fratrie-etc…, rencontre de nos jours la critique que nous ne serions pas libres alors que nous devrions l’être. Quelque part l’ambiance du temps nous intime d’Etre avant même de savoir comment être, comment être formé à être. L’ambiance du temps nous catapulte immédiatement dans le mouvement de l’immédiateté et de la grande roue happant dès le plus jeune âge ; tablette tactile pour bébé de neuf mois, téléphone portable pour enfant de six ans. La formation particulière, apanage de la famille puis des institutions, est supplantée par des dispositifs enclenchant le bambin dans un système rationaliste pour penser, vivre, consommer, selon un intérêt général codifié applicable collectivement à tous. Le dénominateur commun, nonobstant le particularisme de chacun ! Difficile d’y résister sans passer pour un réactionnaire, un empêcheur du bien commun, un ambitieux égoïste. Or il ne s’agit que de préserver la potentialité de chacun de devenir ce qu’il est et non ce que la société pense de lui sans le connaitre. La statistique, l’étude moyenne des comportements, la volonté d’un bien-être global réparti pour chacun ne sauraient satisfaire ce que nous sommes, pris individuellement dans le particularisme de nos corps et âme. Notre unicité n’est pas une revendication nombriliste. C’est une évidence mécanique de cette grande roue qui nous fait tourner tous ensemble, mais avec pour chacun notre boulon-écrou particulier qui nous y accroche. Ce n’est qu’évidence commençant par la singularité unique depuis la nuit des temps, de nos plus de soixante milliards d’ancêtres avec chacun leur faciès, leurs empreintes digitales leur ayant justement permis de façonner leur monde. Et le miracle est que jusqu’à maintenant l’assemblage global a toujours assimilé, sans les confondre, chacune de nos diversités. Cette confrontation de l’individu dans la globalité est un long processus de la vie individuelle qui doit être protégée et de la vie collective, qui doit s’arrêter là où commence justement le ressort individuel. La collectivité dans sa meilleure bonne volonté ne peut avoir, par exemple, la tendresse telle que l’a, un par un, la famille à l’égard de ses enfants. Il ne s’agit pas forcément d’amour mais plutôt d’onctuosité de rapports entre adultes et enfants. Par cet exemple de défense du cadre de la famille je veux surtout pointer la nécessité impérieuse d’un lien non explicatif, non prévisionnel entre humains en général et enfants. Il faut que l’enfant ne se sente pas en soumission rationnelle à un cadre définitif. Il est d’âge à ne pas savoir ce qu’il est, ce qu’il veut, ce qu’il sera. Ses réflexes à la vie n’en sont que plus instantanés, instinctifs, ne demandant qu’accueil et écoute pour en comprendre les aspirations à justement ne pas satisfaire tant elles sont dispersées. Aucun filtre rationnel ne peut prendre en compte ces multiples manifestations du jeune âge. Seule la famille écoutante et unie de ses deux géniteurs peut accueillir, identifier, motiver ces enthousiasmes. Ce n’est pas un problème de morale ou de critique mais une observation de ce qu’il advient des individus. Faire autrement est possible puisque notre époque le prouve dans un « ongoing process », dans une évolution en cours, au milieu du gué, dont nous savons que nous avons quitté une rive sans bien savoir ce que sera l’autre rive ni même si elle existe. La conviction qu’il ne peut pas en être autrement n’est pas assurance de pouvoir y parvenir. Nous ne suivons pas un parcours connu mais au contraire nous laissons s’inventer une méthode de la prise en charge hors cadre familial stable. Il se peut, et je le souhaite sincèrement auquel cas je me serai trompé, qu’en advienne un individu encore plus libre puisque décontingenté de la subjectivité de ses parents en y ayant gagné des outils affinés de préhension des êtres, des choses et des connaissances ? Pourquoi pas ? N’en demeure pas moins le passage en force d’une situation connue éprouvée, la famille, à une situation expérimentale pour des sujets humains qui s’y rateront ou s’y réussiront. Je n’arrive pas à assumer cette part de saut dans l’inconnu qui n’est pas un risque au sens de s’engouffrer dans une voie par obligation, mais qui est un choix de ne plus assumer son rôle de parent tout en voulant avoir quand même ses enfants. Le jugement moral dont je serai taxé n’est pas dans mon analyse seulement mécanique de ce que j’ai vu jusqu’ici correctement ou presque fonctionner ; alors que la proposition géniteurs d’un côté enfants de l’autre est par nature une séparation des fonctions. Oser l’expression sur le sujet vous fait passer pour le défenseur d’un clan, le pourfendeur d’un autre clan devenant nommément adverse. Mais il faut oser étaler ces faits de société afin que les individus concernés se les réapproprient. Ce sont nos vies, dont les changements n’ont rien d’inéluctable et doivent d’abord être décidés par nous. Les statistiques diffusées sur une moitié de divorce après mariage, sur 63 % d’enfants parisiens issus de couples séparés, deviennent médiatiquement une autosuggestion de suivre le mouvement comme la courbe haussière ou baissière de la Bourse. Eh bien non, puisque le nombre n’est que la somme des individus, l’unique que nous sommes n’a pas à y concourir contre son gré. Je ne suis pas ce que la société veut faire de moi. Je suis UN, dans une société à qui je confie de ma seule volonté des délégations de vie communautaire, dont j’attends en retour, c’est ma première exigence, que je reste ce que je veux être. Il y a, sinon, rupture de contrat. Le champ de notre partage est suffisamment vaste pour que les échanges nous profitent les uns vers les autres. Ce n’est que par envahissement des uns, et lâcheté conséquente des autres, que le tissu de notre communauté d’êtres humains se déforment sous le poids d’un intérêt, dit commun, dévoyé. Ce qui est partie intégrante de nous, comme notre individualité ou notre environnement affectif familial, ne doit jamais, quelles qu’en soient les rationnelles raisons, être manipulé par autrui. Penser et dire, à ce moment de la vie, est la convergence de l’expérience et de l’observation qui soudain vous donne envie de se manifester. J’ose parce que j’ai rencontré des personnes, dans un vrai chantier humain, pleines de potentialité et de vitalité, à qui je veux dire vas-y, vous êtes capables. N’ayez pas peur de vous ! Osez-vous ! La rencontre de ces Etres est l’acte fondateur, le carrefour réconciliateur d’une existence. Tout existait avant, tout allait bien jusqu’ici, mais ce déclic vous fait monter dans la grande roue vers de nouveaux horizons. L’aventure personnelle ne serait qu’anecdote pour moi si elle ne m’amenait pas, au contraire, dans un champ élargi vers toute la potentialité humaine. Avec elles j’ai envie de tout faire parce que toutes leurs différences sont comme des flèches que je peux lancer vers de nouveaux combats. Je n’ai pas envie d’adopter leurs champs de la vie mais l’explorer, le connaitre, et y faire terrain de réflexion m’amenant ici à vous faire partager ce monde. Ce n’est pas un territoire précis. Je ne peux le définir que par rapport à moi dans ce que je savais jusqu’ici. Le nouveau territoire, new frontier, me remet en selle de cow-boy conquérant connaissances et manières de voir. Le savoir et le savoir-faire du monde sont infinis, et, en plus, se baladent dans un espace temps qui empêche leur fixation définitive. Nous ne savons jamais ce qu’il nous est donné de voir-entendre-sentir à un moment précis de notre perception et de notre faculté de mémoriser l’expérience du passé. L’histoire linéaire du monde et des hommes est hors de notre atteinte. Nous ne sommes que parenthèse au sens restrictif et humble ; mais nous sommes, ce qui revient au même, au sens positif et glorieux, maillon indispensable du présent pour passer l’expérience humaine du passé vers l’avenir. Cette vision précise de l’anneau passeur entre le précédent et le suivant déclenche en moi une notion fondamentale d’égalité. Une chaîne ne peut avoir de maillon individuel trop fort qui tracterait en rupture un maillon individuel trop faible. L’équilibre générationnel s’impose pour que forts et faibles dans leur effort individuel deviennent ensemble résistants. Consistances différentes sont plus appréciées que forts et faibles trop duels. La beauté de la rencontre avec l’Etre est cette découverte des matériaux différents dont il ou elle est constituée, dont je suis constitué, et dont à vrai dire je ne vois même pas ce que nous pourrions construire physiquement ensemble. Qu’importe s’il n’y a pas de projection architecturale durable, palpable. Les matériaux découverts n’ont pas besoin de faire bâtisse touchable palpable pour exister. Ils sont dans une rêverie de jongleur avec laquelle je joue, je m’émeus, j’affute mes sens et mes comportements (gestualité) afin que le jeu démonstratif continue, même si nous savons que ce ne peut être qu’un spectacle de nos vies respectives. Jongler des éléments du monde est pour moi embraser tous les phénomènes de la terre par mes sens perçus. Ils sont mes objets, mes existants,  de la fenêtre de vie de mon passage sur terre. J’y suis. Le fait d’y être vivant est une acceptation de mon moi à l’ égard du monde. Ou plutôt symbiose d’un monde qui est en moi alors que je suis dans le monde, sans faux semblant de petitesse ou de grandeur de l’un ou de l’autre ; sans fausse déclaration que je serais utile au monde ou que le monde me serait utile. Se départir de cette notion inventée d’égalité ou d’infériorité ou de supériorité. Il n’y a que des Etres, des organismes au sens de structures en fonctionnement. Les uns partent, d’autres durent. Les unes réfléchissent, les autres n’ont peut-être pas besoin de réfléchir. Sans aucune formation ni encore moins prétentions scientifiques on ne peut qu’émettre, comme je le fais, son ressenti de son support d’homme avec le reste du monde ; homme puisque tel est l’état terrestre dans lequel on me mit. Les dispositions particulières de mon genre humain sont parcelles de ce puzzle du monde qu’il ne m’appartient pas de chambouler. Mon insertion-assimilation à toutes les pierres du monde garantit la cohésion de l’ensemble. La meilleure intention d’améliorer l’état de ce  monde oblige à envisager la transformation de ce qui est hors de nous, posant le problème de respect d’autrui. Améliorer ma performance personnelle au monde, c’est-à-dire ma congruence, mon bien-aller avec les éléments extérieurs à moi, est par contrecoup de mon pouvoir, voire de mon devoir. C’est un pouvoir de domino capable dans son entrain d’incliner son voisinage. Le respect de l’élément que l’on est ne se construit pas en forteresse protectrice des autres éléments. La constitution du moi personnel, ouvert à se faire du plaisir à soi pour être bien, englobe naturellement notre goût des autres dans leur pauvreté ou leur richesse. Cette utopie de l’autre et du monde est-elle réalisable ? Servirait-elle à quelque chose ? N’existerait-elle pas déjà que je ne la verrais pas ? Oui sans doute ; mais eh alors ! Chaque nouveau venu sur terre, et nous sommes nouveau venu à chaque instant, a le droit de poser la question de ce qu’il est, de ce qu’il fait, de ce qu’il désire. Refaire « son monde » à chaque instant selon la perception la plus récente que l’on vient de ressentir. Ce façonnage de notre « moi » est le signe de notre révolution permanente pour justement être bien inséré, accroché dans un monde fait de milliards d’autres « moi », de milliards de milliard d’éléments minéraux, biologiques, animaux ; de milliards de milliard de neurones et synapses assemblés sans aucune uniformité. Nous n’en savons seulement, que pour être vivant, il nous faut avoir de la vitalité physique et intellectuelle dont l’exercice de construction d’un bon « moi » est salutaire mouvement. La revendication de soi est l’acte autopropulsif de nos vies, de notre contribution au puzzle du monde. Je ne brandis pas le spectre de l’uniformisation orwellienne qui veut dominer et asservir. Personne à mon avis ne dirige le monde : ni la main invisible de l’argent ni le satan du mal. La seule culpabilité est de ne pas oser notre « soi », d’attendre les autres qui nous attendent aussi formant ainsi inconsciemment la longueur d’un arrêt de bus qui n’arrive jamais puisque nous ne nous décidons pas à le faire fonctionner. Les philosophes sociologues écrivains fouillent en archéologues les profondeurs des âmes, cœurs et comportements. Trop souvent ils décrivent et constatent, sans inciter au déclic d’inversion de la marche du monde, de notre monde, de mon monde. Je n’ai qu’une vie que je peux vivre en vrai avant que les philosophes et sociologues en parlent. Il nous faut être avant d’avoir été. Ce n’est pas illumination de soi-même que de se croire élu à sa destinée. Moi seul peux parcourir mon chemin. Ma seule main peut décrocher mes étoiles, au-dessus desquelles il peut être un univers de ma composition hors normes scientifiques existantes et connues. Ma situation gravitationnelle dans l’espace 3D, qui n’est pas plat, a sa part de petitesse au sens de n’être qu’une infime petite division d’un grand tout ; mais aussi sa part de complémentarité par le voyage et les escales que j’y fais. L’univers ne m’appartient pas mais il m’attend dans un échange pour s’y comprendre et s’y améliorer. La révolution du monde passe par l’addition de nos révolutions respectives personnelles. La nature, qui a horreur du vide, continue sans nous si nous n’y prenons pas part et si nous nous privons ainsi de ce droit de regard et d’action. La synergie nous-monde se visualise à une pièce détachée que nous sommes pour faire fonctionner le grand monde : si nous n’y participons pas, le monde, marchant sans notre contribution, ne sera pas le nôtre et nous le regarderons en étranger. Croquer notre écorce protectrice du monde est notre premier acte immersif pour se sentir « avec », com, communication, communion, communauté, compagnie, cet « com-avec » se décline à l’infini dès que nous franchissons la porte de notre « moi ». Nous sommes seul ou avec. Un avec qui ne veut pas dire « dans » c'est-à-dire dilué dans une masse. Avec veut dire participant de son moi, avec plein d’autres moi, pour faire ensemble des parcours vers des buts. Pour partir sur ce chemin, savoir ce que l’on est est indispensable pour soi et pour les autres avec qui on se joint, « avec » lesquels on envisage un bout de vie. L’oubli de ce que l’on est, ou plutôt le déni de ce que l’on est, car on est de toute façon forcément qu’on le veuille ou non, le déni constitue un délit de laisser en nous un passager clandestin qui nous surprendra un jour. Il faut se savoir, ou du moins se rechercher, pour embarquer « avec » les autres dans un projet, une communauté, une citoyenneté. Nous devons choisir notre destination avant d’embarquer. Savoir ce que nous sommes et quels sont nos bagages avant de se laisser prendre en charge par une compagnie, une communauté, sans précaution qui serait en fait dictature par l’asservissement. Par les mots tout devient compliqué et intellectuellement barbant alors qu’il ne s’agit que d’un cri primal de revendiquer un « moi d’abord » qui je suis avant d’accepter de monter avec vous. La fuite de la poursuite des idées à travers le temps connu des 6000 ans qui nous précédent aurait du largement nous faire accéder à un sommet sophistiqué de la connaissance et de la pratique de l’humain. Nous devrions être proches de la perfection depuis que l’on nous dit « connais-toi toi-même » ? Regard furtif ; puisqu’au simple présent je n’ai pas l’impression que l’on soit meilleur en ce domaine par rapport aux temps anciens. La vertu de se connaître et de se comporter soi-même me semble se buter, de manière répétitive, à un double obstacle. Les avancées dans un domaine et à un moment donné, portent souvent leur contrecoup d’effets induits, de conséquences, de victimes collatérales. Nos efforts civilisationnels  avancent comme une mer qui se retire ensuite. Il en reste toujours mais pas assez pour que nos vies soient parfaites. Pourtant je veux décrire, sans prendre la réflexion d’y adhérer, que les connaissances et les outils de préhension du monde et de nos individus en particulier, existent. Techniquement mis ensemble nous pourrions évoluer dans un univers physique et humain parfait. Ce n’est pas le cas, et il est peut-être nécessaire que cette impossibilité de perfection subsiste, à jamais. Peut-être est inamovible une part de l’homme incertaine, matriciellement non finie, qu’il nous appartient d’éprouver compléter le temps de notre vie. Mais dont nous effaçons largement le tracé sur notre ardoise personnelle lorsque nous trépassons. Ne laissant uniquement que l’odeur de notre craie et le contour indistinct de nos actes. Pourtant entretemps nous avons conçu, vécu, transcrit parfois l’originalité de notre passage sur terre. Peu en importe le contenu technique qualifiable. Nous avons fait, nous aurons fait, dans un temps - dans ce cas le nôtre -  qui n’était que pour nous. Chaque génération suivante repart à une case départ qui n’est jamais la case précédente ou exactement identique à la case de l’autre. Peu d’inné pour que nous soyons contraint à construire notre acquis. Voila peut-être pourquoi les expériences humaines ne s’additionnent pas, ne passent pas sélectivement dans l’entonnoir vers une perfection. Suis-je d’ailleurs, ou plutôt sommes-nous les premiers à se permettre le point de vue que nous sommes arrivés très haut et qu’à ce point de supervision de tant de connaissances nous pourrions maitriser le monde ? C’est réalité constatable que de voir et d’expérimenter des manières exhaustives de vivre : instantanéité de l’information, automatisation exponentielle des tâches, introspection et intrusion dans le fonctionnement du corps humain. Ces coups de butoir dans l’humain, tel que je suis né, mute mon état qui résiste et demande à comprendre ce qu’il y a de bon là-dedans pour laisser se transformer en moi mon ergonomie – ma manière humaine de faire – à la vie. Il n’en est pas de même avec les « digital natives » exprimant du doigt sur les icones du smartphone avant de prononcer le premier mot instinctif ou réfléchi. Je ne doute pas que mon nouveau « digital native », qui n’en restera pour autant human native, trouvera comme moi aujourd’hui sa réaction à son temps d’alors. Il trouvera, j’en suis sûr, de quoi admirer ou regretter mais en tout cas faire avec ce que nous lui aurons mis entre les mains, au bout des doigts. Car nous l’aurons mis de notre propre volonté, ou en tout cas non refus que ce monde lui soit donné sans presque alternative qu’il puisse le refuser. Pourrions-nous, au moment où nous le faisons, être conscient de ce que nous faisons. Sans réfléchir trop loin, sinon on n’avancerait plus, aux incidences d’une découverte, je peux me demander ce que je vais en faire, quel changement en moi va-t-il produire, qu’est-ce que j’acquiers et qu’est-ce que je détruis, est-ce que je reste le « sujet », l’acteur, de cette nouveauté ou est-ce que j’en deviens « l’objet », celui qui est utilisé ? Ce n’est pas moraliste mais fonctionnaliste que de se poser ce petit inventaire de questions. Achèterait-on une maison, une voiture ou un vêtement qui nous obligerait à une amputation préalable d’un de nos membres. La sphère globale du monde n’est ni le bien ni le mal, ni la pauvreté ni la richesse, mais un contenant dans lequel il y a un UN qui crie sa raison d’être et qui est moi ! Cri existentiel, oui j’existe, de joie, dans un environnement qui incite à se taire puisque apparemment tout va bien, tout est prévu, tout est sous contrôle. En effet de louables modifications de comportement en société nous rendent  la vie agréable. Le principe de précaution est cette formule consistant à décrire le danger avant même de savoir s’il peut arriver. Mais en tout cas à utiliser les mots, sans possibilité d’être contredit, qu’il y a partout risque c'est-à-dire éventualité négative que quelque chose de désagréable arrive. Paradoxe de notre évolution technologique et intellectuelle que le pouvoir de prédiction, autrefois apanage des seuls qui, dévolus à une divinité, acceptaient d’y croire. Paradoxe de la laïcisation de la société qui eut du nous rendre libre des croyances. Alors que dans une laïque idéologie elle s’empare de la prévision pour en faire une science infaillible qu’elle nous impose. Le « mieux vaut prévenir que guérir » devient un stop à l’action. Ne nous reste que la précaution qui n’a jamais rien fait ni guéri personne. Pourtant le regard sur toute l’évolution de l’humanité ne nous fait pas voir un long fleuve tranquille nommé « précaution ». Les choses, y compris de civilisation, nous ont, pas à pas, construits et amenés à cet étage de l’humanité où nous sommes. Aucune de ces choses, telles que nous pouvons les imaginer dans leur contexte d’alors, n’aurait de chances de voir le jour en ce XXIème siècle. Preuve même que les choses d’aujourd’hui auxquelles nous assistons nous prennent  par surprise, sans feu vert, par effraction, par déviation d’usage. La bombe atomique, la numérisation des données, la transmission instantanée, le remplacement des cellules ont échappé et continuent leur exponentielle trajectoire bousculant la précaution et les principes de nos sociétés institutionnellement trop sages. Impliquant, par déduction, qu’il faut être outsider-borderline voire anormal, pour faire bouger la société. Car du côté officiel de celle-ci, de nos dirigeants, de l’organisation pyramidale ancienne, le mot d’ordre est que nous dormions bonnes gens tandis qu’au-dessus ronronnerait le marché d’un monde sans problèmes, et donc sans besoins de nouvelles avancées. N’entamons rien si nous n’en sommes pas sûr ! Or qui peut être sûr ? Et de quoi être sûr ? L’origine de ce principe d’attentisme à ce que l’on ne sait pas doit provenir d’une inversion récente  de notre raisonnement. Ce qui ne se savait pas s’appelait mystère ; ce parcours dont nous ignorions les étapes s’appelait destin ; ce déclic qui pourrait nous y avancer quand même, avec souvent la foi du pèlerin, s’appelait courage ou esprit d’entreprendre.. Tout cela était sans doute trop vague, trop aléatoire, trop en allégeance à des convictions il est vrai épaulées par des religions coercitives. Les modernes que nous sommes s’en affranchirent en brandissant les vérités scientifiques de l’instant qui ne sont, en l’état, qu’un arrêt sur images de leur progression en cours. N’accusons pas la science qui ne dit à un moment que ce qu’on lui arrache à dire. Et qu’il est bien commode de brandir pour remplacer le flou des convictions d’autrefois, et le non savoir humble dans lequel nos ancêtres acceptaient  leurs conditions, soumises aux éléments mais respectées dans leur éthique. Le principe de précaution réintroduit par le rationnel la notion de bien et de mal dont elle voulait nous extraire. La primauté actuelle des activités intellectuelles et tertiaires au détriment des pratiques manuelles primaires n’est pas étrangère à cette fuite en avant de l‘esprit détaché de son corps. La pensée précède l’action au point de la prévenir de ne pas faire. Qu’en sait-elle la pensée de ce qui est dangereux. A-telle des doigts pour se brûler, des yeux pour pleurer. Je m’efforce quant à moi de toujours penser, car il le faut, penser « manuellement ». C'est-à-dire d’envisager la réalité de  l’acte que nos neurones conceptualisent abstraitement. De ce niveau individuel qui est le mien au niveau collectif qui est le principe de précaution il n’y a qu’un problème de taille et d’effets. Chacun d’entre nous doit oser mettre en pratique ses pensées. La somme des chacun(s) d’entre nous s’appelle une institution ou un gouvernement qui doit oser mettre en pratique les idées existantes et émergentes. L’évolution n’a pas de frontière géographique, culturelle ou ethnique. Le groupement d’hommes, qui par précaution s’y soustrait, prend la responsabilité de laisser les siens sur le bord de la route d’un progrès qu’il est dans notre individu de désirer. Les arrêts ou refus de monter à bord n’ont jamais sauvé une civilisation. Elles se sont arrêtées, mises en déclin, mais jamais elles n’ont prouvé que leur mise à l’écart les aura sauvées. Personnellement je ne peux échapper à une prise en otage de précaution, de danger, même si j’ai les meilleures raisons individuelles de fuir. Dans le groupe, tant qu’il est en état, la rébellion est impossible. Ne pas se rebeller n’est pas pour autant acquiescer et ne pas entreprendre l’acte individuel critique de la pensée précautionneuse. L’avantage de la circulation horizontale de l’information permet une multitude de sources approchant plus qu’auparavant le vrai. Emettre son avis, proposer des alternatives locales au global est à notre portée. Ne pas se laisser faire par le discours ambiant. Remettre en questions, en les questionnant, les détenteurs de la pensée unique. Pourquoi, comment, combien ? Avec respect, sans invective, sur de notre droit à savoir et notre intime conviction à pouvoir convaincre peut-être ? Il faut y travailler beaucoup plus à mon avis que ceux qui se barricadent dans la précaution. Il faut savoir de quoi l’on parle. Avancer des faits même si l’on y met de l’audace. En face, les arguments ne sont pas aussi démontrés qu’ils le prétendent. Ce n’est pas pour rien que cela s’appelle « principe » de précaution, dans un abus d’effet d’autorité sur les masses qui est une volonté de nous dire que « c’est comme cela » et pas autrement. L’époque nous permet désormais de « dialoguer » avec les puissants ou les puissances. Notre information et notre parole peuvent circuler. A nous d’en définir le but et les moyens pour ne pas sombrer tout de suite dans la revendication. Je m’informe, je comprends, je questionne et je peux avoir une réponse. L’alerte sur les faits du monde est une immense avancée dans la connaissance des uns et des autres dont la distance et les moyens nous privaient autrefois. La quintessence que nous en retirons est affaire de qualité de notre vie. Nous pouvons n’y être que des curieux, des voyeurs, des blablateurs devenant des millions sur des réseaux sociaux alors que nous n’avions il y a trente ans que dix comparses autour du comptoir du café du commerce. Les millions, au lieu des dix, ne sont pour autant pas armée déterminée de notre cause. Justement ils causent, ils commentent, souvent dans l’irresponsabilité de l’anonymat numérique. Ils créent le buzz, qui n’est qu’une moderne rumeur. Pourtant elle court elle court la rumeur relayée par une industrie de l’information qui consomme, comme si elle en mangeait, tout ce qui bouge. Elle n’invente rien mais fait grand cas de tout dans un charivari de valeurs pourvu que cela fasse spectacle. Le « show must go on » en continu comme l’info du même nom. Donnant à voir au spectateur d’impulsion, passant là par hasard au contraire de la destination où l’on vient exprès, un divertissement du monde par acteurs politiques, sociaux, économiques interposés. Nous y devenons accros au rythme et à la mise en scène, en reléguant au second plan de notre état d’humain le concernement réfléchi de ces infos sur notre vie. L’ensemble des décors de notre société s’est constitué en théâtre permanent ayant vocation à nous divertir au sens dis-tractif, dé-viationiste de nos chemins personnels. Que nous soyons de vrais nous-mêmes freine cette société du spectacle qui a besoin de notre passivité à nous-mêmes, qui n’aime pas que nous organisions nous-mêmes notre activité. Non point par possessivité ou dictature sur nos vies contre lesquelles les masses se rebelleraient vraiment. Plutôt par prévention précaution que nous n’ayons pas d’idées, que nous ne pensions plus à suivre les leaders, que nous consommions trop de manière personnelle rendant la loi de l’offre et de la demande ingérable. Les offreurs de service de notre société précèdent leur offre en infantilisant la demande ; en la conditionnant dans un présupposé de nous ne sachant pas, ne voulant pas, ayant peur. Mêmes les excès et aveux de cette mainmise deviennent cynisme accepté voir compris comme inéluctable. La préparation de nos esprits est constante pour nous faire comprendre comment agir et même en amont comment penser. L’état de l’opinion, par salves progressives de sondages diffusés, n’est autre que malaxation de notre pâte humaine, avec la subtilité de la petite touche qui empêche de voir le sens du courant, et encore plus fort, qui ne désigne jamais le manipulateur lequel d’ailleurs n’existe pas. Il n’y a pas  de machiavélique transformateur déterminé à échanger nos vies. Pas de coupables, à débusquer la main dans le sac ; mais un esprit du temps,  comme un nuage, faisant incliner dans ce qu’il faut penser, dire, ou faire pour faire société ; cohésion nationale oblige. Sans rendre forcément la masse ni les gens malheureux le procédé, en tout cas, dépersonnalise l’acte global et l’effort individuel de chacun qui y contribue. Si tout se massifie il n’est plus besoin d’individualiser. Il ne faut plus que rendre les individus assimilables dans la masse en les gratifiant de tout ce qui fait plaisir, et en enlevant finalement tout ce qui garderait un goût personnel de chacun susceptible d’incommoder les autres. C’est de moi dans cette masse dont je parle. La communauté, le « avec » les autres, OUI. Le fondu, confondu dans la masse, NON. Le dilemme est simple entre ÊTRE et SE LAISSER ÊTRE. Moi seul peux décider d’ÊTRE. La société, la culture, l’éducation m’y aident mais ne peuvent faire à ma place sauf à me dénaturer par les formes normatives auxquelles elles m’obligeraient. La même société, sauf cas particuliers de l’histoire, ne veut pas réellement faire à notre place. Elle n’y procède que par nécessité ; parce que les citoyens baissent les bras ou sont dans une précarité. La somme des individus, décidant de leur sort, est bien plus motrice, novatrice, conquérante qu’une masse asservie et en attente d’assistance. Aucune instance institutionnelle ne peut dire aux individus de la masse : relève-toi, redresse la tête et vas vers ton but. Il n’y a que chacun qui puisse avoir cette envie et dire à la société son individualisme. Les prophètes veulent le bien des gens sans leur demander quel bien particulier, le leur, uniquement le leur, conviendrait. Je ne sais rien tout seul pour les autres mais je le sais pour moi. Ou du moins je sais que je suis le mieux placé à savoir pour moi. Ce n’est pas prétention mais constat de notre fonctionnement, avec des mécanismes dont nous savons l’assemblage unique, fait à notre seule spécifique mesure. La prise en charge dans une masse est contraire à une possibilité de bien aller, sauf bien sur à ne prendre dans la masse que tout ce qui est dénominateur commun et laisser en jachère tout ce qui dépasse les normes définies pour être pareils. Aller ou ne pas aller dans la masse est un acte à la portée de chacun car il n’engage pas une révolte périlleuse mais tout au plus une réclamation au droit d’être UN inassimilable. Je mène, ou plutôt me promène, dans cette attitude depuis mon premier état de conscience que j’ai toujours  voulu se laisser aiguillonner par le piment de la rencontre. Le fait social, le goût des autres, sont le creuset dans lequel nous mijotons sans que nous ayons à faire masse avec ce que nous côtoyons. L’autre, dans cette acceptation de partenaire punching-ball de nos actes, l’autre nous envoie en permanence les signaux propres à guider notre convoi. Il nous est physiquement impossible de nous voir. Même le miroir n’est qu’une image inversée. Aussi le signal de l’autre est vital. Pour le voir, il faut accepter la rencontre, le croisement, la confrontation, l’expérimentation et si possible avec ceux qui ne nous ressemblent pas, ceux capables de nous envoyer des signaux d’une exploration que nous méconnaissions, que nous craignions. Dans le doute de savoir, s’il faut ou ne faut pas, celui qui vous dit « vas-y » est notre bienfaiteur. « Vas-y » car « si tu ne sais pas pourquoi maintenant », « tu sauras pourquoi en en revenant ». L’enrichissement ne vient que si l’on marche vers lui en ne sachant pas au départ où il est. Or, dans ce doute que nous avons biologiquement de par notre nature d’être pensant, seul l’autre peut agir. Seul, notre doute s’autogénère. Alors que l’autre, qui au même moment n’est pas dans le doute, a cette force motrice pour nous faire douter de notre doute. La rencontre est capitale. Le parcours d’une vie tient à la qualité des carrefours, des occasions, où l’on rencontre les bonnes personnes. Celles qui vous voient et vous renvoient à votre vrai vous-même sans vous juger, sans vous accaparer, sans vous prendre dans leur masse ou vous faire rentrer dans la masse d’un autre. La bonne rencontre est le fruit du hasard lequel s’organise quand même par la disponibilité que l’on offre de soi-même à la vie. Savoir ce que l’on est pour éviter les déboires de la rencontre ennemie. Mais savoir aussi ce que l’on n’est pas encore, ou pas suffisamment, pour se laisser voir par l’inconnu dont il sera toujours temps de se rétracter si danger se présente. La méfiance réflexe de peur à autrui se comprend en termes de risque d’être agressé. Crainte généralisée de tout ce qui ne nous ressemble pas revient à s’isoler, à refuser le contact susceptible de nous enrichir. Que peut-il donc nous arriver à s’approcher de l’autre ? Perdre son temps alors que justement on a cherché à se divertir ? Risquer la blessure physique ou morale alors qu’il est toujours possible de s’écarter ? Etre déçu de l’autre dont on ne saisit pas les différences ? Tout cela est possible comme est probable la séduction, l’engouement, le plaisir, le retour flatteur vers nous. Et surtout l’inconnu de l’autre, ce miracle de la machine humaine qui soudain devient acteur secondaire ou principal du théâtre de votre vie. Ainsi vous êtes, vous qui survenez. Le reste ensuite est à gérer dans la place sociale qui convient. Quelle que soit l’intensité affective, émotionnelle, matérielle de la rencontre elle envahit, dévaste, repeuple mais nous laisse dans une liberté de conduite. Non pas que nous choisissions mais parce que chacun reste ce qu’il est dans le destin de sa seule vie. Rester soi-même est notre condition d’homme. Banalité de répéter cette évidence mais nécessité de rappeler cette disposition de notre caractère d’humain où tout ce que nous vivons et éprouvons nous renvoie toujours à nous même, dans une poste restante, case restante, toujours ouverte où nous encaissons, et nous seuls, toutes nos expériences. Une machine qui subit un choc en tombant par terre ne râle pas ni n’en éprouve de honte ; elle ne marche plus et c’est tout. Nous nous voyons le sang de la blessure, dans un premier réflexe de le stopper, suivi immédiatement d’un sursaut de prise en compte psychique, de volonté de s’en relever, de réflexion de ne plus se laisser prendre à pareille mésaventure. Ce renvoi de toutes choses à nous-mêmes fait souffrir et jouir en même temps. Nous devenons et sommes. Etre nouveau à travers ce que nous expérimentons et qui consciemment n’est jamais exactement comme la rencontre précédente. L’instant d’après est notre devenir, notre Etre nouveau imprévisible auquel nous pouvons être prêt si nous ne disons pas non par avance, par principe de précaution. La chance m’a été donnée à la naissance d’avoir une propension naturelle à m’ouvrir aux autres et à ce qui m’entoure. J’ai l’impression que l’on m’a toujours dit « vas-y ». Lors d’un petit conflit avec un collègue de travail le patron me dit que la confrontation était inévitable : il, ce collègue, était poing fermé dans les situations alors que j’étais main ouverte. Suscitant une frustration de cette main tendue vers les autres et qu’ils ne veulent pas saisir. Mon incompréhension devient souffrance de ne pas être vu dans ma démarche sincère. Au point souvent de s’envenimer lorsque on me suppose un calcul, une tentative maligne de ma part de vouloir manipuler. Pourquoi le geste pur, la joue tendue, suscite-t-il cette pré-vision négative non seulement à mon égard d’où part cette présente analyse ; mais à l’égard de tout ce qui est autre que nous, ce qui est exogène ? Cette prévention négative tire sa raison d’être de cas réels d’abus de confiance, de crédibilité trompée, ou d’espoirs déçus. Dans ces occasions l’échange donneur-receveur n’a pas été vigilant de la part du receveur. Entendre ou recevoir des choses agréables, même dans l’expérience de la séduction, requiert de se demander avec positivisme quelles sont les intentions du donneur. Y compris son bon cœur, peut-être trop fragile, pour ensuite attendre du receveur plus que celui-ci peut lui en donner. Une règle simple me semble - non, tout simplement, est - que nous ne pouvons en tant que receveur accepter une attitude du donneur lorsqu’il attend de nous un retour. Certes nous lui disons merci. Certes nous lui rendrons de mille autres façons, mais imprévisibles, notre plaisir de recevoir d’aujourd’hui. Il ne peut y avoir concrètement de donnant-donnant dans une relation donneur-receveur. Mais l’esprit, qui doit y prévaloir et régner, est celle d’un gagnant-gagnant sans mesure des apports de chacun, et sans calendrier contraignant. Savoir jauger l’adversaire, dit-on, sans que pour autant « adversaire » ait un sens d’ « ennemi ». Savoir jauger l’obstacle, savoir apprécier ce qui est l’autre, être ou chose, est le réflexe de base indispensable de notre humanité que l’on peut aussi appeler, pour ma part, libre arbitrer. Arbitrer ce qui est bon ou mauvais, non pas en soi, mais pour moi. Nous avons un environnement frictionnel avec ce qui nous entoure. Des vues, des odeurs, des sons, des sentiments, des comportements, nous hérissent ou nous séduisent sans passer par la case raison. Instinctivement nous avons à faire face et nous réagissons, par un pour ou contre qui peuvent et doivent ensuite se modérer, dans une obligation de vie en société. Mais la « première » impression est la bonne de notre moi profond. Un moi indéracinable qui portera toujours notre matrice de pensée et nos premiers réflexes de comportement. Nous gagnons un temps fou en écoutant, ce qui ne veut pas dire suivre, ce moi profond. Il est ce avec quoi nous avons toujours notre rapport avec tout ce qui nous est extérieur. La négation ou l’ignorance ou l’éradication de ce que nous sommes est le projet des groupes voulant diriger nos destinées. L’enfant, jusqu’à l’âge de « raison », bien ou mal nommé, est encore dans une spontanéité-liberté de lui-même. Le groupe qui intervient, groupe au sens de culture ou esprit d’un moment de civilisation, veut le plus souvent soulager, aider, soutenir, mais avec un apriorisme de sous-estimation de celui qu’il secourt ; au lieu d’offrir les outils pour que chacun devienne ce qu’il est. L’intention n’est pas condamnable tant elle est convaincue de l’immaturité de l’homme à pouvoir se débrouiller seul. Et qu’il convient dès lors de le formater pour qu’il soit admissible, en capacité de vivre, dans un horizon connu que le groupe tient justement déjà bien en mains. Les apports des récalcitrants au système, ceux qui ne rentrent pas dans le rang, sont fruit du hasard dont il ne reconnait que bien après l’heureuse opportunité. L’Humanité avance en rang classique de ses us et coutumes jusqu’ici connus. Elle n’arrive pas à incorporer dans son processus une possibilité de l’ouverture d’esprit qui la chamboulerait. On en accuse les puissants, le capitalisme, les forces en présence alors qu’il ne s’agit que de la couardise de tout un chacun. La société ne peut forcer personne à obéir. Elle ne peut empêcher personne de lui résister. Au contraire elle a même souvent une certaine admiration pour le rebelle dont elle pressent le message, confus dans son stade révolutionnaire, qui va peut-être ouvrir un horizon bouché. Rien ne nous interdit, et je ne m’en suis jamais empêché, d’aller vers un avant que je croyais bon pour moi, à condition que je ne demande pas parallèlement à la société de m’assurer mes arrières en cas de chute. La tentative n’a de sens et de chance d’aboutir que si elle est sans parachute de rattrapage au cas où. Abuser de sa santé sachant que la sécu… réclamer sa pleine retraite  que l’on a financé que pour un tiers.. sont autant de cas pratiques de choix de vie que l’on n’assume pas, où on prend sans avoir donné ; où l’on risque rien puisque sans responsabilité. Oser ses choix de vie c’est assumer les conséquences positives mais aussi négatives. En a-t-il toujours été ainsi ? Y-a-t-il une histoire des idées et des comportements renseignant sur la bravoure et l’héroïsme qui auraient été garantis  ou compensés en cas d’échec ? De quand, de quel moment de l’Histoire, vient la notion de prévoyance et du « pré » quelque chose en général aboutissant au paroxysme de la précaution devenant une paralysie de faire bouger les lignes de notre société. Certes la méfiance de l’un à l’autre est de notre éternelle nature humaine. Se méfier  de l’autre et des choses, et de ce qui peut advenir à notre encontre. Mais récent me semble l’institutionnalisation de cette notion de ce qui pourrait arriver mais n’est pas encore arrivé. La prévision a atteint d’ailleurs un tel paroxysme de certitude à graver dans nos têtes que l’on assiste à un constat de gavage, de saturation, d’envie d’abandonner, de ne pas entreprendre, puisque le résultat est déjà connu. Au point, encore plus ubuesque, qu’au dessus de cette chape de prévisions incontournables on introduit un final espoir que le pire n’est jamais sur. Comme si après sursaturation de rationnels chiffres et raisonnements on laissait quand même la porte ouverte à l’imprévisible, qu’on l’espérait, qu’on le conjurait de bousculer nos prévisions in fine espérées erronées. Que de temps perdu à tourner en rond, à entretenir du faux peut-être mais en tout cas du non-arrivé. Alors qu’il serait plus simple d’informer chacun et les groupes qui les rassemblent des données exactement relevées dans une situation vécue ou observable. A chacun de s’adapter, de se mettre en place, selon ce qu’il est, dans un univers mutant mais bien réel pour l’instant, où nous y vivons et avons à y prendre nos orientations. Je dois toujours être au centre de gravité de ce qui m’arrive, de ce qui me concerne. Ce centrage du monde autour de ma, petite si l’on veut,  personne n’est pas un nombrilisme utopique à la Salvador Dali à qui on doit beaucoup d’ailleurs pour déstructurer les certitudes, pour rendre molles les heures fixes des montres. Moi d’abord, parce que je suis le seul outil de moi capable de contribuer à une société que loin de récuser je veux construire. La bonne gestion de soi en est l’acte fondateur, la pierre angulaire de l’édifice. Cet Etre de nous unique existe quelque soit, quoiqu’on en dise de la coercition, de l’enfermement de la société. Ce qui est autour de nous existe sans nous, mais aussi, et à la fois, avec nous. L’Etat c’est nous. La Société c’est nous. Elle ne nous empêche en rien de penser ou d’agir. Mais elle ne peut le faire à notre place. Elle se concentre pour que l’ordre, au sens du moins mauvais chaos, règne. Il n’y a pas de fatalité de l’Etat, de la société ; et plus près de nous, pas non plus de fatalité de notre couple, de notre famille, de nos groupes d’appartenance, de nos représentations politiques, de nos inclinaisons idéologiques philosophiques ou religieuses ; de nos amitiés, de nos intimités. Partout, dans ces lieux ou situations cités, n’oublions jamais que nous sommes partie prenante ; que sans notre participation ces lieux ou situations n’existeraient pas ou plus. Il ne s’agit pas d’y exercer un chantage de notre participation mais d’y faire valoir notre apport effectif, avec nos originalités. Le monde est ce que nous en faisons personnellement. Ne nous laissons pas intimider par l’effet de notre petitesse par rapport à la masse, par l’impossibilité que David  aurait eue de terrasser Goliath. La démocratie, dans ses bienfaits, a exagéré le principe de la majorité, de la somme supérieure de ses ressortissants par rapport à la somme inférieure. Il est des civilisations où l’on discute jusqu’à épuisement des informations et arguments avant qu’un conseil de sage arbitre vers les meilleurs choix, sans besoin de compter arithmétiquement  les pour et les contre. Il en ressort une décision qui est celle de tous sans que les pour et les contre aient dû se compter et se prévaloir à jamais de leurs positions d’antan. De même que mon bras gauche fait partie de mon corps je fais partie de la société, j’y contribue, dans un apport irréversible, et sans possibilité d’un séparatisme atrophiant. Audacieux j’en conviens, et portes ouvertes à interprétations et abus, que de remettre en cause le suffrage et les majorités-minorités qui en découlent. Car immédiatement surgit la question de la compétence du sage qui choisit et donc tranche entre tous les arguments. La reconnaissance d’une sagesse au-dessus des nombres de majorité-minorité n’est-elle pas une attitude de caste, d’élu des dieux au-dessus de la masse. Non, si est reconnu qu’il faut en effet une sagesse pour trier l’ensemble des informations et arguments qui ne se valent pas intrinsèquement en tant qu’unités additionnables. Non, si l’on considère des stades dans la vie où parfois il suffit de compter et parfois il faut d’abord réfléchir à ce que l’on compte. En tout cas le débat nous est ouvert pour que nous puissions attirer l’attention de ceux que nous élisons, pour qu’ils comprennent le sens de nos souhaits de vie. La représentation peut tirer nos aspirations et non pas, comme elle le fait, nous promettre des satisfactions. La diffusion de l’information rend les problèmes du monde connu vers tous. Personne n’est dupe que ce soit facile d’organiser la vie de milliards d’êtres sur une planète devenant trop petite. Si chacun en est bien conscient chacun peut y rendre sa part de responsabilité, de degré de ce qu’il peut demander et de ce qu’il doit apporter. Le temps est mur pour parler aux gens des problèmes et des enjeux tels qu’ils sont. Les pouvoirs en place et ceux qui y aspirent ne tiennent peut-être pas à entretenir ce dialogue constructif avec leurs administrés. Question de détention de pouvoir en effet, d’influence, de richesse acquise qu’il faudrait rendre. Mais n’étant que élus non figés ils ne peuvent se soustraire à l’écoute de ces mêmes administrés. Et qui sait s’ils ne souhaitent pas, dans leurs rêves, trouver solutions à travers l’émergence d’idées d’une société réellement participative. La parole et les actes sont dans le camp de chacun de nous. La conscience de soi, son expression, sa diffusion en réseaux sociaux, sa manifestation en « bonnet rouge », ou « manif’pour tous » bien nommée si elle ne se confessionnalisme pas, sont autant de bons signaux. Lorsque les idées remuent c’est qu’il n’y a pas de fumée sans feu en train de prendre quelque part. Ce réveil, en toute petite gestation pour le moment, surprend et déstabilise ce que l’on appelle l’oligarchie que sont politiques, institutions, gens en place, presse, qui ont du mal à comprendre que l’idée vienne de l’expérience de terrain ; alors que leurs écoles leur ont appris idéologiquement le bien et le mal binaire et partisan. Ils ne comprennent pas que ce que vivent les gens est la seule réalité tangible de leurs vies ; et, ils oublient, ces oligarchiques, que leur raison d’être de gouvernants ne tient plus compte de leurs gouvernés. Il faut, sans y pousser au crime, accélérer le mouvement des idées dans d’honnêtes tuyaux de réseau propre à faire tourner les neurones de tout le monde ; gouvernants et gouvernés d’aujourd’hui, protagonistes et acteurs de demain. Osons l’expression ; mais avant construisons et mettons de l’ordre dans la conscience de ce que nous sommes et de ce que nous pouvons faire, de manière édificatrice telle une cathédrale rassembleuse  et non égoïste, dans notre société. Poussons ces idées. Osons les mettre en avant. Ne pensons pas à l’échec. Réjouissons-nous à l’avance de l’aventure qui nous apprendra de toutes façons quelque chose et nous défrichera de toutes façons une nouvelle clairière où nous avons tous notre place quelles que soient nos erreurs d’aujourd’hui. Le sujet de l’Homme, à travers l’homme que je suis puisqu’il en faut bien un, est le commencement le milieu et l’aboutissement de tout. On parle de trop de choses sauf souvent de la manière dont nous voyons le monde et ce qui le compose. Que le monde existe dans son état descriptif est une réalité qui ne nous devient percevable qu’à travers notre regard individuel d’homme ; et donc qu’avec mon regard alimentant ma perception suivie de ma réflexion, suivie elle-même de ma réaction ; le tout dans une boucle-circuit, chaîne d’union, des rapports humains. Se mettre au centre de cette roue n’est pas narcissique. Dans notre métabolisme tout part et revient à nous. D’où vient ce dédain ou ce délaissement de notre part dans justement ce partage des réalités du monde ? Petitesse inculquée par les religions ? Soumission à ceux qui se disent forts ? Personnellement je n’accuse personne et au contraire je n’accuse que moi. Quand je me sens en porte à faux avec ce monde. Quelles informations me manquent pour comprendre tel phénomène encore étrange ? Quelle approche humaine n’ai-je pas encore entamée pour comprendre le comportement d’autrui désagréable à priori ? Quel soin de moi physique ou psychologique n’ai-je pas eu pour que la maladie ou le trouble empêche ma marche ? Mon postulat est que l’autre, être ou chose, existe comme moi sans pouvoir de ma part sur lui. Mon constat est d’être biologiquement un être ayant besoin, là aussi physique et psychologique, de la compagnie de l’autre. Seul sur Terre est impossible. Il ne me reste donc plus qu’à repérer le territoire des autres et d’y adapter mon comportement vers eux le plus agréable, dans une logique toute simple de ne pas faire aux autres – êtres et choses – ce que je ne voudrais pas que l’on me fasse ; et de faire aux autres, s’ils acceptent de leur plein gré, ce qu’ils aimeraient qu’on leur fasse. Ce discours qui sent le prêchi-prêcha se heurte au cynisme ou tout simplement au mercantilisme donnant-donnant ambiant. Donner que si l’on y trouve son intérêt ? Pourquoi pas, mais, en ce cas, ouvrons les chances de percevoir, d’entrevoir cet intérêt, dans une perception respectueuse de l’autre. Personne ne travaille pour rien. Le receveur doit émettre un  merci qui gratifiera et contentera le donneur. On en revient toujours à réexaminer, à réidentifier, ce qui caractérise fonctionnellement un homme, avant que la culture ne l’idéalise en héros ou ne le lynche en pauvre pêcheur. L’Homme qui se prend en mains n’est ni blanc ni noir ; il est. Blanc ou noir l’homme est incapable de se voir. C’est l’autre qui le voit. Lui, il doit faire avec sa carcasse, avec ce qu’il est. Il n’est jamais trop tard pour reprendre, voire prendre si c’est la première fois, les manettes de sa vie. Ne plus laisser aux autres la charge de nous conduire. Dans le cas qui m’occupe, car c’est mon expérience qui est la plus proche de moi, j’ai eu très tôt cet environnement où l’on m’a dit « sois-toi » ; ce qui fut souvent un vertige devant le vide. Aucune institution au sens de statue indéboulonnable ne fut jamais mise sur mon chemin. On m’indiqua des routes. On me dit que jusqu’ici on avait fait comme çi ou comme çà dans telle ou telle situation. Etait-ce un projet d’éducation ? Je ne le crois pas car d’autres de la fratrie furent inféodés à des règles dont pour ma part je ne me rappelle plus. L’avant, ou l’après-guerre dont je suis, est peut-être raison de changement d’attitude parentale ? Mais ce ne pourrait être que mineure influence. Me semble plus pertinente la détection, assez tôt par mes parents, de traits innés de mon assemblage ; mon caractère. Voir la graine qui sort de terre afin de lui donner le soin spécifique qui génétiquement lui convient. Les psychologues de l’enfance discutent toujours à savoir si « tout se joue avant six ans » mais c’est un fait que la disponibilité d’exprimer et de recevoir dans ces années plastiques est immense. Ce terrain de formation fragile est désormais miné de principes et d’idéologies se disputant des méthodes alors qu’à mon avis devrait primer l’attendrissement du couple géniteur, mais pour ne pas faire polémique hors sujet, de toute personne capable de regarder avec tendresse la graine future fleur en train de pousser. Ce regard d’amour est indispensable à l’évolution petit homme ou petite fille. L’Amour ne se donne pas de raisons objectives d’intervenir : il est, il cajole, il console. Aucune crèche, aucune structure scolaire, forcément de groupe, ne peut dispenser cet havre d’affection. Tout au long de notre vie nous devrions pouvoir nous  relover  dans quelque part ou quelqu’un nous disant, ou nous faisant croire, « je vous aime ». C’est mon cas et je bénis la grâce de la rencontre, et l’audace de moi qui me l’a fait accepter, sans crainte d’en être pertubé. Au contraire l’amour réaffute notre sensibilité au monde, il nous donne l’envie de rendre le bienfait que nous savourons, il nous fait souhaiter que chacun trouve ou retrouve sa chacune. Le mieux étant de commencer dans ce temps de l’enfance où l’expression n’a pas encore sa contrainte sociale. Ainsi je fus effectivement bien entouré, et par conséquent bien encouragé à ne pas avoir peur de moi, et donc j’ose le dire, à m’aimer. Dans une acceptation d’état tel qu’il est, imparfait non fini selon les critères, mais prêt à être employé avec les moyens du bord. Accepter son état est un réflexe de vie, de survie. Faire avec pourrait-on dire autrement. Se voir positivement parce qu’il n’y a pas d’alternatives, pas de pièces de rechange, pas de retour à la case « refais moi maman bobo j’suis pas beau », pas de plan B ! Le mot manque entre « fier » de soi  et « honteux » de soi. Bien de soi pourrait convenir, pour définir une cohérence que l’on accepte, sur laquelle on ne reviendra pas, et vers qui on ne fera pas d’éternelles réclamations quels que soient les progrès après de investigations psychologiques et psychanalytiques. Aujourd’hui la prise en charge de soi est de plus en plus retardée : phénomène « tanguy » des adulés éternels ados restant chez les parents, accès incertain à l’autonomie par le travail qui manque. Raisons factuelles néanmoins qui ne devraient pas modifier la construction indispensable de l’homme. Car fondamentalement les âges, les étapes de l’homme ne changent pas. Nos cycles biologiques nous rappellent notre fonctionnement animal inamovible. C’est donc anachronisme que de faire reculer ou avancer artificiellement les temps de notre évolution. La prise de conscience de soi existe toujours sinon  l’individu n’est plus ; et ce qui lui est substitué n’est qu’une parcelle diluée dans une masse. Cet individu a donc le passage obligé de la reconnaissance par lui seul de ce qu’il est, de ce qu’il veut grâce à l’environnement affectif le poussant graduellement vers cette autonomie, vers cet individualisme. Personne ne conteste cet  évident parcours du berceau au permis de conduire sa vie. Mais les méthodes de l’apprentissage, du cheminement vers ce but différent. Depuis la nuit des temps en passant par Rousseau puis par Freud. Les progrès de la connaissance de nos mécanismes psychiques excusent ou préviennent de comportements que l’individu, dont moi, devait gérer autrefois tout seul. Gérer ou plutôt s’en débrouiller tout seul. En l’état nous étions. Pas de pièces de rechange comme déjà dit un peu plus haut. Nous devions assumer seul ce parcours du combattant dont les obstacles étaient faits de la vie ou de notre génétique. Y échapper était nous arrêter, nous enlever l’expérience inventive de les contourner ou de les surmonter. La vie plus facile nous enlève ces obstacles ; et c’est un bien en même temps que c’est un mal qui nous prive de l’expérience de les franchir, d’y mettre l’intelligence de nos neurones. La confrontation à ses propres difficultés permet l’identification de ces difficultés et l’affutage de nos méthodes pour les appréhender. De manière approximative on entend que le service militaire obligatoire formait le caractère, initiait à la vie en groupe, endurait l’effort et la résistance physique. C’est factuellement exact. Mais après ? Il en est ainsi de toutes les évolutions. Faut-il garder les usines d’armement pour maintenir l’emploi ? Le caractère de l’homme ne peut pas se circonstancier ainsi car il n’y aurait sinon aucune mutation de la technologie ni même de la pensée. L’homme y perdrait, et c’est impossible de l’en amputer,  cette propension naturelle à aller de l’avant. C’est pourquoi le temps du regret et le temps du passé ne servent à rien pour l’homme. Je n’y pense personnellement jamais, si ce n’est qu’en tant que culture à se souvenir, à expériences à connaître, en comportements humains en ce qu’ils ont de répétitifs et d’enseignements sur mon présent à vivre ici et aujourd’hui. Là où je suis né, ou du moins au temps plus lointain de ma mère, la fin d’études de l’enfance équivalant du baccalauréat s’appelait « humanités ». Peut-être est-ce encore le terme en Belgique ? Ce qu’elles, ces humanités, recouvraient devaient être les disciplines de la connaissance ; mais sans doute aussi des notions de ce qu’était l’humanité. D’où nous venons, où nous allons en tant que cheminement humain ? Les étapes d’une humanité passent par cette prise de conscience d’adolescence à homme. Ce moment d’être lâché ou poussé comme le parachutiste : GO ! Ou bien, se rapportant à des cultures anciennes voire quelquefois encore existantes, le passage rituelique vers cette autonomie adulte où l’adolescent est interpellé, pour qu’ayant pris conscience de ce qu’il est, il s’engage à en faire contribution à la société. Par quoi remplaçons-nous cela dans nos sociétés modernes ? Faut-il remplacer ? Peut-on s’en passer ? On ne peut parler que pour soi et se réjouir, c’est moi qui le pense et dit, que je ne sais pas, que je n’envisage pas ce que je serais sans cette prise de conscience. Il se peut que la psychologie apporte non seulement des explications mais aussi des solutions ou même d’autres moyens pour guider les individus. Cela ne me semble pas clair, pas assez clair pour le moment, inclinant à recommander le maintien de ce que l’on connait tant que l’on n’a pas de vision de ce que l’on met à la place. L’autonomie de soi doit se faire à un moment de vie permettant de l’expérimenter un long temps devant nous. Le hasard d’être le dernier de dix m’a pénalisé disent d’aucun alors que je dirais moi, le concerné, que j’ai été gratifié d’être seul sur mon chemin assez jeune : pour choisir ses études, ses moyens, ses affections, son mode de vie sans avoir à rendre  de compte ni à demander de permission. Seule règle fut la courtoisie pour ne pas choquer inutilement dès lors que l’on n’interférait pas dans ma vie. Et cela se passa bien avec en plus une bonne reconnaissance pour l’homme libre que j’ai pu être et resté. Ce ne fut pas toujours facile de marquer son territoire dans un environnement aimant l’esprit et les règles de clan. Mais la diversité des actes et de l’amour, réels et persévérants,  ont raison des chicaneries passagères. Il s’en suit tout au long d’une vie la même longue traîne d’autonomie lorsqu’on l’a solidement en soi chevillée. On ne peut rien vous reprocher lorsque vous êtes honnêtement vous-même. On peut vous trouver inapte, inadapté, associable, inconvenant…bref toutes situations que l’on fait précéder par une négation. C’est certainement vrai ponctuellement. C’est douloureusement éprouvant si vous avez un besoin vital de jouir de cette situation. Mais au-delà de ces circonstances contingentes c’est avant tout quelque chose qui n’est pas fait pour vous tel que vous vous êtes honnêtement défini et décrit. Ce n’est pas vous. Vous y seriez malheureux aujourd’hui ou demain. Comme dans les mariages forcés sans amour d’autrefois. Ne faites les choses, n’allez vers les choses qu’avec cet amour ; non, le mot n’est pas approprié. Je reprends et insiste de n’aller vers les choses que parce que vous les sentez, ressentez, en symbiose avec votre fonctionnement, avec vos sentiments. On ne peut pas plaire à tout le monde. Et c’est faire acte de construction harmonieuse du monde de ne pas faire n’importe quoi tout de suite sous prétexte de sauver momentanément sa peau. Trouver sa bonne voie, sa bonne niche garantit notre bonheur, le bonheur de celui qui nous accueille et la synergie de nos deux efforts réunis. Que 1+1 fasse 2 est la règle de création de valeur ajoutée. C’est par cette connaissance construction de soi éclairée que nous pouvons être le plus contributif à la société, qui nous le rend forcément bien par l’usage qu’elle fait de nos talents, et par la rétribution qu’elle nous en donne. Les événements du monde conditionnent notre température psychique quotidienne. Je suis éponge de tout ce qui se passe autour de moi avec une particularité qui n’appartient qu’à moi de jouir ou de souffrir, d’exprimer ou de retenir. Aussi sommes-nous, chacun différemment, selon l’inné de nos gênes, selon l’acquis de notre éducation. Auquel aujourd’hui se rajoute le diktat quasi-instantané, qui se veut aussi rapide que l’instantanéité, de l’information continue et du sondage immédiat qui s’en suit. L’événement arrive avec sa traîne mariant ce qu’il faut en penser ! Aucun interstice physique de temps n’est laissé au va et vient personnel dans nos têtes d’un parcours minimal et vital de l’événement : provoquant une perception, déclenchant une réaction pondérée par une réflexion assagie par un murissement, débouchant sur une envie d’action ; puis, enfin seulement, d’un acte par nous réellement assumé. Le schéma de l’humain est court-circuité par l’obligation de l’immédiateté. Il est vrai que lorsque l’on peut tout voir, et, croit-on, tout gérer en temps réel, la tentation est grande de ne pas en perdre un millième de secondes. Au point d’en donner délégation, c'est-à-dire pourvoir à l’échange informatique d’algorithmes totalement hors de portée du mécanisme cérébral humain. Le sort de l’économie de marché est entre les mains numériques des échanges boursiers automatisés qui n’alertent l’humain qu’en cas grave. Qui décide du point de gravité ? Aux JO de Sotchi les skieurs, hormis le premier descendant, sont étalonnés, en plus ou en moins, en cours même de compétition. Le dernier à partir peut nourrir son adrénaline du énième de secondes en moins qu’il lui faut réaliser pour battre les autres dont il connait, avant de se lancer, la performance. Battre l’autre est prioritaire avant de se battre, se dépasser, soi-même. C’est un nouvel exploit technologique que l’on met au « service » de l’humain, sans qu’il semble y avoir eu réflexion de bon sens et de bien aller pour notre humanité. Ce traitement massifié des données, informatiquement aidant,  rend l’individu unité de traitement manipulable, retournable dans le cas des sondages qui devancent et obturent la réflexion ; unité de traitement manipulatoire dans le cas de mise en connaissance du temps des skieurs, ou autre, d’un acte non encore accompli. Critiquer le progrès ou les dérives – c’est un jugement – du progrès ne sert strictement à rien. Il continue avec ou sans moi. Et sauf une levée mondiale à son encontre il continuera avec ou sans nous. Et, dussè-je être bizarre, j’ose dire l’aimer ce progrès dans le fait principiel fondamental pour moi qui est que tout ce qui est possible doit voir le jour. En tant que phénomène existentiel, poussière d’étoile que nous être et choses sommes tous, aucune potentialité ne doit être étouffée. Tout a droit à la vie dans une perspective de désir et de curiosité qui caractérise l’Etre humain, par comparaison avec d’autres éléments statiques du reste de l’Univers. La perspective de l’humain crée une relation avec le progrès. Le progrès satisfait l’insatiabilité de la recherche humaine. L’humanité trouve dans le progrès de nouveaux moyens de son vivre ensemble, être et objets animés ou inanimés. En précisant tout de suite que l’Humanité est une juxtaposition d’individus caractérisés par des différences et des velléités individuelles. Dès lors le moindre indice de progrès doit être apprécié dans la contribution positive qu’il apporte à l’individu. A ce temps de gestation d’un progrès, qui n’est que faiblement inné, les hommes doivent se mobiliser pour que l’acquis, qu’ils veulent et vont donner à ce bébé en évolution, soit un acquis utile, épanouissant, généreux. Ce qui ne correspond pas à l’humain, présent et à venir, doit être écarté, par nous ; par nous tous les présents d’aujourd’hui mais aussi par nous tous porteurs génétiques de la génération future qui vivra ave ce progrès que nous adoubons oui ou non présentement. La démarche n’est pas, n’est plus affaire, de gouvernement ou de délégations institutionnelles représentatives. Nous, sept milliards d’êtres humains, sommes en connaissance comme moi simple citoyen d’ici ou de là de ces enjeux. C’est à nous de nous comporter loyalement avec nous-mêmes d’abord puis avec les 6,999.999 autres milliards de nos co-monde habitants. En refusant à chaque instant tout ce qui nous désindividualise. Retrouvons notre ethnocentrisme. Ce n’est pas un moi d’abord ; mais un moi qui veut rester moi pour que chacun des autres reste un chacun pour lui. Ce n’est qu’à partir d’une saine conscience de soi que l’on peut ouvrir sa porte et entreprendre avec les autres, chez lesquels on n’entre que s’ils vous ouvrent leur porte. Hasardeux de prôner un soi immédiatement prépensé d’un « retour sur soi »…réactionnaire, conservateur, ringard, droitier. Les jugements dont on est affublé ne concernent que ceux qui les émettent. La conduite de soi est un dialogue entre soi et soi. Entre les informations, que l’on reçoit de son environnement, et l’attitude que l’on veut en manifester après y avoir sagement réfléchi. L’être humain, dans cette phase de réception du monde, ne doit être concerné que par lui seul. Il n’y est pas encore temps ni urgent de suivre le troupeau. Il y est au contraire ponctuellement essentiel de ressentir ses désirs, de choisir son pâturage, d’écouter, avant, le meilleur berger pour vous y emmener. La contradiction de notre époque, jamais aussi individualiste en même temps que jamais aussi massifiée mondialiste voir grégaire-moutonnière,  m’interpelle. Le mouvement des idées tant dans la philosophie que dans la matérialité place la liberté individuelle comme la valeur suprême. Sans doute fallait-il s’affranchir, se libérer, du carcan religieux de soumission à un ou des dieux dominateurs. Liberté qui depuis des siècles signe toutes les entreprises humaines, pour justement libérer l’homme de ses apriorismes psychologiques et la pénibilité physique de sa condition. Comment se fait-il qu’une si noble globalité d’un projet d’être humain, libéré, n’ait pas prévu sa condition sine quanone d’exécution favorable qui est que l’Homme, libéré, soit toujours un homme non seulement libre mais un individu. Une unité élémentaire, une particule élémentaire. Une poussière d’étoile originelle qu’aucun progrès ne pourrait massifier dans plus grosse qu’elle ne doit rester. Le projet global de liberté pour tous justifiait dans sa fin que l’on prenne les moyens coercitifs pour y parvenir à un terme humainement visible. Telle est ma compréhension explicative des événements qui ont amené ceux, qui de bonne foi  se croyant éclairés de Lumières, ceux là mêmes à prendre des décisions de masse, pour que le peuple devienne citoyen mais pas forcément individu. L’ouverture intellectuelle de la Renaissance, des philosophes des Lumières, des Révolutionnaires puis des Républiques et enfin de la Résistance sans parler de l’explosion maintenant  de l’instantané numérique, pouvait prendre le postulat de ne faire, ne permettre, ne travailler pour un progrès, que si l’unité fondamentale de l’Individu était le but. Ne rien faire si la moindre parcelle constitutive de l’individu avait un risque d’être annihilée. C’est tout simple et aussi banal que de ne pas vouloir enlever la quatrième roue d’une automobile si l’on veut qu’elle soit toujours auto, entité indépendante, et mobile, pouvant se mouvoir, liberté. Ainsi en est-il de caractéristiques de l’individu qui doit vouloir dire qu’il ne peut mécaniquement, pour qu’il fonctionne, être divisé, c'est-à-dire amputé d’une de ses fonctions. Or c’est ce qui se passe lorsque la technologie devance la pensée et agit à notre place. La rapidité des nouveautés proposées, que dis-je, imposées, empêche que leur image s’arrête sur notre réflexion. Ce n’est pas barbarie humaine voulue par furieux capitalistes. Au contraire l’économie doit presque freiner les vagues technologiques tant il faut un certain temps pour que les consommateurs aient envie, achètent, jettent puis rachètent. La fuite en avant n’est l’œuvre d’aucune campagne désignable puisque sans arrêt, tous les dix huit mois selon une loi dite de Moore, les progrès raccourcissent toujours et toujours de moitié le temps précédent d’exécution d’une tâche. Cela fait de plus en plus penser à un vaisseau spatial ou autre allant de plus en plus vite au point de larguer ses passagers et empêcher, puisqu’il n’y a plus de pause-escale, aucun nouveau de monter à bord. Faudra-t-il que le progrès s’invente des robots pour acheter ses robots ? La richesse des 1% super puissants possédant 20 % des ressources de la terre dévie de cela et fait penser à ce clivage. Faudra-t-il attendre que les riches super riches s’aperçoivent qu’ils ont besoin, fut-ce des miettes, des pauvres pour arrêter et inverser cette marche ? Davos 2014 cénacle des puissants y réfléchissait sérieusement. J’ai toujours pensé qu’au pire le matérialisme forcené aura toujours besoin de s’adapter à une demande fut-elle de pauvres sans laquelle il n’y a plus de marché et donc plus rien du tout. Entre temps l’attente est longue, le climat social se dégrade, l’instant mal vécu est bien perdu. Des termes comme génération sacrifiée n’ont pas de sens. Qui peut décider ainsi que telle catégorie va passer son tour, ne va pas passer cette fois-ci dans le manège du bonheur ? Il est des événements, naturels ou provoqué par l’humain, telle que la guerre, que l’on n’a pas exactement prévus. Mais s’agissant d’économie et ses conséquences sociales nous sommes dans le domaine du connu possible à quelques années près. On sait que ce qu’il faut pour nourrir sept milliards d’hommes n’est pas une question de production, dans une terre qui a suffisamment d’agriculture, mais une question de distribution et d’accès aux marchés de consommation. On sait, malgré que l’on dise que l’on a tout essayé, ce qu’il faut pour que tout le monde trouve sa dignité et son pouvoir d’acheter par l’exécution d’un travail ; à condition d’envisager la répartition des tâches, la préférence à acheter ce qui fait vivre les nôtres et non à penser toujours au moins cher. Mes solutions ne sont pas du tout pertinentes ni exhaustives mais elles se veulent détermination à penser tout de suite ici et maintenant qu’est-ce que l’on fait, comment éviter, que dis-je arrêter, que l’on fasse à autrui ce que je ne veux pas que l’on me fasse. Notre société est un équilibre d’éléments devant vaille que vaille tenir ensemble. Aujourd’hui notre paquet global sociétal est mal, mais tenant quand même, mal ficelé, provoquant des générations sacrifiées, des quart de population au chômage, des ruptures de valeur travail lorsque grand-père, père et fils au chômage ne vivent que par l’assistanat d’institutions, moins généreuses que soucieuses, que la révolution n’éclate pas et que ses pauvres continuent à consommer et à voter. Tout cela sent le pourrissement d’une situation. Il faut agir au sens de remettre en mouvement mécanique les pièces de la machine économique, avec pour objectif pour celle-ci que l’individu, je m’y entête, ait la dignité et la rémunération de son apport de travail physique ou intellectuel. Je n’invente rien d’autre que le premier article des Droits de l’Homme. Le reste s’organise dans une volonté de plan d’action concret. La politique, avec ce qu’elle produit de vœux pieux comme cette louable déclaration de droit au travail, se fait plaisir en proférant des effets d’annonce qui, comme des mots d’amour, ne peuvent que faire plaisir et ne jamais se refuser. Aimer vraiment ensuite est une expérience à deux. De même la réclamation morale « je t’aime » au travail, doit se vivre avec la participation intéressée de ceux qui fournissent le travail et de ceux qui vont accomplir le travail. Les uns et les autres ne sont pas toujours sur la même longueur d’ondes. Le travailleur temporise son engagement. L’employeur privilégie son profit. En termes d’équation on est loin d’une égalité des termes de l’échange susceptible de créer, par transfert, de la valeur ajoutée. Alors que nous partions d’une glorification pour l’homme de s’accomplir par le travail, la vulgarisation de l’idée aboutit à en faire ou donner le moins pour celui qui produit, face à en tirer le plus de profit pour celui qui emploie. Caricature bien sûr mais je n’ai pas inventé le terme lutte des classes. Le voici. Alors qu’il n’est pas inscrit dans l’inné de la nature individuelle de chacun que l’on veut en faire le moins possible pour en tirer le plus possible. Quiconque est son propre patron, de quelque activité économique ou culturelle ou même morale sait qu’il ne doit pas faire d’une main, travailler moins, tandis que l’autre main dirait gagner plus. Au niveau de chacun de nous, pris dans notre conscience individuelle, le dilemme nous fait honte. Et partout, dès que nous exportons notre individu dans la mase, nous acceptons ce raisonnement abêti. Se reprendre est possible si nous reprenons conscience de nous-mêmes. Jusque maintenant les états « providence », dans la lignée des déclarations prometteuses de Droits de l’Homme et autres, ont pu maintenir le couvercle de la paix sociale, de l’inconscience de nos consciences, grâce à financement de croissance. Les revenus augmentaient toujours beaucoup plus vite que le prix des choses. Une fois que la croissance eut atteint la satisfaction des besoins, elle n’a pu que se ralentir voire stagner, voire décroitre. Quand les besoins primaires sont satisfaits que voulez-vous vendre d’autres que de l’artificielle sur-offre, artificielle demande  présentée comme nouvel art quasi religieux de vivre ? Plus de surplus par la croissance a obligé au recours à l’endettement pour garder le fameux confort social. On en est là ; les trous se creusent, les prêteurs se méfient. Que faire sinon de faire avec ce que nous sommes de bras ou esprit pour produire, d’estomac ou envie pour consommer ? C’est une nouvelle équation de nous-mêmes qu’il nous faut réinventer en enlevant tous les obstacles qui empêcheraient le rétablissement d’une égalité de l’échange entre nous ; famille, cité, communauté ; région, pays, continent, monde ; en y incluant les réserves naturelles. Je fais exprès de parler simplement, en homme simpliste, tant devient exaspérant, parce que non contributif, le rapport d’experts. D’aucuns de ceux, et ils sont nombreux, que l’on voit entend ou lit, dans les journaux, gouvernements institutions, brandissant pathétiquement des idéologies affinées, de bonne foi au demeurant, dans leur immuable cursus les ayant rendu, une fois adultes, des oligarques. Une catégorie, une espèce d’élevage en batterie, avec plusieurs écoles quand même, dont ils sortent assez haut pour ne pas avoir à se mêler avec l’assez bas. Autant dire qu’ils n’ont pas de porosité avec les problèmes et que le poids intellectuel de leurs études les justifie toujours d’avoir raison. Non point qu’ils soient méchants dans leur supériorité ! Ils savent ! Ils ont appris à savoir, une fois pour toutes. Je n’ai même pas la tentation populiste de les accuser d’être caste de blocage. Ce n’est pas une armée ni une confrérie de preux chevaliers dédiés à une cause. Leur combat est une simple auto-défense d’un savoir acquis, comme si une fois rentré dans leur tète il leur serait à jamais inné. Cet acquis une fois pour toutes rend leur boîte à outil rapidement obsolète. Au mieux ils sont au top de leur capacité opérationnelle à un instant T où leurs connaissances correspondent à un certain T’ tempo de l’époque. Nous pourrions en profiter et certaines trajectoires  profitent de cette fenêtre de tir de leur carrière. Mais la synchronisation de ces compétences avec ce qu’il faut d’expérience, de rencontre et de maturité pour exercer est rare. Alors c’est loupé, et nous voila parti pour un autre bout de temps avec ces leaders à côté de la plaque de nos préoccupations. Non seulement ils ne feront pas le job, par incapacité, mais surtout ils bloqueront, par leur pouvoir et présence institutionnelle, les mouvements naturels de la société pour se trouver elle-même ses solutions, en tectoniques des plaques maladroite mais salutaire pour faire bouger et se rejoindre les terrains. J’en veux pour preuve les dysfonctionnements sociaux, éducatifs, économiques dans des situations concrètes où deux parties sont amenés à constater un problème, à exprimer leurs points de vue, à avancer des solutions, à trouver un accord de sorte que le projet commun continue et remplisse sa fonction de satisfaction des parties. Ce sont les parties concernées qui doivent étaler et résoudre leurs problèmes, dans une procédure de pédagogie individuelle. L’exposé honnête envers soi-même de ce que l’on réclame à l’autre est déjà début de solutions pour soi. Quelle est ma réelle demande ? Quels en sont les faits, les chiffres, la motivation recevable par mon interlocuteur ? Quelle attitude, quelle répétitivité vais-je rencontrer ; voire quelle opposition ? Cette formulation préalable de ma demande la pacifie, la déconnecte d’affect et d’agressivité. Il n’en reste qu’une revendication si l’on tient à toujours lui garder ce caractère pointu ; mais que l’on peut déjà appeler exposé des faits concernant notre relation. Même démarche en place dans la partie adverse  mais que, si processus purificateur de velléité il y a aussi, on peut appeler partenaire. L’aboutissement  en est un échange de conditions de vie, de travail, de rapports sociaux entre deux parties ayant le même but de production de leur projet. Est-ce utopie que de présager un étalement serein des points de vue sans protection de médiateurs, de législateurs, d’hommes sachant alors qu’ils sont par définition au-dessus des parties prenantes. C’est paresse intellectuelle que de croire cette simplification impossible ; que de ne pas essayer ; que de craindre à l’avance un résultat quel qu’il soit. Ce qui vient des concernés ne peut pas être foncièrement mauvais puisqu’au demeurant ils sont déjà deux d’accord. Mais alors, me direz-vous, il n’eut pas été besoin d’inventer les lois, les chartes, les protections, les délégués, les élus ; bref que ne s’est-on encombré de tant d’intermédiaires si les hommes bons étaient si bien capables de s’entendre face à face et seuls ? Je crois que les lois, les structures, les représentants de toutes sortes étaient étapes de notre évolution absolument indispensables au moment où elles s’inventèrent. Face au pouvoir despotique des monarques il fallait que des hommes et des femmes, éclairés par le service vers l’autre, s’érigent  légifèrent et administrent l’avènement du pouvoir par le peuple qui s’appelle démocratie. Le résultat est atteint, inégalement  parfois, mais dans un constat global  de verre plutôt bien plein. Et en tout cas dans une perspective que les améliorations, toujours possibles et souhaitables,  ne requièrent  plus du tout la même masse  de lois à produire, de représentants pour y réfléchir, d’administration pour contrôler. Non point que la démocratie roule comme sur des roulettes, mais son combat se déplace.  Alors qu’au lieu de cela, la représentation continue, ce que l’on ne peut appeler autrement que, sa fonction d’être ! Outre le coût, qui n’est qu’un aspect d’utilisation de moyens, la véritable gêne est l’écran entre citoyens, contraire de la démocratie, que cette présence suscite. Par strates superposées, qui pour anecdote sont de l’ordre de cinq niveaux pour le même sujet avant d’obtenir décision. Temps passé mais surtout démobilisation, démotivation des citoyens qui n’ont pas prise sur ce qui les concerne d’abord. Les lois et les représentants, qui se drapent dans une défense du citoyen, manifestent la priorité de leur devenir personnel. Leur altruisme peut être sincère mais l’exercice de leurs fonctions est ancrage dans le statique, dans la réglementation en tant que préalable à tout supposé d’entente naturelle et spontanée entre les citoyens. Toute évolution des comportements fait et donne immédiatement lieu à une juridiction et réglementation ad’ hoc. Comportement moral, social, matériel devient sujet à dire à l’autre, au citoyen comment il doit s’y légalement comporter. Les lois et décrets d’application s’empilent dans un effet de saturation physique, de déséquilibre en ce qu’ils se contredisent, en inexpérimentation préalable à leur exécution oui ou non possible sur le terrain. Trop de lois tue la loi mais surtout crée la tentation de repli sur soi, du populisme, du tous pourris puisque la loi asphyxie au lieu d’aérer la vitalité qui est quand même en chacun de nous. L’écart, entre ce qu’il n’est même plus juste d’appeler gouvernés et gouvernants tant chacun ne respecte l’autre, n’a jamais été aussi grand ; alors que l’éducation donne  à de plus en plus une conscience d’être et de pouvoir apprécier et choisir. C’est sans doute cela que les oligarques dirigeants n’aiment pas, tant ils craindraient que trop de connaissances ne fassent éclater leur inefficacité et leur inutilité. Des cas concrets de la continuité de l’inutile sont connus mais perdurent, protégés par statut et convention. D’un président en échec sur tous les plans mais se prévalant d’un mandat de cinq ans, comme un bail  locatif dont il n’assumerait pas les devoirs, à un pdg looser garanti par son golden parachute (prime de départ négociée à l’embauche quelle que soit la mauvaise gestion précipitant sa sortie). Les puissants imposent leur institutionnelle mainmise sur des sujets ou des activités que nous pourrions essayer de résoudre par nous-mêmes, gens concernés. Non pas par abus de langage révolutionnaire rendre le pouvoir au peuple. Mais laisser la plupart des problèmes, sauf ceux relevant de l’ordre public, au bon sens des premiers concernés à trouver ensemble une bonne, rapide et peu couteuse solution. Ce qui fait ce sens, bon et même mauvais, ne serait plus l’apanage seulement de cette élite réfléchissante. Les solutions de bon sens sont ringardisées simplistes parce que justement les gens simples ne mettent sur la table de négociation que des éléments simples au sens de dégagés de toutes contingences hors sujet. Autour de nous de multiples faits sociaux, moraux, économiques sont immédiatement qualifiés d’extrême dés lors que leur présentation est réduite à des circonstances de vie de tous les jours, par des gens ordinaires animés d’une demande bien aller sans faux semblants. Essayer d’exposer un vrai problème, tel qu’il se pose pour le commun des mortels mais sans le circonstancier de considérations psychologiques politiques ou historiques, vous expose à être qualifié de réductionniste. Il faut être compliqué pour être entendu au minimum ; quand être compris se révélera de l’ordre de l’impossible. Il est des instances, notamment la justice pour considérer les tenants et les aboutissants d’un acte. Son extradition et son immunité donne garantie au prévenu qu’il est jugé comme une personne humaine dans sa globalité. La parenthèse du temps judiciaire ne peut régir le fonctionnement ouvert et courant de notre vie quotidienne. Nous devons pouvoir agir par nos vraies intentions et exécutions, et non  sur un supposé de nos dispositions psychologiques ou morales. En exemple de cette pression ressentie à ne parler que concrètement des choses j’éprouve angoisse de parler d’immigration pour ce qu’elle est dans les faits de sa cohabitation avec les autochtones. Alors que je suis seul avec mes lignes une inhibition me cloue et m’arrête de franchir la ligne éditoriale de la bien pensance du temps. J’ai l’expérience personnelle d’avoir appartenu à un cercle de réflexion politique se voulant démocrate et dialoguant avec des personnages de tout bord bienvenus…sauf s’ils étaient extrêmes alors que je subodorai qu’ils deviendraient majoritaires et donc intéressants à écouter sur le pourquoi des arguments qui les faisaient monter. J’avais raison mais je ne m’en réjouis pas, si ce n’est que de la bonne prémonition que j’en fis ; et raison de l’envie aujourd’hui d’écrire ce que l’on voit, qui est plus important pour les autres puisque c’est partageable que de dire ce que l’on pense. De part et d’autre, et sans qu’il soit question de quantités majoritaires ou minoritaires, les extrêmes révèlent de vrais vécus qu’il faut écouter et vérifier. Si ce qui est avancé est vrai c’est malhonnêteté intellectuelle, et erreur de gestion, que ne de pas en tenir compte. Ce qui existe ne disparait pas parce que l’on décide de ne pas le voir. L’immigration, dont j’avais mis le bout du doigt dans le sujet, est de ces tabous indécrottables dans la patrie des Droits de l’Homme où le principe de tolérance prévaut et parle de la réalité des différences obligées d’être acceptées au quotidien. Peut-on oser la question de qui est chez qui du visiteur ou du visité ? Le baume de moralité qu’il y a à devoir tolérer le visiteur est artifice de convenance pour une courte durée, pour une circonstance particulière. La vraie moralité est d’examiner les règles d’un possible vivre ensemble dans des situations d’assimilation, de partage des droits et des devoirs, de perspective de don total dans la nouvelle citoyenneté. Au contraire d’une immigration accueil de la misère du monde à laquelle assistance nous serait obligée, sans décision et réflexion individuelle de mon rapport à ce qui est étranger. On ne peut forcer au partage. Chaque ouverture vers l’autre doit être un acte décidé et consentant. La loi qui impose d’aimer l’autre ne peut fonctionner. Les dispositions de comportement qui amènent l’autre à se rendre sympathique peut fonctionner et inciter à l’accueil. Serait-il possible d’être entendu non aux extrêmes mais au bon centre du sens sur des sujets qui touchent la vie quotidienne et donc le genre de vie de chacun d’entre nous. Chaque sujet, et ils le sont tous, où la vie des gens est concernée devrait être portée de manière intelligente au niveau de chacun, et si possible avant qu’il ne provoque des conséquences entachant son image initiale. Ce n’est pas aux lois de nous imposer des évolutions de société. C’est une vie ensemble observée en juste à temps, juste avant les problèmes, qui peut faire émerger une situation. Tous les jours des nouveautés de vie apparaissent dont nous devons dire immédiatement : qu’en faisons-nous, quelles conséquences, quelle importance cela peut-il prendre ? Est-ce utile, est-ce gadget ? Est-ce humain ? Est-ce abject ? Cela m’abaisse-t-il, m’élève-t-il ? A un stade primaire ou précoce de leur advertance les phénomènes peuvent-ils être circonscrits, admis pour ce qu’ils sont de petites choses, avant qu’ils ne deviennent envahisseurs contre notre gré. Cette vigilance est à portée de l’homme lorsque celui-ci reprend son individuelle conscience à se demander ce qui est bon ou ne l’est pas pour lui. L’émergence de ces idées et le filtre individuel qu’il faut en faire deviennent paradoxalement possible par les fenêtres individuelles que nous pouvons, presque tous, avoir sur le monde. En matière de communication ouverte, pas chère et logistiquement facile d’accès, même l’Afrique se met au diapason du reste de l’Humanité sans qu’il soit besoin de rattraper son retard. Le monde portable désormais à 15 €uros vous donne par dix chiffres composés accès au grand réseau des échanges permettant d’écouter et de donner son avis, sur tout, sur rien, sur l’état du monde, sur ce que nous voulons, ne voulons pas, souhaiterions. Faisant fi des diagnostics qui jusqu’ici les pensaient à notre place. L’individu est à la fois la solution et le problème de notre vie en société. L’individualisme comme tout mot en « isme » porte une mauvaise conscience de ne penser qu’à soi, de se mettre seul en avant, de profiter des autres sans leur accorder de retour. Pire qu’une lutte pour la vie, qui avait la clarté de l’attaque et de la défense, la bataille de soi et pour soi confine et recroqueville l’être dans une carcasse d’asociabilité puisque justement la fenêtre vers l’autre est fermée. Même la velléité de combattre l’autre, de prendre sa place ou sa proie, a disparue au profit d’un intérêt replié sur le seul moi unique et profond. C’est la fonction qui crée l’organe. C’est la sécurité et l’assistanat, retournés en son contraire, qui permet de pouvoir se dispenser de l’assistance envers les autres. Indépendance physique et morale, voire spirituelle. La liberté portée en étendard de toutes les luttes en masse, en lutte de classe contre classe, aboutit à un état unitaire de l’Etre, l’Individu ! L’éducation, les connaissances, le dotent d’outils de perception, de réflexion et de réaction extrêmement précis pour se mouvoir dans les faits incessants de la société. Parmi ces outils ceux de l’autonomie, du raisonnement, de l’observation, du refus d’idéologies salvatrices font monter une sursatisfaction de l’Etre qui se croit dès lors en indépendance de tout. Y est ignoré la caractéristique de tout être, fut-il unitaire, de venir d’un tout, de participer à un tout, de retourner un jour à un tout. L’être unitaire fait partie d’un univers social vis-à-vis duquel sa participation est biologiquement, avant de parler de morale, obligatoire. Pourtant personne d’institutionnellement responsable n’ose rappeler  cette évidence d’interdépendance des membres du genre humain en particulier, et de toutes les autres poussières d’étoiles dont nous venons tous en général. L’institutionnel fonctionne en promettant des droits mais ne veut jamais en souligner les devoirs. La promesse de droits toujours plus à obtenir permet à l’institution de tenir, de se faire réélire. Les devoirs ne viendront qu’en cours de route ou de mandats, comme des troubles fêtes dont on fera lois ou décrets emplâtre sur une jambe de bois puisque le corps principal du malade ne veut pas entendre de devoir changer, être soigné. Des livres et des idées stigmatisent mais en vain cette inclinaison vers le TOUJOURS PLUS, toujours plus d’avantages acquis sur déjà énormément d’acquis. TOUJOURS PLUS de moi d’abord, d’individu pour lui seul, d’individualisme, voire ce qui s’appelle en moral égoïsme, égotisme dit-on maintenant. La poussée continue, par la pression des politiques, gouvernants, médiums communicateurs, idéistes, gourous de la communication, distributeur de la consommation pour la raison arithmétique bien simple que l’individu en son état unitaire autonome consomme plus de produits, d’idées, de concepts de toutes sortes que le membre de la tribu ou communauté. Deux individus séparés ont besoin de deux appartements, voitures, téléphones, bulletins de vote ; alors qu’autrefois, et à tort, la femme votait comme son mari. Le chemin de la liberté vers l’Individu est pavé de diverses intentions. Que cette description soit une réalité ne doit pas effrayer. Nous n’avons prise que sur la réalité mais celle-ci peut rester, et doit rester, au stade du constat. C’est à nous, individuellement, de vivre ce nouveau saucissonnage de nos vies en tranches individuelles pour qu’à notre façon unique nous les rassemblions dans un univers social de partage avec l’autre. La nouvelle réalité sociale c’est, par exemple, les réseaux sociaux meilleurs et pires des choses comme la langue d’Esope, langue de partage généreuse ou langue de vipère destructrice. Le monde évolue sans que le fondamental de l’autre, de l’homme, ne change d’un iota. La vitesse des transmissions n’est que le médium, le véhicule qui n’est pas responsable de ce qu’il transporte, pas responsable du sens des marchandises physiques ou intellectuelles qui lui sont confiées par cet homme éternel qui n’a pas changé. L’attribution à chacune, chacun des sept milliards d’humains d’un terminal émetteur-récepteur d’informations est une remise à plat révolutionnaire du paradigme de l’Individu. Chacun a son œil et son oreille en même temps que sa bouche et son doigt pour recevoir et exprimer ce que lui seul désire. Cette extension est presque une prothèse définitive satellisant notre moi, jusqu’ici isolé ou perdu dans une marre, vers un univers du possible d’expression et de réception sur tout. L’usage abusif, comme celui de la langue d’Esope, est du parcours possible de l’homme qui a contourné bien d’autres aléas néfastes de son évolution depuis des millénaires. L’autre dérive, de pouvoir tout dire et sur tout, trouve sa limite  dans l’accueil sage que pour finir survient à toute nouvelle. N’est abusé que celui qui recherche l’abus, alors que justement l’individualisation de la méthode de dialogue fait disparaitre toute manipulation de masse. Ainsi devient-il possible de rendre, à l’homme être humain qu’est chacun de nous, le pouvoir de se dire oui ou non à ce qu’il veut ou ce qu’il ne veut pas. Le pouvoir rendu à l’individu  est, je dois dire peut-être alors que j’en suis sur, une évolution majeure de notre humanité. La réalité technologique qui nous y met face à face, et l’impasse de l’individualisme qui ne nous renvoie plus que notre égoïsme, sont autant de raison de saisir la balle au bond. Avec cette balle nous pouvons rejouer ensemble, échanger une balle que nous contrôlons, partager nos aspirations, redéfinir un périmètre de jeu social et de règles minimales afférents au respect des joueurs. L’individualisme forcené de ce culte du moi d’abord est en bout de course, en explosion sociale d’un impossible vivre ensemble. L’individualiste épanoui ne peut plus exister ; son opulence lui colle à la peau, sa démarche l’enferme dans un ghetto, le courant économique, à trop asphyxier les pauvres, finit par menacer la pérennité de la mine d’or qui ne sera plus éternelle. Et pire et plus que tout cela, la question existentielle que l’individualiste le plus vil, mais quand même être pensant, peut se poser : « et à quoi sert tout cela ? ». Me semble arrivé, par conjonction de ces phénomènes, le point de rupture, de bascule vers un autre comportement de l’homme dans sa base originelle d’individu. Ce que nous raisonnons en notre for intérieur est quelque chose d’unique et sincère, dont la réalité, en tant que phénomène de réalité en nous, ne peut être contesté. Ce que nous voyons-ressentons est la réalité de ce qui forme notre individu. Le projet, qui eut dû toujours présider, et qui maintenant peut-être se dessine, est de placer l’individu dans un centre au milieu des milliards d’autres individus tout aussi centraux que lui. Les images et animations numériques, autre progrès, nous permettent de visualiser cette galaxie de petits moi(s) évoluant en toutes dimensions et étendant leurs petits bras, comme une déesse Shiva qu’a fait de moi une amie. Le délire doit s’arrêter car il n’est pas encore possible de transmettre la plénitude d’une imagination qui n’est encore qu’en moi. Mais qui sait si des transmetteurs, de neurones à neurones, ne pourront pas un jour faire partager nos univers fantasques. Basiquement, en attendant la suite et justement pour donner pistes de sens à cette suite : l’habilitation de notre moi individu pour défricher de telles perspectives s’il y a volonté de nos contemporains à créer ce nouveau territoire de leur moi. Il ne sert à rien de donner des moyens d’autonomie si l’on n’a pas le désir humaniste, par une vraie prise de conscience, de vouloir s’en servir. Il ne sert à rien de donner une voiture à quelqu’un qui n’a pas envie de se déplacer ; et ne sert à rien de faire boire un âne qui n’a pas soif ; est vain de donner sans fin du poisson à quiconque ne veut pas apprendre à pêcher. Etc… La liberté de l’homme de faire usage de sa liberté est un instinct consubstantiel de l’être humain que l’on peut réveiller mais que l’on ne peut créer puisqu’il existe déjà même s’il est stratifié. Aucune instance, aucune loi, aucune autorité ne peut dire à l’individu « réveille-toi » d’autant que les phases de ces profonds sommeils sont circonstanciés à ces mêmes individus. Il peut être dangereux, même avec la meilleure intention, de secouer et de rendre conscient de ses réalités le dormeur qui ne le veut pas. Ne peut être entrepris qu’un climat général de bienveillance et d’encouragement pour proposer aux individus cette possibilité de leur île, de leur individualité, de leur démassification, de leur individuréalité exactement contraire à une téléréalité.. L’insistance sur l’individu n’est pas marotte de parler de soi même si c’est par l’expérience personnelle que j’y suis si enthousiaste et affirmatif. Tous mes sauvetages en mers ou situations troublées ont été des sursauts de moi-même trouvant ma bouée, mes rencontres aujourd’hui, alors que le pronostic me demandait le ralliement convenable, l’assagissement au nom du groupe, l’effacement du petit face au grand ou du minoritaire isolé devant les majoritaires auto-déclarant par le nombre de leur supériorité. Le combat personnel ne comporte pas d’esthétique ou de morale pour moi. Il n’est qu’une nécessité de survie lorsque l’on sait ce que l’on est et que l’on n’a pas d’autres moyens que la réaction à prétendre et à montrer justement ce que l’on est. Le retour à l’individu, à la revendication de son individu spirituel et non plus seulement matériel, se heurte à l’obstacle du regard sur soi défendu. La culture façonnée par les religions nous apprend la méfiance de nous, l’insolence à se regarder ou à parler de soi, l’imperfection définitive du péché originel qu’il ne faudrait pas montrer. Le voyeurisme de soi d’aujourd’hui n’est encore que masque pour s’amuser d’un soi que l’on exhibe encore assez peu. L’individu n’a pas vocation à se statufier pour se poster à notre auto-admiration ; mais aucun progrès de notre moi ne peut être accompli si nous ne nous cherchons pas, si nous ne nous aimons pas, ni si nous n’entreprenons pas de nous connaitre et de nous construire. Connais-toi toi-même – construis-toi toi-même – et tu connaitras, construiras, l’univers dit le fronton du temple de Delphes. Notre individu ne peut passer en nous que si nous lui en donnons la semence, l’arrosage, l’ensoleillement, le tutorat, la bonne moisson. Un individu seul livré à sa seule jachère ne sert à rien. Il n’est pas anodin que rien culturellement et institutionnellement parlant n’a été fait pour encourager l’individu. Les grandes révolutions qui ont façonné le monde ont été des rassemblements d’individus, ou plutôt dans un langage missionnaire de commisération, de pauvres êtres esseulés auxquels un pasteur proposait un troupeau rassurant. Tous les leaders charismatiques sont cela et je ne les citerai pas pour que l’attention surprise s’arrête sur leur nom spécifique. Au contraire aucune révolution n’a proposé ni accompli la libération de son soi. La solution ne passe toujours que par remède de masse alors que ce n’est que de notre propre explosion que peut, de notre moteur, jaillir l’étincelle. La simplicité de la découverte, dans l’énoncé que simple quidam j’en prononce, déconcerte les blasés de la convenance. Pourquoi s’attarder ou essayer un truc aussi simple qui aurait déjà sauvé le monde s’il devait marcher ? Sans doute a-t-on déjà tout essayé au fil des générations survenues. Encore que l’on puisse douter de l’honnêteté à relater toutes les expériences notamment celles contrevenantes aux idées et ordres établis, aux intérêts en place, aux puissants en fonction susceptibles de déstabilisation de leur pouvoir et prébendes. Qu’importe cet aspect rétrospectif de ce qui aurait du si s’impose à moi l’évidence de la bonne solution dans l’espace-temps spécifique de l’humanité où je suis. Là justement où l’individu physique, livré à son seul objectif de lui-même, se retrouve dans l’instant individuel lui aussi, puisque n’étant plus passé et pas encore futur. Il y aurait, si l’on imagine une représentation physique du phénomène, la dent de la roue qui est cet individu de moi-même s’enclenchant exactement dans la dent instant de la roue du temps. La rencontre est miraculeusement unique, spécifique, individuelle. Il est dit que nous ne connaissons ni le jour ni l‘heure mais nous voyons la nacelle de la roue du temps au moment pile où elle passe devant nous. Jusqu’ici cette roue du temps était une expectative sans autre accès que la foi qu’elle arriverait bien un jour. La prise de conscience individuelle, et les outils nous permettant d’aller chercher l’information pour comprendre notre environnement, changent la donne. Ici commence notre possibilité d’insurrection personnelle et d’escalade des barricades de l’ignorance. Nous pouvons chercher ce que nous ne savons pas, vérifier ce qui nous est suspect, faire partager nos recherches et enthousiasmes de sorte que comme autant d’hameçons, lancés sur la toile du monde connecté, nous voyons la roue du temps qui s’y arrêterait, des paires d’intérêt se former avec nous. La rencontre, le meetic pot d’idées, qu’il n’est pas besoin de faire uniquement sur internet mais à pratiquer en toutes occasions d’extérioriser l’individu de nous dont nous n’avons plus peur. La grandeur des éléments naturels qui nous entourent n’est pas là pour nous agresser mais pour nous épanouir. L’appel de la beauté d’une montagne, d’un pic enneigé ou du cri d’un oiseau est un encouragement pour que nous exprimions notre propre cri individuel. Point d’égalité entre éléments naturels aussi disparates, aussi dysfonctionnels quant à leur usage des uns par rapport aux autres. Mais une juxtaposition de particules assemblées se regardant en équilibre l’une de l’autre, sans préséance et sans volonté de nuisance. Toutes les parties de la nature, autre que l’homme, ont cette caractéristique individualité qu’aucune conscience ne leur permet de s’en  interroger. La pierre ne pense pas. Elle est. Et elle est individuelle. Leur ressembler n’est pas le but mais méditer le bien-fondé qu’elles ont de leur présence est intéressant. L’individu, au bout du compte de l’introspection humaine que nous en faisons, est cette partie terminale du genre humain que l’on ne peut remettre en question. C’est le bien individuel de chacun en même temps que le bien commun, en tant que nécessité sociale de tous. Dieu, que je n’aime pas citer mais la citation parle de lui en lui faisant dire, « Dieu a besoin des hommes ». Cela n’a pas de raison d’être faux du moins en tant que bonne parole fédérative et communautaire autour de Dieu ou de qui l’on veut. S’il a besoin des hommes ce n’est pas une masse d’hommes agglutinés dans une matière commune. Le besoin d’hommes est celui d’une quête de qualités variées et différentes pouvant constituer assemblage intelligent de connaissances et de matériaux, autour d’un projet d’univers en cours, au fil de génération d’hommes superposant les susdites différences et individualités. Pardon d’en venir à cette vision cosmique à partir de ce simple petit individu qui me préoccupe et passionne. Mais le monde n’a pas de sens et de possibilité de tourner rond que s’il n’est oublié aucune de ses particules ; le moindre individu compte, non pas en tant que division d’un tout, mais en tant que trésor individuel à nul autre pareil dont le grand tout ne peut se priver. L’individu, centre du monde, n’a pas de sens de même que tel pays, le nôtre qui semble prôner sur la mappemonde représentée à sa façon, alors que dans l’hémisphère sud opposé le pays excentré devient nombril et notre territoire un confetti perdu. Notre meilleure représentation du monde, et maintenant des individus, permet la présence satellitaire de chacun dans l’espace clair et instantanément accessible de tout individu. Individu, chaque fois que j’en prononce les quatre syllabes in-di-vi-du m’évoque immanquablement une notion unitaire réduite au chiffre 1. Réduite n’est pas le bon mot trop « réducteur » et donc négatif. Je devrais dire une valeur intrinsèque de 1 qui est à la fois très grand et très petit. Le 1 témoigne que quelque chose existe par opposition à son contraire le 0, zéro. 1 c’est l’Etre. Le 0 est le néant. 1, un, in-di-vi-du, peut donc être cette division, cette poussière d’étoiles minuscule et grandiose dans ce qu’elle a de fondement incompressible, indestructible, irréductible. Le chiffre me frappe car notre humanité a déjà vu passer 50 milliards d’êtres humains donc 50 milliards d’individus. Ce 1/50.000.000.000, un cinquante milliardième que je suis est ahurissant. Mon infinie particule élémentaire, puisque unité infinitésimale de ces 50 milliards, me fait sourire rien que d’en parler. Suis-je là, ou ne serais pas là, qu’est-ce que cela changerait ? De même qu’en est-il des particules élémentaires manquant à l’appel de la vie, alors que génétiquement procréés, de par les arrêts en avortement, maladies précoces. L’assemblée de tous est-elle nécessaire ou quelques uns suffisent-ils ? Lesquels ? Au nom de quoi sélectionner celui-ci ou garder celui-là. Questions métaphysiques mais ne me survenant que parce que j’ai quelque part été sauvé, sélectionné pour rester, pour jouer dans la partie gagnante. Celui qui peut continuer à participer, et encore plus à réfléchir et penser ce qu’aurait pu être une autre partie où je n’aurais pas été gardé. La réflexion est un sport de riches ; et autrement dit ventre affamé n’a pas d’oreilles selon un proverbe chinois ou populaire. Le résultat en est ma faculté aujourd’hui, pensée et exprimée ici, que la division, le 1 dividu que je suis, est partie constitutive de l’ensemble d’aujourd’hui, engendré par hier, et porteur de demain. Je ne suis pas fondu dans une masse anonyme « cinquantemilliard ». Je suis une unité de valeur, une valeur ajoutée qui, si elle se retranchait, ne laisserait pas pareil le « cinquantemilliard ». Cette arithmétique de nous même est moralement mal vue par une culture qui nous a appris la soumission aux grands nombres ou aux savants calculs d’architectes gourous divinités et leurs représentants. Nous ne serions pas faits, dans notre petitesse et basse condition  humaine, pour compter nous même mais pour être comptés, à l’instar d’un berger qui vérifie que toutes ses bêtes ont passé le portail du pâturage. On nous met dans un état de chiffre. Combien de divisions disait Staline en parlant du pape et de son Vatican qui s’opposait à lui. Combien çà coute ? Combien de médailles olympiques alors que chacune n’est l’effort que d’un seul. Combien, combien ? Que de fois sommes-nous ainsi quantifiés comme si seulement n’étaient intéressants que la pression de nos pneus, les battements de notre cœur, notre taille et notre poids, la dimension de notre cerveau sitôt qu’on le pourra, le QI quotient intellectuel. On songe même, dans un but louable, à remplacer le PIB Produit Intérieur Brut par un PBB Produit de Bonheur Brut sans doute moyenne d’indices individuels mesurés de notre bien-être dans des situations matérielles. La révélation statistique par la moyenne ainsi obtenue sera significative de l’état d’une masse. Mais l’origine de chaque chiffre ne concerne que l’individu observé. De lui seul il s’agit, dans sa spécificité qui ne peut être qu’une intériorité climatique d’ensemble dont il est utopique de distinguer séparément les composants. Le psychosomatique nous montre souvent comment le trouble de l’esprit devient un mal aller du corps. La bonne médecine se préoccupe de notre état général supervisé par le médecin généraliste bien nommé. Aussi la sophistication de nos points de contrôle doit servir d’abord à un bilan global avant de nous alerter et nous faire réagir en interventions localisées et pointues. Pourtant il y a demande individuelle et globale de disposer d’un tableau de bord auto-contrôlant de nous même. Difficile d’en pister avec exactitude les motivations. La fonction technologique semble créer l’organe qui ne s’exprimait pas auparavant. Il n’y a rien à en redire lorsque la fonction répare l’organe ; mais lorsqu’elle se met à le précéder c’est le genre humain que l’on prétend modifier dans le concret de ses comportements. Le scanner IRM sur un cerveau d’enfant de trois ans montre maintenant comment le dit cerveau est fait et fonctionne. Puis par superposition statistique il prédit les actes de la vie adulte susceptible, selon la probabilité, d’arriver. Prévention de la société contre les siens débouchant naturellement, quand la chirurgie le permettra, et on peut lui faire confiance, sur la modification ou l’éradication de la pièce du moteur cerveau défaillante voire de son remplacement. Cette réalité est défendue par de justes désirs d’améliorer notre vivre ensemble global qui nécessite l’optimisation de nos points de friction potentiels. Prévenir les violences et les accrochages entre nous 7 milliards se serrant sur le même territoire Terre alors que nous n’étions que 2 milliards il y a à peine 100 ans. Nous faire vivre ensemble harmonieusement, sans que nous nous tabassions, ne peut donc être critiqué par seul souci de garder intègre nos corps et nos facultés néandertaliennes. Heureusement nous évoluons car que faire pour maitriser la bestialité de ceux qui, pas loin de nous encore aujourd’hui, se massacrent à la machette. Et si l’IRM de leur cerveau - quel marché potentiel pour notre industrie technologique -, si l’analyse possible de leurs instincts sauvages avaient pu prévoir ? N’aurait-ce pas été humaniste, si l’on veut, d’arrêter le bras meurtrier avant qu’il ne s’exécute. Et pourquoi pas alors, parce qu’il ne faudrait pas traiter l’Afrique de manière inégalitaire par rapport à l’Europe ou à l’Amérique, la généralisation d’un TOTAL RECALL, le film prémonitoire d’une puce dans chacun de nous prévenant un grand central de contrôle des signes d’intention de meurtre avant que nous les commettions. Il faut parler de tout cela, avec sérieux et légèreté à la fois, mais en tout cas sans rejet parce que ce serait de la fiction. Ce qui est possible à l’Homme lui arrive. Mais, au lieu qu’il ne devienne assommé par un effet de plus fort que lui qu’il ne peut que subir, rien ne l’empêche de se renseigner et d’orienter ces possibilités de meilleur être vers un bien-être bien et rien que pour lui. Toutes les évolutions sont des outils primaires au  moment de leur apparition, à l’instar des scie, marteau, tenaille, clou de l’ébéniste qui ne construira que son meuble à lui, répondant à sa seule convenance et utilisable selon son unique manière de vivre. Et puisque le progrès et ses déclinaisons visent au premier chef l’individu pour lui vendre quelque chose, il existe toujours, ne l’oublions jamais, un premier carrefour où l’offre c’est à dire la nouveauté, rencontre la demande, c'est-à-dire nous. Il n’y a pas de hold-up, de prise d’otages de notre individu. Nous sommes recherchés comme proie certes mais on ne nous tire pas dans le dos. Au contraire on nous interpelle dans nos sens, on nous séduit, on nous convainc, on nous finance à crédit. Et ce n’est que bien après que l’on crée, ou qu’on laisse se créer en nous car ce n’est pas une drogue, une addiction et une dépendance amenant à l’acte de répétition ou de continuité. Le progrès, comme les outils qui en découlent, sont des choix de société assumés. Au carrefour de l’offreur et du demandeur ce dernier que nous sommes peut dire oui ou non, ou « non, pas comme cela » de sorte que dans une totale liberté, parce qu’il faut bien prendre une voix, il existe plusieurs orientations. A condition qu’à ce moment stratégique du carrefour, où ces deux se confrontent, le décideur soit doté de connaissances et d’information pour choisir. Cette éducation préalable de son soi est ce qui constitue la valeur de l’ 1 dividu, l’individu dont la pensée, sédimentée par ce qu’il est et ce qu’il veut ou ne veut pas, va prendre laisser ou modifier les propositions du progrès. La réclamation au choix de vivre SA vie est fondamentale dans la continuation de l’humanité. L’avenir n’est pas dans une masse compacte d’êtres humains désindividualisés. Il est dans un assemblage dynamique et interactivement connecté des mouvances de chacun. La construction, voire la reconstruction, pour ceux ne prenant conscience que maintenant, n’est pas une gageure impossible. A tout moment notre métabolisme peut commencer, recommencer voire oublier l’expérience passée. Se demander ce dont on a envie, en examiner les moyens présents et à terme disponibles pour le construire, en mesurer la viabilité à côté de l’envie de ceux que l’on y côtoie. Désir, moyens, avec qui, résument pour moi les questions en boucle dynamique que l’on doit soumettre à notre principe d’existence sur Terre. Chaque jour qui se lève est une leçon de courage n’est pas de la moralité mais de l’indication d’un chemin à remonter sans relâche, avec ce désir chevillé à l’esprit, seul capable de donner corps à nos moyens à trouver et notre sociabilité aux autres à établir. Le reste, en ce qu’il comprend de plaisirs, de joies, de richesse mais aussi d’infortune ou de souffrances, fait partie du paysage obligatoire à ce parcours de recherche. Seuls ceux qui savent définitivement, ce qui est impossible, croient pouvoir choisir la richesse ou la pauvreté ; la souffrance ou la luxure. Ces ghettos sont des mirages pour humains ayant renoncé ou ne connaissant pas encore les attributs de leur pouvoir de dire oui ou non ou autrement ; le pouvoir d’être des individus. Au ghetto global, l’individu oppose la nacelle individuelle qui se meut dans tous les recoins, y compris vers les extrêmes offrant une perspective sur l’ensemble et sur l’au-delà qu’aucune autre place centrale ne permet. Oser son voyage individuel est une occasion de voir le monde avec ses propres yeux, ses propres sens, ses propres envies de s’arrêter ici ou là, de grignoter ceci ou cela, de combler ses appétits physique et intellectuel dans une auto médication-régime qui ne peut être qu’extraordinairement adaptée à notre métabolisme. L’analogie au voyage organisé saute aux yeux, par opposition, sans que ce soit forcément une stratégie ennemie, au développement et à la découverte personnelle. Des impératifs logistiques de sécurité ou d’économie peuvent faciliter des processus que nous ne ferions jamais seuls. Mais rien n’empêche de rester soi, de cultiver son soi, dans une entreprise collective où rien n’oblige à faire masse pensante. Une démarche de tous peut être l’occasion de l’émulation respectueuse de chacun, dans ses réactions à un événement ou à un phénomène vécu visuellement en commun, mais qui sera psychologiquement ressenti différemment à la façon de chacun. Chacun pourra être son « je suis Charlie » à sa façon. Dans un autre domaine collectif, l’équipe de onze au football a bien sur un seul  « but » dans tous les sens du terme ; alors que pour parvenir à ce but c’est bien les caractéristiques physiques intellectuelles et tactiles de chacun, de chaque individu, qui composeront et construiront, en espace-temps unique, le passage d’un simple ballon à travers les caractéristiques exactement semblables de la partie adverse. Démonstration y est faite que c’est le particularisme de chacun qui rend le chemin possible. Un joueur tout seul d’un côté sur ce grand terrain, face à un joueur tout seul de l’autre côté, n’aurait aucune chance physique de remplir cette mission de passe-passe ; sans compter la lassitude que seraient ces épuisements solitaires. L’humanité montre donc de nombreux exemples, spectacles ici comme est aussi la comédie ou le chant choral, où c’est bien l’addition intelligente des individus, dans leurs caractéristiques individuelles, qui devient capable de produire une œuvre. L’orchestre musical est le summum de mise ensemble de ce qui au départ s’appelle « partition » sur le plan théorique du papier, et qui devient emmené ensemble par la baguette du maître chef d’orchestre harmonie pour l’oreille. La valeur individuelle de nos qualités personnelles fait l’objet d’une attention nouvelle de la société. Qu’elle ne soit pas la même pour chacun de nous serait juste appréciation de nos différences. Mais la méthode et le but ont carrément une orientation de valorisation dans sa simplification budgétaire. Combien valons-nous devient question qu’employeurs, institutions, groupement osent poser sans vergogne. Le « combien » de ce que nous serions prévaut à ce que nous sommes. La culture américaine, mais dans un contexte de conquête de l’Ouest qui le temporise, s’est habitué à libeller les réussites individuelles par un qualificatif du million de dollars que cette réussite représente. C’est habituel et accepté dans toutes les couches de la société qui, de bas en haut, aspirent à la richesse. La fuite de la pauvreté a toujours été leur motivation de marcher en avant vers son contraire, l’aisance financière qui n’a donc pas de scrupule à s’afficher en chiffres parlant. L’extension de nos sociétés de parler de nous en chiffres ne vient pas que de là. Il s’agit d’un recul presque humilié de la pensée à ne plus savoir voir le qualitatif des choses ; au profit d’un monde d’appréciation rationnelle et scientifique à compter le quantitatif. Tout ce dont nous sommes faits  et tout ce que nous faisons devient ou doit être mesurable, quantifiable. Il est en effet plus simple de comparer deux nombres que deux valeurs morales. Dix ou douze sur vingt parle immédiatement en faveur du douze alors qu’entre intégrité et honnêteté je ne sais pas aussi instantanément choisir. La simplification évaluatrice par le nombre est une lame de fond dont nous n’avons pas encore appréciée toutes les conséquences. Il est d’ailleurs des sociétés, dont l’Amérique si prompte à l’exhibitionnisme des chiffres, qui pour l’éducation ont toujours maintenu un jugement sur la valeur globale et non sur le résultat chiffré. L’élève y est considéré dans son tout humain, dans la sensibilité de son âge pour que, par exemple, ce soit la bonne matière (géométrie, poésie) qui soit relevée dans le positif tandis que les faiblesses sont commentées en vue qu’elles s’améliorent. Evitant ainsi la sanction non  explicative du « zéro » dont on ne peut que se désespérer. Par conséquent tous les secteurs de l’activité humaine ne peuvent être appréciés avec les mêmes méthodes. Certaines doivent pouvoir échapper à tous types de contrôle. Il devrait pouvoir être placardé sur mon front « interdit de me mesurer » : mon corps et mon esprit m’appartiennent ;  et la vie qui s’exalte de moi doit être socialement et nécessairement appréciée dans ses effets concrets et ses réalisations. Les outils internes, avec et par lesquels je prépare ma réception des informations, mes réflexions, mes axes d’action, sont des secrets professionnels qu’il m’appartient de ne pas dévoiler, que je n’ai pas à exposer à la comparaison d’autrui. L’intégrité, au sens de l’exhaustivité et de la totalité de ce que je suis, peut avoir des comptes extérieurs à rendre mais, n’a pas de justifications intérieures à produire. Ce n’est pas coquetterie ni culte exacerbé de son moi. C’est une mesure de salubrité pour ne pas être continuellement écorné, par la comparaison qui n’est pas raison, par raison comparée avec raison de l’autre. Erreur fondamentale que de regarder simultanément deux enfants dont les origines, les parcours, et les buts sont génétiquement différents. Je suis né seul, je mourrai seul, et entretemps je fais des rencontres. Mais je n’ai pas de parallélisme permanent  à établir avec l’autre, ni avec la moyenne des autres. Or, c’est  ce que propose maintenant de la naissance à la mort la bienveillante –  croit-elle  être – société en perpétuelle évaluation de nos faits, actes, voire pensées ; et même en chiffrage de nos dispositions structurelles à pouvoir ou ne pas pouvoir naitre, apprendre, engendrer, travailler, être heureux, mourir à temps prévu par la moyenne. Les mots employés insistent, si l’on en doutait encore, qu’il s’agit bien d’un bilan de santé, de compétences, bilan sanguin comme s’il s’agissait de la bottom line, la dernière ligne du bilan comptable, qui dit si votre société gagne ou perd de l’argent, si « ma petite entreprise moi & co » peut oui ou non continuer et obtenir oui ou non un découvert bancaire. Les employeurs, mais il n’y a pas qu’eux, les futurs conjoints aussi, n’hésitent plus à se procurer des statistiques chiffrés du comportement de candidats envisagés. Cela ressemble au pesage des jockeys dans les courses de chevaux. L’être est devenu une quantité. Par bonheur encore les variations des destinées humaines n’ont pas toutes les mêmes exigences d’excellence. On peut être bon pour ceci et mauvais pour cela. Mais l’introspection, le phénomène en tant que possibilité introspective, est identique : on mesure au sens d’additionner des éléments, au lieu de faire confiance, ne serait-ce que pour un essai sur le résultat qui devrait être la seule chose ayant droit d’être compté. L’individu en devient quelque part des colonnes de chiffres dont on peut presque voir le graphique et qui donne une bonne ou une mauvaise courbe, que l’on prendra ou que l’on rejettera. La méthodologie ne serait qu’anecdotique si elle ne concernait que certains secteurs de la société. Les secteurs marchands par exemple qui ont de toute façon mauvaise presse, et qui ne se cachent pas que leurs but et moyens sont de compter. Le compte chez eux doit toujours être bon et primer sans vergogne sur le reste. Difficile de leur résister quand on a besoin de travailler sauf à traiter, de « con » ce qu’elle n’aurait pas dû, le chef de service de ma fille caissière d’une grande parfumerie des Champs Elysées parce qu’elle refusait que ses résultats soient affichés  et comparés avec ceux de ses collègues. Anecdote d’il y a 20 ans, largement généralisée et plus seulement dans le commerce. Le temps passé auprès du malade par l’infirmière va bientôt valoir le temps qu’il faut pour changer un pneu de voiture. Encore qu’il ne s’agit là que de gestes en aval de l’individu qui en est le manipulateur. Mais justement, très vite en remontant en amont, le contrôle détecte d’où vient la différence, qui ne peut forcément venir que de l’opérateur, de  l’acteur. Les dispositions prédisposent l’accomplissement de l’acte, spécialisent les individus, pour qu’ils ne soient plus qu’une partie divisée de l’œuvre à accomplir. Le travail fordiste à la chaîne accapare un seul geste des bras pour que l’habitude et l’optimisation gestuelle ne rencontre toujours que le même point d’impact. La sollicitation des seules caractéristiques, arithmétiquement répétitives, organise notre cerveau en circuit court, sans passage par d’inutiles points de réflexion ou d’interrogation. La quantification séparative des caractéristiques de notre individu pratique une discrimination de notre personnalité. La méthode, et je le dis en choquant, ressemble au comptage des dents des esclaves attestant qu’ils seraient de long usage. Nous nous y laissons faire parce que à la sortie il y va, oui ou non, de notre accessibilité au marché du travail, nous donnant pouvoir d’achat et donc moyen de vivre nous et notre famille ; il y va de notre éligibilité à la reconnaissance sociale ; hors de notre famille et amis proches je l’espère. Il y va de notre évaluation à être considéré comme citoyen non dangereux, il y va de notre santé soigné par un système comptable qui mesure en permanence état et prescription de ceux qu’elle assure et assiste. Le raisonnement peut se poursuivre à l’infini et il continuera, encouragé par la miniaturisation, la numérisation, l’instantanéité des technologies de savoir tout en temps réel sur nous. La seule réponse  incantatoire de la hantise d’un Big Brother est insuffisante tant la brèche n’est pas que l’œuvre du Mal. Il y a progrès déterminant à savoir à l’avance afin de prévenir et guérir. Les 5 % d’enfants morts à la naissance il y a un siècle  auraient préféré être dans le 1 pour mille de risque qui est le cas aujourd’hui ; dont on peut dire merci à toutes les investigations et connaissances détectables maintenant alors qu’elles ne l’étaient pas. Les connaissances, pour quoi en faire, est la question qu’il faut sans cesse se poser ou reposer, au fur et à mesure que la dite connaissance progresse dans une horreur du vide de réponse. L’économie a compris le fossé béant du vide que représentait l’absence du monde humaniste-philosophique, ou sagesse si l’on veut, pour répondre à ce qu’il faut faire des avancées de la connaissance. Dans tous les domaines l’économie s’engouffre et propose de nouveaux outils ustensiles de vie dès lors qu’elle connait les chiffres des futurs usagers : quel âge, combien de fois par semaine, de quelle couleur, avec quel goût ? Le tout en chiffres pouvant entrer dans un tableau, avec multiplication par le prix pour savoir avec sureté ce qu’il y a à gagner. Le circuit de l’information, par cette création de profit, part dans les moindres interstices de l’individu vous et moi, qui nous sommes laissés mesurer quantifier et ranger dans ce que l’on appelle aujourd’hui une banque de données. Des particules informationnelles de nous-mêmes sont prélevées à notre insu, puis stockées et revendues avant de nous revenir en objet de désir que notre impulsion ne pourra que saisir puisque correspondant si bien à notre matrice. Sommes-nous volontaires dans ce tour de passe-passe ? Il se peut. Etre interviewé, ausculté, jaugé peut flatter notre moi voire notre respectable individualité. A la question respectablement posée « votre avis nous intéresse », comme il est courant de l’entendre ou de le lire, il faut être mauvais coucheur ou associable incurable pour renvoyer le questionneur. Le jeu sociétal nous invite et nous flatte dans l’échange si nous restons maitres des intrusions, même de bonne foi, dans notre individualité. L’autre a le droit de vous demander votre pensée en tant que sortie de votre réflexion ; mais il – cet autre – est intrusif s’il teste et mesure votre manière d’arriver à cette conclusion. C’est à nous de dire stop avant, de ne pas se laisser remonter dans le mécanisme de la formation de nos actes. L’autre, ce questionneur, vient de tous les horizons de notre société, ayant pour le moment pris le pli définitif de savoir qui nous sommes, pour pouvoir nous gérer, nous administrer dans un but au demeurant humain de nous assister, distribuer, secourir. La somme, ou plutôt le volume des données recueillies, est gigantesque. Sa fiabilité est globalement indiscutable puisque prélevée à la source des observés. C’est un paysage de gabegie, de surabondance numéraire, ne laissant plus un instant ni une place à la fleur libre du commentaire, de la nuance, du contrechamp. Le monde s’est-il fait jusqu’ici, jusqu’il y a 200 ans disons, à coup de chiffres ? Les êtres n’étaient pas aussi repérables, les doigts de la main et les bouliers n’avaient pas la capacité de nos ordis, les transports insécures ne garantissaient pas l’arrivée à bon port des données. Le temps était laissé au temps et aux êtres d’apparaitre en chair avant d’arriver en chiffres. Les personnages qui ont façonné ce temps, oh combien construit, avant que d’en dire si c’était bien ou mal, parlaient peu de chiffres mais de projets en grandes envolées lyriques. Lyrisme à raison fustigé aujourd’hui où les médiums exigent des chiffres, rien que des chiffres, sans s’apercevoir du ridicule atteint dans ce paroxysme. Sans prêter à sourire ni à s’en sentir ridicule, un président de la république a répété dix huit mois durant, mais en vain, baisser les chiffres du chômage ;  alors que c’est l’individu, individuellement concerné, qui souffre dans sa chair et dans sa dignité de son absence de travail. Il n’a que faire du « chiffre » du chômage ! Le concerne seulement si lui, et ceux dans sa situation, vont trouver des mesures politiques et sociales permettant qu’il soit embauché. Le chiffre ici comme ailleurs n’est que résultat ponctuel, en plus ou en moins, d’une situation conjoncturelle. A ce niveau de responsabilité l’abus du chiffre montre le dévoiement de ses buts dans lequel est tombée l’institution de la société du nombre. Alors  que, j’en suis sur le discours, la parole présidentielle de compréhension aurait eu un impact chaleureux sur le même individu chômeur. Ce rapport, du un au tout, est une projection difficile à se mettre dans la tête. Comment comprendre que un tout, n’importe quel tout, n’est que la somme de « un »(s) individuellement additionnés, 1+1, comme des cubes qui s’empilent, comme des dominos qui se joignent. « Toute » somme qui oublie en cours de route l’individualité des petits un(s) qu’elle représente faillit à sa mission. Elle n’est plus démocratique pouvoir par le peuple qui n’est que tous + moi additionnés. Si la somme devient masse d’individus indistincts elle se et nous trompe. Elle est, même si le mot fera hurler, totalitarisme bien nommé avec donc son prédominant « total » suivi d’une manière de faire ou d’être en « isme ». La démocratie n’a pas encore trouvé le bon moyen d’écouter la partition individuelle de chacun pour en faire un ensemble orchestral harmonieux. Le totalitarisme capte mieux le ressenti individuel mais l’enrôle et le régimente ensuite dans des idéologies communautaires stigmatisant l’autre communauté comme l’ennemi à abattre. La supériorité devient le fer de lance d’une civilisation contre une autre civilisation, tout aussi dans l’erreur de se croire supérieure elle aussi. Alors que  ramené à l’individu il est peu probable que deux personnes seule à seule, face à face, aient l’esprit ou la forme de s’affronter sur le sujet. Les querelles entre individus sont du registre du caractère, du comportement mais pas de la nature de l’homme. Il y a entre personnes simples une reconnaissance du droit à vivre de l’autre. Ce n’est donc que la progressivité des représentations de nos individus qui nous rend mauvais, idiot, inefficace voire agressif. Comment passer de UN à des sommes de UN(s) sans qu’ils ne deviennent une bande de UNS, , une bande de cons. Poussé à son paroxysme de notre communauté terrestre de nos 7 milliards d’hommes l’universalisme est la question. Comment respecter chacun dans un tout ? La question est peut-être mal posée si l’on commence, comme je le fais, par employer des mots déclaratifs comme respect. Le respect se mérite, au bout d’un processus permettant à chacun d’apprécier l’autre dans ce qu’il est réellement. Pour ce faire, de bonnes conditions d’observation, de vue sur l’autre, doivent être organisées. C’est par là qu’il faut commencer plutôt que d’exiger ( de qui ?) pourquoi  le dit respect ! Commencer donc par le constat du parc humain (zoo ?) dont nous sommes les animaux évolués, ainsi que l’écrit le philosophe allemand décrié pour cette audace Peter Sloterdijk. Nous sommes caquetant dans la basse-cour terrestre, y cherchant par notre propre bec d’abord pitance et bonheur. L’urgence de l’organisation terrestre, de l’universalisme si l’on veut prendre quelque hauteur, est de faire en sorte que nourriture et capacité de désir soient disponibles pour tous, dans une offre d’égalité de chance pour y accéder ; ce qui est tout à fait différent d’une distribution en quantité exactement égale pour tous. L’accès aux ressources de manger et d’être heureux, dans ce que nos savons, et ce n’est pas des mots du bonheur, cet accès est possible. Nous savons que la terre peut produire assez de nourriture, nous savons que l’espace physique et le lien social peuvent entretenir le bonheur. C’est déjà une bonne base de savoir que les ressources ne manquent pas. Notre travail d’hommes est d’organiser la liaison entre, les besoins et les désirs individuels de chacun, et, les stocks de denrées physiques et intellectuelles à se répartir. La division arithmétique simpliste, en partie égale pour chacun, ne marche pas. Constat très dur à avaler. Vision amère de nos états différentiels aussi bien à être honnêtes producteurs de ces denrées œuvre de notre travail car elles ne tombent pas du ciel. Vision amère de nos états différentiels  à être aussi d’honnêtes jouisseurs de ces bénéfiques denrées ? Oui, nous ne jouissons pas tous de la même façon, nous n’avons pas tous les mêmes besoins, nous ne projetons pas tous la même vision. Et pourtant ces chacun(s) de nous producteurs et jouisseurs ont le droit d’être ce qu’ils sont dans le périmètre de leur individualité : ils ne peuvent demander aux autres de fournir un comportement, de producteur ou de jouisseur qu’ils ne veulent pas avoir eux-mêmes. Là encore, à un plan strictement et basiquement individuel, on ne voit jamais deux individus seul à seul face à face exiger de l’autre ce que lui-même ne donnerait pas à sa place. Il n’y a pas de progressivité de représentation pour déformer les aspirations individuelles honnêtes vers des idéologies grossières et globalisantes. La rengaine, qui sonne bien, que les riches doivent payer, ou que l’ennemi est la finance, est un attrape mouches ou couillons qui flatte l’oreille mais qui ne peut aller à l’intelligence. Car en effet on fera payer le riche une seule fois vu qu’après avoir payé n’étant plus riche il ne pourra plus être ce riche désigné. De même la finance, qui ne paiera qu’une seule fois, puisque ayant payé elle disparaitra. Ainsi l’organisation des rapports d’aspiration aux denrées physiques et intellectuelles est autrement plus compliquée que le jeu de massacre de l’autre dont nous amusent en écran de fumée nos élites gouvernantes. Compliqué ne me plait pas parce qu’il justifie le palliatif actuel de ne pas pouvoir faire autrement. Il ne semble pas avoir de solutions si l’on garde l’idée de mettre les individus en commun, avec des règles coercitives pour qu’ils soient égaux et pareils alors que leurs natures individuelles sont inégales et différentes. Il faut repartir de la spécificité de chacune des pièces du puzzle pour recomposer le grand paysage, qui à ce moment seulement d’achèvement et de stabilité – attention le monde bouge et le puzzle peut s’écrouler – méritera le nom d’universel. L’invention nécessaire est la reconnaissance de chacun de nous en tant que pièce du puzzle, concret  carton capable de s’enchevêtrer dans les autres pièces, illustration fractionnée d’un paysage du grand tout universel en formation permanente. Les mots dans leur envolée feront sourire alors qu’il ne s’agit que d’un processus simple d’identification de chacun de nous à ce moment « t » spécifique de notre passage générationnel dans le déroulé en cours de l’histoire. Prendre au polaroid instantané ce que nous sommes par l’inné immuable et l’acquis éducationnel en cours…d’acquisition. Nous voici, comme au temps de l’ancien conseil de révision pour les hommes qui examinait les caractéristiques de l’individu du début de l’âge adulte, vers 18 ans je crois, avant le service militaire. Cette photo de vous-même entre dans le fichier de l’humanité en cours, pour les 60 ou 80 ans que nous avons à y vivre. Qu’y sommes-nous ? Que pouvons-nous y faire ? Qu’y recherchons-nous ? Simple constat ; mais quelle mine d’informations sur chaque être, puis tous les êtres ensembles. Pas d’erreur possible puisque tout vient de relevés opérés en un espace temps connu, sur une population du même âge donc dans des évolutions comparables. En retour de cette information nous serait retournée l’état du monde tel qu’il se trouve, l’état des êtres tel qu’il vient d’être relevé, et par déduction, entre les deux, la place spécifique que nous pouvons prendre. Chacun y trouvera sa place et une place qui ne serait pas forcément une exigence. Elle s’épanouirait seulement dans un « ce que je suis » et un « ce que je veux être » projeté dans un paysage de puzzle global y montrant notre îlot où poser, où construire notre pièce du puzzle. La méthode consiste à faire confiance à une cohérence du tout pour nous contenir sans que nous ayons à nous pousser du coude, à pratiquer la loi de la jungle pour prendre une place parce qu’il n’y en aurait pas assez pour tous. Le pari, qui n’en est pas un mais plutôt une réalité économique, est qu’il y a assez de quoi sur cette terre pour nourrir et rendre heureux tous les hommes. Le temps d’une génération du moins, car si l’immortalité n’est pas définitivement à l’ordre scientifique du jour, des poussées transhumanistes ou autres, étirent de 3 mois de plus chaque année  la durée de vie. Cinq , six générations cohabitant en même temps demandent des aménagements de l’espace temporel, spirituel, mental. En attendant l’équation de sept milliards d’individus face à x milliards de tonnes de denrées et autant de particules bonheur est une réalité. Notre challenge est de susciter que chacun y trouve sa place épanouie sans frustration. Le procès d’utopie nous guette sitôt que nous explorons le non tenté jusqu’ici. Certes mais ce qui a réellement été tenté lui peut se voir, s’analyser et nous donner envie de s’y réessayer à nouveau. La distribution égalitaire de tout vers tous, le communisme, s’est heurtée à la demande particulière de chacun. Le laisser faire, le libéralisme, au gré des humeurs de chacun crée des effets d’accumulation vers les riches et de rétrécissement vers les pauvres. Entre ces deux expériences vécues, dont la dernière libérale toujours en cours faute de mieux, il ne s’agit pas de choisir le juste milieu ou le compromis. Parce que les deux écoles politico-économiques citées ont ou font l’une comme l’autre ignorance de l’individu individuellement pris comme but de satisfaction, en tant que jouisseur et but de production, en tant que contributeur. L’un et l’autre système se comportent en bras de force sur les individus qu’ils n’appréhendent que comme du numéraire, de l’unité de consommation ou de production mise dans une masse. Cette ignorance dédaigneuse de l’individu de base porte non seulement son immoralité, qui est affaire de jugement, mais surtout comporte son erreur de marketing humain. Leur étude de marché ne tient pas compte de cet humain si spécifique, si unique dans son organisation personnelle impossible à dissoudre dans une organisation globale. Les deux régimes, par leur passage en force sur cette aspiration propre à chaque homme, font l’une comme l’autre des mécontents. Oser repartir d’un consentement de l’homme individuel n’est pas une  utopie qui ne se nourrirait que d’éléments fictionnels. L’aspiration personnelle de chaque homme est une réalité : ses caractéristiques, ses désirs, ses capacités sont des données factuelles, constatables. Le propos est de s’en servir au lieu de considérer qu’il faut les dominer. Par leur comportement les deux systèmes l’un communiste l’autre capitaliste ne se sont installés que par mesures de domination, même s’ils s’en défendent. Vouloir le bien des gens contre leur gré vaut bien la liberté des gens à se débrouiller coûte que coûte. Dans les ceux cas, une idée est dominante sur l’individu en lui disant comment se comporter. Au contraire, l’inversion du parcours, partant de l’individu, implique celui-ci dans une chaîne de responsabilité. Ayant constaté ce qu’il était, ayant exprimé ce qu’il désirait, ayant été confronté aux champs des possibles de l’ici et maintenant de sa génération, l’individu non dominé n’a plus d’autre échappatoire pour courir sur la route que lui ; nul autre que lui a dessiné sur le paysage global. Il est en quelque sorte en mission de lui-même, en exécution de sa propre tâche dans un chantier dont il a en mains les plans honnêtes. L’articulation pratique n’est floue que si on essaie de la projeter dans nos institutions pyramidales d’organisation actuelle. La base du bon constat identitaire de chacun est la clarté des informations qu’elle contient, la transparence de leur transmission à autrui, la lecture dans les seules significations qu’elle recouvre. L’information doit circuler entre intervenants en totale intégrité de leur intention originelle. Ne pas faire dire à l’individu, et à son expression individuelle, ce qu’ils n’ont pas pensé ou dit. Que puisse, à partir de l’expression, s’enclencher immédiatement le « moteur » qui clappe au cinéma l’action. Personne pour nous filtrer, pour nous modérer, pour nous dévier. L’action en confiance. Tout ce que l’on peut dire de nous, et je parle de nous ou de mon moi intime, s’arrête toujours à ce que les mots arrivent à porter. En écoutant le flot des sons d’une langue qui m’est totalement étrangère comme le suisse alémanique, je me demande toujours comment des sentiments subtils exprimant l’amour par exemple peuvent se transmettre dans ce véhicule guttural si barbare. Sans aller si loin dans l’incompréhensible, mes propres mots s’arrêtent là où je n’en trouve plus ou pas assez pour exprimer le profond de moi. Il nous passe dans le cœur, et dans les sens, des souffles remontant au cerveau qui ne leur trouve pas de vocabulaire. Notre ressenti est comme un halo, un nuage de ouate d’une intensité si éblouissante qu’elle en paralyse les mots devenant rétrécis et donc infirmes pour décrire. Plutôt que faillir mieux vaut s’abstenir car la transmission affadie fige définitivement, par l’écrit ou l’oralité vers autrui, une impression qui valait beaucoup mieux que cela. L’importance de notre parole ou écrit circulant nous revient aux oreilles et aux yeux. Etre lu, écouté, ressentir les mots que l’on relit et dès à présent font exister aux yeux de l’autre. Et plus on réécrit plus on réexiste et devient dépendant comme une laisse de chien, de la chaîne des mots que l’on juxtapose. Enfantillage que cet ensorcellement des mots mais réalité de nous manifester. D’autres situations de la vie sont occasion de ce florilège qu’est toujours, comme dans le cas amoureux, une démonstration d‘être en cours d’existence. Par la parole dans nos civilisations, alors que d’autres cultures manifestent par l‘ascèse, le silence, la gestuelle. Ce sont toujours des manifestations de notre profonde et intime individualité. Nous essayons de sortir de nous des halos complexes de subjectivité, d’objectivité, de raisonnement, d’informations. Si l’on pouvait visualiser le phénomène émanant il ressemblerait pour moi à un coucher de soleil, sur l’horizon dentelé d’une ligne de montagne. Un univers de couleurs, de contraste, d’embrasement dont on a l’impression qu’il veut dire quelque chose. Qu’un message personnel nous est propulsé dans les yeux pour que, par nos sens remontés au cerveau, un spectacle se forme dans notre tête. Ce qui se met en place est presque obligé d’aller directement à notre imagination ; car la raison, et encore moins les mots adéquats, ne sont là pour qualifier ces images qui nous percutent avec une rapidité d’extinction nous obligeant à regarder seulement, et,  ne pas s’arrêter pour commentaires sur image. Cette instantanéité du beau ou du laid, car c’est la même chose, est le cadeau à l’individu, dans sa perception individuelle et très personnelle. Il est des lieux mythiques au monde, en Grèce, à Grenade sur l’Alhambra, enfin il y en  d’autres, où une conjonction terre-mer ou montagne lieu provoque ce feu qui n’est pas d’artifice mais de réalité. D’un belvédère les touristes admirent laissant échapper des « oh » ou des « ah » qui ne sont que bêlement de troupeau car en nos fors intérieurs nous saisissons des messages de beauté très fort, que nous n’arrivons pas à raconter ou écrire. Pourtant cette forte impression s’inscrit dans notre mémoire à jamais. Au point de resurgir très longtemps après, en des circonstances complétement différentes comme une mémoire olfactive. Dans ce resurgissement de nos fumerolles internes, telles celles d’un volcan, nous reviennent les pensées du moment originel, comme si nous y étions. Pourtant il n’y a pas eu besoin ni de de mots, d’écrits, de bandes magnétique ou de supports numériques. Tout ne s’est passé que dans le circuit cérébral qui ne nous a même pas demandé la permission de fonctionner. L’individu fait ainsi recel de labyrinthes dont nous ne connaissons ni l’entrée ni la sortie ; mais dont on se doit de préserver l’obscure épaisseur des buissons. L’inconnu, cet inconnu là à l’intérieur de nous même, n’a pas vocation à être connu. Ce n’est pas un secret d‘alcôve à préserver au nom de l’intimité ou de la vie sociale personnelle. C’est plus que cela ! Ce sont les inattendus y compris et surtout pour nous même, un jardin secret y compris pour que nous n’en cherchions pas le secret. C’est un laisser faire de nous à laisser hors de notre contrôle. Il nous faut plus que l’humilité pour accepter cette présence en nous susceptible de nous tenir tête, de prendre parti, de nous contredire. Beaucoup n’accepte pas cette herbe folle poussant et virevoltant contre notre gré. Beaucoup la coupe et prétende l‘avoir éradiquée. Il leur faut avoir énormément d’inhibition pour penser ce musellement possible. Il est de nous des éléments consubstantiels incontrôlables que l’on peut seulement mettre en censure d‘expression ; mais pas en décapitation d’être. Ce qui existe en nous parle, ou ne parle pas, mais existe toujours en raison d’une fonction essentielle indispensable à notre survie, notre maintien en vie. L’individu de raison fonctionne en éléments de machines, assemblées de manière personnelle pour chacun de nous. La diversité de nos assemblages nous rend à nul autre pareil, mais dans un schéma mécanique global similaire pour tous. Tous différents, mais ramant dans le même sens de la galère. La subtile division extraordinaire en tant qu’individu a besoin de cet univers du non exprimable, de non contrôlable pour être finalement et durablement le seul individu qui compte, lui, lui seul. A un point si sophistiqué d’individualisation, que même lui, au premier chef concerné et se croyant acteur plénipotentiaire de lui, ne sait pas. Notre paquetage individuel ne nous est pas complément dévoilé ; inaccessible donc inconnu. Nous n’en constatons que les effets. Le plus en dedans du phénomène ne nous est pas accessible. Non point que ce serait dangereux. Non, c’est tout simplement un code d’accès qui ne fait pas partie de notre boîte à outils d’humains, alors que le produit fini est bien le notre fait pour nous ; mais sans savoir comment. Je n’ai ni explications physiques et encore moins morales. Seul m’intéresse le confort unique pour nous seulement qui nous en enveloppe. C’est comme une eau de bain à 37 °, dont on ne sait de quelles particules elle est composée, et dont on a que faire de le savoir. L’important est la saveur du ressenti absolument non stockable dans des cases de la normalité ou de la capacité d’être échangées. C’est notre cave à vins personnelle dont nous n’avons ni la clé ni le tire-bouchon. L’étrangeté de cet hermétisme a déjà du susciter la convoitise de ceux, comme moi, qui cherchent mais n’exigent pas de voir et d’avoir. L’intrigue en vaut en effet la peine, avec  surcroit cette part de découverte d’idées inconnues au cours de telles explorations. Les œuvres d’art graphiques, musicales, livresques, sont quelquefois des objets dans des terres inconnues du rationnel grâce au transport que se donnent d’hallucinogènes voyageurs. La tentation de comprendre le phénomène et de le reproduire à volonté va augmenter à la mesure d’avances technologiques en cours et futur pour détecter et pister tout ce qui se passe en nous. On ira très loin et on s’en approchera jusqu’à un point d’interrogation qui sera de se dire « mais pourquoi ? » L’individu, du plus simple au plus intelligent ou sophistiqué, est doté d’un quant à lui, un quant à soi, qui intrinsèquement revendique une part de non vendable, de non copiable de lui-même. Le pauvre comme le riche ont cette revendication. Le chinois comme le finlandais. Le plus grand des sages comme la dernière des putains. Une forteresse inaccessible à nous-mêmes nous protège au-delà de la raison dans un basique instinct de survie, de « pas touche » y compris par nous-mêmes. Ce recoin là est indébusquable, informulable, non volable parce qu’il n’est pas du périmètre matériel identifiable, avec une entrée et une sortie qu’il suffirait de repérer pour que nous même ou quiconque intrus y pénétrions. Et c’est là que se forme ce fameux non-dit, non écrit, dont je suis parti pour essayer de débusquer cette infinité de mots à exprimer le profond. Je trouve que c’est une très belle histoire parce qu’elle est celle de chacun d’entre nous. La vision me vient de ce que pourrait être le spectacle du monde où se dérouleraient en sons et en images ces impressions inexprimables par les mots ou l’écrit. Ce serait un festival de nuages, de couchers de soleil, d’aurores boréales, de chutes du Niagara ou d’Iguaçu, de pics du Machu Pichu formant comédie de toutes nos intenses révélations. Peut-être, s’il devait exister, ce serait là le Paradis rencontre de tous les humains, se révélant les uns les autres et enfin  leurs individualités. Entretemps il nous faut vivre avec ce que nous savons de nous-mêmes, ce que nous acceptons d’en dire dans le cadre de notre participation obligatoire à une société, et enfin cette part dont nous ne savons pas comment elle fonctionne mais dont nous voyons la fonction d’être notre identité imprescriptible. Même si nous n’avons aucune prise pour modifier ce phénomène nous avons par contre devoir d’hygiène et de motivation. La fonction n’existe que si l’on s’en sert. Elle ne peut disparaitre mais nous ne nous la verrions plus si nous ne l’encourageons pas à nous parler. C’est une poésie en nous qu’il faut aimer et écouter avec sensibilité puisque ce n’est pas par les mots qu’elle nous parvient, mais par les sens. On pourrait dire aussi de laisser se jouer en nous cette subtile musique, sans essayer d’en décoder le rythme ni les instruments. Simplement en laissant se déposer en nous sa saveur puisque telle n’est pas notre intention d’en connaitre la recette que nous ne cherchons pas à reproduire. A ce point de dernière poussière de nous-mêmes il ne sera jamais éthiquement convenable de parvenir. Toucher à ce point ressemblerait à appuyer sur notre bouton d’autodestruction. Mieux vaut ne pas exister s’il ne nous est plus possible de receler cette semence indescriptible, porteuse, au-delà de notre conscient, de notre ultime nous-mêmes. Individu final là tu es ! Il n’est pas en ton pouvoir de t’en dire que tu veux le vendre ou le garder. C’est un toi contre toi. Tu n’y peux rien. C’est lui qui peut pour toi et qui vient de te laisser l’outrecuidance liberté de gausser à son sujet, comme s’il était ta chose, comme s’il était un membre de ton corps commandé par les nerfs et les muscles, coordonnés par ton cerveau. Ce n’est pas pour autant un fantôme visiteur de tes antres sans crier gare. Parfaitement connu et partie prenante, il est de toi l’acteur de l’inexprimable, que tu ne peux pour autant montrer ni aux uns ni aux autres, surtout pas aux autres, ni à toi non plus. Fascinante destinée que celle de cet ami de l’ombre, omni puissant, quasi absent, indestructible, irrévérencieux, anachronique : rien que des qualités de surprise pour nous dire que nous existons, avant et après le rationnel, dans un paradis bien terrestre à entretenir de notre  foi d’individu en nous. Ma vie est un serpentin coloré, apparu à une porte du labyrinthe ressemblant au ventre de ma mère, et courant vers une sortie planche du haut d’un cercueil. Ces détails matériels illustrent, dans leur basique trivialité, le parcours inéluctable. Aucun artifice de l’esprit ne peut nous éviter ce passage par ces deux points extrêmes. Et pourtant entre temps que de circonvolutions va pouvoir et devoir se permettre ce serpentin au papier fragile mais néanmoins solide pour nous emmener du début à la fin. L’inextricabilité de ce ruban de papier  est bonne métaphore de ce qu’est notre parcours qui s’en va, qui s’emmêle, se démêle, et que nous seuls pouvons tirer au clair. Imaginons qu’il ne fut pas souple mais rigide ! Il casserait très vite ! Supposons que son parcours soit inscrit dans une visibilité par tous ! Il ne serait plus le nôtre mais une espèce de véhicule de location qui nous serait provisoirement prêté !  Cette ondulation de tous nos segments de vie par ce ruban réunis représente 1440 instants (minutes) par jour, 524.600 par an, 42.048.000 pour notre vie. La figuration de ces 42 millions de tranches de vie d’une minute est hallucinante pour se figurer autant combien de fois le serpentin de notre parcours a tournicoté autour de nous, autour des autres, autour de tous les éléments du monde. Comme une pelote de laine dont le fil s’est recroquevillé, entouré en boule de neige ouateuse sur lui-même jusqu’à en former un doux habitacle permanent et unique : notre nid individuel. La complexité du phénomène, y compris dans ma difficulté à en faire description, est porteuse de multiples messages significatifs. Tout d’abord un effet subjugué devant la sophistication du processus. On n’arrive pas à imaginer l’explication de toutes ces étapes de la vie, à la fois conflictuelles et concomitantes, puisque à la fin elles sont toujours dans la continuité de ce même serpentin. Ensuite un sentiment d’humilité de ne pas se sentir capable de copie, d’imiter et de reconstruire le labyrinthe. Quoique, pour anecdote purement contradictoire, le stockage de nos mouvements de relation sur les réseaux sociaux et sur le net va permettre d’étonnantes reconstitutions de nos segments de vie. Tout ce que nous laissons en trace sur les réseaux peut reconstruire de nous un « avatar », bien imparfait mais assez conforme, pour la partie que nous avons laissé s’archiver. Mais de là à revoir le film entier de notre vie il y a loin, et même il y a vide, puisque notre serpentin est geste mais aussi idée et sentiments quant à eux impossible à retrouver. Autre signification, de loin la plus forte pour moi,  est l’imprévisibilité du déroulement de ce serpent animé alors que nous sommes toujours  dedans, dessus ; sans que nous puissions dire que nous en sommes aux commandes. Comme dans ces grands manèges, où d’ailleurs c’est un serpent ou dragon sur lequel on s’agrippe et qui vous emmène dans son tunnel de frayeur et d’éblouissement. Nous nous confions, en confiance et sans autre alternative, à cette force de vie qui va nous emmener dans tous les horizons de la rencontre, nous montrant et quelquefois nous y proposant halte, montagne, mer plage paradisiaque, ténèbres catastrophiques, gens merveilleux, gens odieux, amour à nouveau, enthousiasme, déception. Le paysage ne cesse de défiler, de changer. Nous croyons pouvoir nous y arrêter en spectateur ou en acteur. L’envie souvent nous prend d’y porter plus que le regard mais déjà le jugement. Bientôt le désir de le changer. De se l‘approprier. Le temps de notre réflexion et ce temps court est déjà passé, nous laissant ici désynchronisé par rapport au seul temps qui passe, avec le serpentin souple mais fragile de notre destin très limité. Nos entreprises n’ont de toute façon, dans la jouissance que nous pouvons en faire, que le temps de nos 80 ans de vie. Ce qui est très court et donc très peu englobant du grand tout des choses qui constituent la vie. Plus circonscrit aux segments constatables de nos vies, ce que nous pouvons réellement nous approprier est réellement fugace. Les propriétés que l’on croit posséder ne sont que de concessions de lois locales artificielles. Les unions y compris le mariage sont des accords de société ne garantissant pas que notre conjoint légal nous appartienne. Quitte à en avoir le vertige, si l’on y songe sans les artifices des us, coutumes et effets éducationnels, nous n’avons rien d’autre que cette vitalité, capacité d’être en vie,  nous permettant de rester en selle sur le serpent ondulant et rapide. Nous n’avons rien sur lequel étendre la main de manière possessive ; mais nous avons le regard et tous les sens pour jouir de ce qui passe à toute vitesse devant nous. Ce spectacle est une alchimie d’ingrédients communs à tous les individus mais qui nous est présenté en VO, Version Originale, rien que pour nous, pour notre individualité. Chaque originalité que nous y voyons, chaque rencontre dont nous jouissons, est d’une pureté originelle. C’est une conjonction unique, une rencontre individuelle de ce qui existe autour de nous et de ce qui existe en nous. Nous pouvons nous en fermer les yeux et nous en boucher les sens mais cela n’empêchera pas le face à face, le choc de la rencontre d’avoir lieu. De près, si nous y participons, de loin si nous nous y refusons, la fusion a lieu et modifie notre état d’être et des choses. L’instant de notre serpentin de vie est aussi fondé, constitué à jamais dans le tréfonds de notre patrimoine d’acquis sur terre. Fort heureusement nous ne sommes pas toujours aussi activement sollicités par l’événement. Les événements se suivent sans que notre matière grise consciente en soit interpellée. Le circuit court de nos instincts travaille en continu, alors que nous pouvons nous reposer sur ses bonnes dispositions. A condition que les temps éveillés soient vigilants et motivants, pour nous alimenter en saine attitude de savoir vivre penser, agir. Il y a bonne nature de nous que si nous en organisons l’entretien. Garder l’œil ouvert n’est rien d’autre que de rester en disponibilité à ce spectacle du monde en show permanent devant nous. Les anglo-saxons disent après un événement douloureux et avec un contraste triste opposé à joie déconcertante the show must go on , le spectacle doit continuer. C’est une invitation d’une extraordinaire évidence à remonter tout le temps dans le train de la vie, sur le serpent-dragon du manège. Ou bien encore une incitation à re-prendre la place toujours et encore dans la nacelle du téléski qui passe et repasse inlassablement, avec l’insouciance d’être vide ou pleine de passagers. Ou bien, la grande roue imperturbable, tournant dans le froid de la place, mais capable de montrer l’envolée de son possible à l’audacieuse qui montera et bravera ses craintes. Autant d’images exemples ou métaphores pour souligner, et presque crier, qu’il y a toujours et tout le temps la possibilité de monter à bord de la spirale serpentine de la vie  Nous y sommes de toute façon toujours pris ; même, si nous n’y ouvrons pas les yeux et les sens en cabine volets fermés avec en plus le désagréable du mouvement dont nous ne voyons pas quel est le sens de la démarche c'est-à-dire vers quoi il nous emmène. Que de significations donc que ce serpentin dont j’essaie de saisir le rôle acteur et spectateur qu’il fait de moi, dans un spectacle unique. Ce qui est sûr, et qui fait l’objet de l’insistance de ma description elliptique, c’est que le spectacle n’est que pour moi, n’est que avec moi. Sans aucune perspective craintive qu’il puisse m’en être dépossédé, ou plutôt le terme serait moins possessif, sans menace que j’en sois hors jeu. Car l’originalité du spectacle est qu’il a besoin de moi et de nous tous pour continuer. A l’instar de certains nouveaux jeux vidéo composés de milliers de possibilités d’actions ou de combinaisons d’actions, qui attendent nos instructions. Le jeu a besoin de nous pour continuer, voire qu’il a besoin de nous pour exister. Cette convocation de notre individu à ce grand jeu du monde ne veut aller trop loin dans des racines et des ailes spirituelles. Non point qu’elles existent ou qu’elles n’existent pas. Mais justement il est du ressort de la partition, qu’il lit à sa façon, de chacun de nous d’interpréter sa musique vers le très haut ou le très bas du néant. Haut ou Bas sont des buts que personne n’a jamais vus et ne peut par conséquent pas parler. Alors que le voyage, que l’on peut appeler initiatique, dans le chemin du monde vers ce que l’on veut de Haut de Bas, ou de Nulle Part, est un Désir personnel. La modulation de ce Désir est un confort au sens de manière de conduire son véhicule dans le serpentin de la vie. On peut y vouloir des sensations fortes, des relations douces, des continuations, des ruptures. Ce ne seront que des emménagements circonstanciés à notre ergonomie comme si nous ajustions la hauteur du volant et l’inclinaison du siège de notre véhicule. Cela ne change fondamentalement pas les paysages de la route, la puissance du moteur. Il nous est toujours demandé d’être homme ; tantôt au volant d’un camion bourré de nitroglycérine sur une roue tortueuse du « salaire de la peur » (très beau film) ; tantôt au volant de la voiture des vacances sur la route Nationale 7 (Charles Trenet, très belle chanson) du bonheur. Toujours nous devons être nous, dans une confrontation de l’instantané : spectacle unique de l’instant pour homme unique du même instant « t ». Personnellement je me pince pour ne pas être naïvement dupe de ce miracle de l’instant. L’entourage social me ridiculise gentiment de mes extases, de mes confidences subjuguées. Sans doute je ne les raconte pas assez bien sinon ils devraient en être enrôlés. Je ne les crois pas moins doués de perceptions. Peut-être sont-ils plus socialement conventionnés pour ne pas dire blasés. Et pourtant ils peuvent voir comme moi les phénomènes existant, puisque le monde, avec ou sans leur acquiescement blasé ou enthousiaste, tourne ; et cela est un fait. La conscience de plus de monde à la réalité de  ces chances à saisir n’est pas une affaire missionnaire dont il faut convaincre ses contemporains. Il y va beaucoup plus d’une sollicitation à ce que plus de nous aient une emprise positive et active sur le monde. La somme des serpentins du monde a besoin vital que le maximum y participe de manière proactive et non passive et attentiste. Le spectacle a besoin qu’acteurs et spectateurs se congratulent, s’applaudissent. Notre enthousiasme est auto constructif de notre bien être. Ainsi se crée la valeur ajoutée produits matériels et bonheur. La description mécanique de ce serpentin, en évitant quelque détour spirituel ou ésotérique, montre qu’il s’agit d’une chaîne non coercitive de liaison de cause à effet. Nous produisons ce que nous donnons dans un chantier, dont il ne nous appartient pas de sélectionner ni les matériaux, ni l’architecture, ni la signification de la construction, ni les ouvriers. Nous sommes outils bienveillants, c'est-à-dire prêt à tout, et outils bien faisant, c'est-à-dire appliqués et compétents. C’est le sens et le poids de nos pas, sur le chemin, qui nous fait joie des nouvelles découvertes et perspectives du paysage. Nous croyons parfois, et un instant, être arrivé à un moment de réussite que nous aimerions et laisserions tenté à appeler « nôtre ». Il n’en est rien. Nous n’avons fait que suivre notre serpentin en confiance qu’il connait parce qu’il est, dans sa continuité, la seule piste que nous pouvons emprunter, sur laquelle nous ne pouvons qu’être. Le dévouement de notre serpentin de vie n’est pas qu’une servitude active, puisque nous sommes ici bien d’accord pour qu’elle ne soit pas passive. Le caractère inéluctable de notre parcours serpenté n’en empêche pas la fantaisie. D’abord par un laisser-aller de nous même qui ouvre la voie à l’irruption de choses spontanés et inattendues, que l’on accueille en bonne foi qu’elles seront bonnes pour nous. Puis ensuite par une mobilisation de l’énergie vers des objets de désir. Par des « envies de », quel que soit le bien fondé. Il faut s’y attarder un peu, et partager le constat primaire, que sans désir la vie n’existe pas. Quiconque se lève avec une petite envie, au-delà du besoin, de ce qu’il voudrait qu’il arrive dans sa journée. Petite réalisation matérielle, minime satisfaction morale, grandiose épopée, gain au loto ? Qu’importe les exemples, qui ne sont là que pour montrer tout ce qui nous passe par la tête et que, ayant la noblesse de passer par notre tête, la nôtre et non celle d’un autre, ils sont honorables. Y compris les inclinaisons de nos sentiments qui ont le droit, et ils ne nous le demandent justement pas, de nous interpeller et de nous dire « je voudrais ceci » ou « si je le pouvais je ferais cela ». Toutes ces questions, dans le parcours cérébral, ont liberté de venir à notre questionnement. C’est en cela que nous sommes des êtres humains ; parce que nous laissons le champ interrogatif venir à nous et parce que nous l’accueillons ensuite et dirigeons dans notre champ de la raison. Il est essentiel de ne rien filtrer au niveau de la perception, parce que ce qui demande à entrer frappera et refrappera encore et encore tant que nous ne lui répondrons pas ce que nous en faisons. Je ne sais la signification du titre de film « Un Tramway nommé Désir »  mais le moyen de transport m’indique que le Désir revient toujours. Il revient pour la raison qu’il est juste et pur. Il est la graine semence naturelle qui émerge de notre terrain de la vie. Nos actes, nos expériences, nos résultats succès ou échecs, notre inné aussi, sont un permanent bassin de décantation, ou plus sulfureux, un volcan en ébullition, qui dégage des fumerolles et des larves nommées elles aussi « désir(s) ». Bouillonnantes, brûlantes, intouchables tout de suite si nous voulons les saisir au bond. Mais de même que insaisissables elles sont aussi indébarrassables. Elles sont bien là le fruit de notre évolution, à la recherche que nous leur donnions satisfaction. Souvent les questions qu’elles nous posent sont abruptes, radicales, sans circonstances de notre civilité du moment. Sommes-nous heureux ? Voulons-nous une nuit d’amour avec la plus belle fille, ou le plus beau garçon, du monde ? Voulons-nous être riches ? Par ces exagérations il faut comprendre que tout peut nous arriver. Cà arrive bien aux autres simples quidams comme nous au moment de leur vie où ces questions leur sont tombées dessus. Et ils ont d’une manière ou d’une autre, parce que nous n’étions pas dans leur tête, répondu OUI.  Oui ; dès lors le Désir n’est pas une supercherie réservée aux gens riches ou aux surhommes. Le Désir fait partie de toutes les vies. Aucune de nos vies, même prise au niveau le plus infiniment petit, n’est exclue par ce traçage nommé Désir. Sur le serpentin de nos vies le désir est peut-être ce qu’est la ligne jaune, ou blanche maintenant, tracée en pointillés, segment discontinu, indiquant que l’on peut dépasser ou ne pas dépasser ici ou là. Selon le contour de la route, l’étroitesse, la visibilité, la rudesse de la pente ou de la montée. C’est un appel à l’élan moteur d’autant plus significatif qu’il indique en quelque sorte que la voie est libre si nous mettons les gaz, si nous appuyons fermement sur l’accélérateur. Le désir est un bien qui se présente à nous, forcément, pour que nous songions à le réaliser. Notre appréciation de faire ou de ne pas faire est de notre totale liberté, et sans qu’il y ait jugement de valeur de notre paresse  si nous ne le réalisons pas ou si nous ne l’envisageons pas. Le désir est un programme, actif et même distinctif qui nous est proposé sans obligation d’achat. C’est un teasing subtil qui, sachant tout de ce qu’est notre vie individuelle et de ce qu’est l’univers total autour de nous, se permet de nous inciter à prendre le billet gagnant premier pas de réalisation de ce désir proposé. L’adéquation à notre cas y est mathématique dans sa présentation théorique. Théoriquement, nous dit le désir « tu peux envisager ceci ou cela » ; mais pratiquement il ne nous dit pas «  tu dois faire ceci ou cela ». Le pas que le Désir ne franchit jamais c’est d’anticiper notre choix en tuant notre liberté de lui dire oui ou non. Extraordinaire entremise ; apanage je crois que du seul genre humain. Pouvoir mais ne pas être obligé de vouloir. Sans qu’il ne nous soit tenu rigueur de ne pas saisir l’opportunité  de ce que l’on n’appelle pas chance, opposable en jugement de valeur à malchance. C’est à croire que, dans la grande coordination à supposer qu’elle soit nécessaire de tous les désirs de chacun de nous dans le monde, il y ait une sélection naturelle de désireux et de non désireux, de sorte que trop de désirs ne deviennent mondial embouteillage. Pur problème logistique qui aurait sa solution et n’est pas un problème de comportement individuel au cœur de mon propos. En résumé il nous est offert régulièrement, sur un plateau, à accueillir ou à refuser, le cadeau du désir. Ayant, je l’espère, appris à comprendre qu’il s’agissait de toute façon d’un bon  désir nous devons pour le moins le tenir en courtoise considération ; ainsi qu’il s’agirait d’un bon ami, même si un peu intrusif, envahissant, qui viendrait nous proposer gentiment un service, un bon tuyau. Il faut l’écouter sans appréhension qu’un mal sournois y serait anguillé sous roche. Pourtant l’irrationnel de ce désir nous fait douter de son bien fondé, tant  en tant que nécessité que par qualité de notre personne pour en être gratifié. Désir n’est absolument besoin primaire ou secondaire s’imposant sans besoins de raison à nos instincts. Désir est un nuage matériellement insaisissable de séduction de ce dont nous n’avons pas encore besoin en tant que nécessité vitale. Le désir vient flatter, caresser, une potentialité que nous avons en nous. Impossible d’en éviter le caractère séducteur, évoquant un dépassement de nos sentiments normaux en particulier et de  notre normalité comportementale en général. Très rapidement, il évoque en nous un appel au changement de vie, de pensée, d’action, minime moyen ou total. Le message du désir invective notre moi profond en lui disant « tu es capable de cela si tu le veux » et provoque une montée de bonheur dans notre égo ainsi appelé à se dépasser. Nous n’y avions pas songé avant, non pas par manque d’imagination naturelle dont notre parcours serpent de vie est doté. Nous avions simplement accepté jusqu’ici des règles sociales morales ou éthiques comprises dans un état statistique et non susceptible de révision par la réflexion. Règles de vie en société souvent, comme la fidélité, mais surtout habitudes personnelles par paresse ou train-train de réemprunter toujours le même parcours réflexif, de toujours faire comme ci  quand çà arrive comme çà. Rien de méchant ni de répréhensible dans notre animalité pavlovienne, trouvant plus simple de toujours faire pareil. Le Désir vient simplement comme le chien dans le jeu de quilles nous donner l’envie de jouer autrement : plus habilement, plus à notre façon. Pas du tout par plaisir de changer, mais par constat  que les caractéristiques de notre personnalité peuvent faire plus, et en tout cas mieux, pour nous avec les mêmes outils de vie. Que faut-il faire de si aimable approche d’empathie à notre égard ? En tout cas il faut considérer la sollicitation pour ce qu’elle est : existante, sincère, à notre portée. Ensuite apprécier l’état des lieux de ce que nous sommes et l’état du projet proposé. L’évolution progressive est moins risqué que la révolution instantanée. Changer de boulot dans sa région évite le changement du mode de vie pour soi et les siens à l’autre bout du monde. Dans une situation sentimentale, au contraire, la progressivité n’est pas compatible avec l’exclusivité que signifie la vie en couple. Il importe de bien identifier la nature et les conséquences de ce désir sans s’en raconter des accommodements par des mots mais s’avérant impossible dans la réalité. Dans le désir aussi ; et surtout il ne faut pas faire aux autres ce que l’on ne voudrait pas que l’on vous fasse. C’est un préalable incontournable que de se poser la question de la faisabilité. Ensuite, rien n’empêche de transgresser, de prendre carrément les bifurcations de vie, les décisions de rupture, dans un esprit de totale responsabilité des tenants et des aboutissants de nos actes. La grille d’analyse en est terriblement complexe à cause d’une, au moins, double influence. L’une, non des moindres, est la force volcanique du désir, capable de vous donner une énergie surhumaine de la réaliser. L’Amour, l’appât de l’argent, l’addiction, l’appel du très haut pour certains, sont des tracteurs de destin qu’aucun frein n’arrive à arrêter ou détourner de leur course. L’autre influence est de l’ordre déjà évoqué du carcan de nos habitudes, mais celles-ci à la puissance surmultipliée, qui s’appelle la convention sociale. Avant la loi du permis ou du défendu il y a le regard des autres et le regard de nous-mêmes tressant sur nos vies une toile serrée d’interdits. A la différence de la loi infranchissable le « qu’en dira-t-on » de nous-mêmes et des autres est une toile de voile ondulante. On peut s’en draper, s’en aveugler, s’en faire ceinture de chasteté ou ruban d’étranglement. Nous sommes notre propre manipulateur de nos interdits. Ce sont nos petits arrangements que personne ne peut nous forcer à tenir mais que nous laissons rôder en fantôme pervers dans nos têtes. Fantômes sympathiques au demeurant qui nous rassurent dans nos doutes d’être ceci ou cela mais en tout cas ni écervelés ni sans moralité. Nos interdits font partie de nos meubles pour nous faire décor de vie. Le boulot insatisfaisant mais pépère. Le mari ronchon mais régulier en revenu et fidélité apparente. Les vacances au club pour être sur de ne pas avoir à se chercher des amis. Ce ne sont que des meubles que l’on peut bouger. Certes. Mais renverser l’un c’est dégager une place pour l’autre. Tout envisager et remettre en question est trop dans un train-train qui, même lent, ne s’arrête pas. Il faut plus fort que soi pour crier STOP, pour secouer, chambouler, proposer une autre disposition de vie. Un déménageur nommé « Désir ». Je le vois comme un souffle, une tornade blanche du sympathique costaud d’une vielle publicité  d’ aspirateurs Tornado. Bonne image d’ailleurs puisqu’il s’agit de faire place nette en nettoyant les habitudes. Il ne s’agit pas de tout mettre à la casse. Au contraire c’est un éclairage de dépoussiérage de nos méthodes pour que d’abord nous les voyions sous un nouveau jour. Comme un tableau que l’on déplace et que l’on verra sous une meilleure lumière ou dans une fréquence de passage différente. Le désir vient nous dire de voir ce que nous sommes, mais autrement. Qu’il n’est point besoin de tout casser, de tout mettre à la déchetterie. Au contraire le désir c’est d’abord de se re-regarder, avec ce souffle de la nouveauté venu de nos propres poumons et allant en notre propre cœur. C’est un circuit interne auto généré ayant pour fonction d’être un autonettoyant. Ce très respectable outil de nous ne peut pas commettre d’erreurs en nous. Il est le garant de notre continuation comme nous en prévient Jean Jacques Rousseau  qui disait « Malheur à celui qui n’a plus rien à désirer ». Les sociétés constituées veulent être notre bonheur en ce qu’il est le contraire du malheur lorsque nous ne désirons plus rien. Les gouvernants de tous ordres, politiques, économiques, sociaux, éthiques, communautaires, famille ou du moins « cercle de famille », souhaitent-ils que nous ayons des désirs ? Globalement oui, je crois. Aucune de ces autorités en charge de notre représentation ne pense à nous priver de cette faculté de désirer, même si des conditions communes de bonheur imposées à tous sont plus faciles à gérer. Entre le mécontentement individuel et le contentement collectif, les manières de gouverner les âmes spirituelles et le comportement des citoyens ont varié depuis toujours. Avec pourtant, semble-t-il,  un arrêt, une fin provisoire de l’histoire qui nous arrive juste en ce moment charnière XXème XXIème siècle. Le graal, le fruit défendu peut-être, qui semble mettre toute l’humanité d’accord est la consommation. L’accès de presque tous, et en tous cas de plus en plus de nos contemporains, à des objets de confort et de plaisir met tout le monde d’accord, fait taire les velléités, et indique une voie à une libération collective puis individuelle de consommateurs, devenant un peu « acteurs » de leur vie croyant pouvoir choisir ce qu’ils achètent, croyant pouvoir être libres puisqu’ils ont pouvoir d’achat. Car il est de constat géopolitique que la circulation des objets de consommation, tant au moment de leur production qu’à celui de leur consommation, crée un marché, un lieu d’échange, un tout petit début de démocratie. La morale se retrouve peu dans ce constat que ventre moins affamé a plus d’écoute pour les choses de l’esprit. Mais c’est un fait mesurable, en chiffres comparatifs de PIB des citoyens de pays en voie de développement. Est-ce un effet du désir que de consommer dans un postulat généraliste d’un « je consomme donc je suis », heureux ; ou « je ne consomme pas donc je suis malheureux » ? Rousseau ne voulait certainement pas dire cela. Et ce qu’en a dit Rousseau ou ce que nous en disons en sagesse aujourd’hui ne cantonne pas le désir à sa niche de comportement consommateur. Le Désir de Rousseau comme le nôtre est un grand embrasement de nos êtres âme et corps pour exalter notre joie de participer à l’animation de la vie, du temps personnel dont il est souligné qu’il est fini lorsque nous n’avons plus rien à désirer. Les circonvolutions désir et consommation étaient importantes à situer ;  car opposer ce qui serait bon désir d’une part et mauvaise consommation d’autre part est une méconnaissance du fonctionnement humain. Il n’y a pas de spirituel au-dessus de tout et de matérialisme en-dessous de tout. L’être qui ne consomme pas est un triste luron : non contributeur au marché de l’échange offre-demande dont il fait qu’il le veuille ou non partie. Consommer c’est participer à la vie collective dans le sens humaniste participatif du besoin mutuel que nous avons des uns des autres. Les américains pratiquent un patriotisme de l’acte d’achat pour témoigner une foi dans leur société conquête de l’Ouest libératrice. Notre histoire plus terrienne sédentarise les acquis et suspecte la fuite en avant consommatrice. Le Désir y est plus « rousseauiste » en une notion de l’esprit dès lors moins accessible à la masse, aux manants si je grossissais le trait, par lequel l’élite continue à voir le peuple. D’où la question de départ sur la sincérité des gouvernants à laisser le peuple avoir des désirs ? Dans un pays des Droits de l’Homme, homme au singulier signifiant les droits de chaque homme que nous sommes, le droit semble donné par l’élite à l’individu pour qu’il en fasse l’usage obligé et du moins fortement suggéré. En d’autres termes, la noble déclaration dit au citoyen « je te donne ce droit pour que tu en fasses cet usage ». La liste de ces droits est limitée à certaines situations de la vie, avec en début ou fin quelques droits généralistes de liberté, égalité ou fraternité ; et en voiture balai de ce que l’on n’a pas dit, dans un vocabulaire de saveur pour celui qui écoute et de non engagement pour celui qui les a écrits. Le Désir ainsi empaqueté devient un fourre-tout de promesse n’engageant que ceux qui les croient. Ce n’est pas avec cela qu’on rend les gens heureux. C’est avec cela qu’on rend les gens aigris de promesses non tenues et de désirs qu’ils trouvent vain désormais d’avoir. L’individu citoyen n’a la pas récompense bonheur de son désir républicain. L’individu consommateur n’a pas la satisfaction de son désir économique. L’individu communautaire n’a pas le retour coopérant de son désir d’échange avec les siens. Reconstruire le désir est le challenge d’une société ayant donné autonomie à sept milliards d’hommes susceptibles de dire oui, non, ou stop à l’évolution de leur cadre de vie politique, économique ou social. L’Ukraine, la Thaïlande, la Chine, le Brésil sursautent chaque jour de ces spasmes vibratoires. Curieux d’ailleurs qu’en évoquant ces éruptions du monde on ressente peu de cas « européens ». « Indignez-vous » entend-t-on un peu comme un chant du cygne à tonalité résignée. La difficulté sociologique, et encore plus la complexité politique, de décoder ces montées sporadiques, calmes révolutions, montre que l’on ne sait pas bien de quoi il s’agit sinon que c’est insatisfaction, mécontentement, manque de quelque chose alors que dans la plupart des cas le minimum vital est assuré. Le peuple ne réclame plus de pain  aux grilles du château de Versailles mais des jeux  au sens de divertissement et de signification à donner à sa vie. N’ayant plus église ou maître à penser ou leaders maximos, les individus crient devant n’importe quelle forme d’autorité dont la première devanture, en bas de leur barre d’immeuble, fait l’affaire. L’autorité du moment en place est le bouc-émissaire  de désirs psychologiquement frustrés, alors que, dans les faits légaux, on ne peut pas dire qu’il y ait censure des désirs. Des deux côtés la situation est insatisfaisante et porteuse de risque de dégénérescence et pourrissement. Le citoyen individu a l’impression de ne plus être écouté. L’autorité gouvernementale a l’impression de ne plus être entendue. Dialogue de sourds dans une partie faussée au départ : par le rôle que s’attribue l’autorité de savoir, en préconcept qu’elle a de son immuable raison de représenter le peuple, et d’incarner, pour lui une avance de ce qui est bon et de ce qui serait par conséquent mauvais. Il y a une espèce de préalable de l’institution, corps définitivement établi, se résumant à un « je pense bien puisque je suis ». Indéboulonnable statue, et statut, faisant dire à un Président de la République, à moitié de mandat mais à totalité d’incompétence et d’impopularité, qu’il n’avait cure de ses résultats puisque cinq ans le protégeaient avant qu’on ne le limoge. Cas extrême mais cas courant  de l’oligarchie protégée, représentant dans ses extensions une part importante de la population. En d’autres termes, beaucoup, et donc qu’en faire si on les supprime, vivent dans des situations de domination de leurs pouvoirs, conférés-protégés sur le reste d’une assemblée dite de citoyens ou de consommateurs, criant face à un mur phonétiquement isolé par statut. Les pouvoirs se sont donné l’immunité de ne pas avoir à ressentir, de ne pas laisser remonter pour qu’ils n’en soient pas incommodés, les désirs des individus. Ce musellement est de l’ordre moral car le cadre légal recèle une batterie  démonstrative qu’il y aurait dialogue, va-et-vient gouvernés-gouvernants. Les apparences sont sauves sur le papier mais non dans les mentalités et dans la manière d’efficacement fonctionner. Le problème de l’individu n’est pas de prendre le pouvoir, ou de jalouser ceux qui s’y prétendent. Le désir de l’individu est de considérer, honnêtement, ce qu’il peut faire de bien à partir de sa place actuelle dans la société. De ce que je suis, que puis-je faire de mieux ? Réparer ma situation actuelle, la maintenir, l’améliorer ? Telle est une synthèse de ce qui nous anime tous. Là commence le challenge surmontable de faire de cette synthèse généraliste une déclaration à déchiffrer et à remplacer par des faits précis de nos individuelles vies. Qu’il soit possible pour chacun de nous de se livrer à une analyse personnelle de notre situation acquise et du désir que nous avons de la réparer, la maintenir ou l’améliorer. Les sciences cognitives et les méthodes de collecte des données permettent un travail de recueil d’informations précises pouvant être individuellement protégées pendant tout le parcours de leur exploitation. Tout ce que nous disions, individuellement, peut devenir immense mais consultable banque ou dictionnaire de désirs d’une famille, commune, région, pays, humanité ; d’une entité économique ; d’un groupe éthique, moral, religieux. Il en ressortirait une analyse à lecture simplifiée et auto-génératrice de ses propres solutions. En effet certains désirs apparaitraient, émergeraient, en tant qu’aspirations ne pouvant être assumées que par l’individu de base s’exprimant. Exemple, le désir d’être aimé par une femme déjà épouse nécessite un comportement de fidélité sociale à cette épouse ; il n’est point nécessaire de convoquer la justice, la sécurité sociale, les lois, les religions pour venir encadrer de manière coercitive ce qui est du strict domaine du comportement individuel de tout un chacun. Alors que d’autres désirs feraient appel à des moyens dépassant l’individu qui les aurait exprimés. Exemple le désir de maintenir sa résidence dans sa région bien aimée alors que l’industrie qui nous y emploie disparait par changement de comportement de la consommation. Situation complexe où l’individu, avant son attachement régional, doit placer la source de ses revenus en seule priorité. Une éventuelle exigence, que son industrie soit à contre économie maintenue ou qu’une fausse économie lui fasse subvention, n’est pas honnête. Ces pis allers solutions précaires sont des vols à la collectivité des autres individus. Le désir de l’Homme concerné par le dilemme doit se formuler en tant que construction d’un possible, qui peut être de se reconvertir dans un métier maintenable dans la région aimée, qui peut être de déménager dans une région du pays ou du monde de continuation de son métier ; qui peut être en changement de style de vie avec moins de dépenses. Reconversion, déménagement, mode de vie peuvent ne pas être vécus en contraintes meurtrissantes mais en désirs assumés et partageable avec les étages au-dessus de l’individu que sont la compagne, la famille, la communauté, la commune, la région, etc… pour que ces strates épaulent et motivent ces mutations. Ainsi les désirs peuvent devenir un check-up tableau de bord de nous-mêmes, parce que nous en sommes les releveurs personnels de données nous concernant, que nous pouvons étalonner et comparer aux données à exactitude implacable de l’état de tout ce qui est autour de nous. Je n’ai jamais vu un individu se comportant isolément contre l’évidence de sa situation. Lorsque l’on sort de chez le médecin, les radios ou le bilan sanguin sous le bras, on ne demande pas au bon dieu ou à sa mère qu’elle nous refasse. On fait avec. On se prend en charge. On se soigne. ON s’améliore. Rarement on se laisse dépérir. L’individu dans ce développement psychique au-delà de sa santé de chair est d’un comportement identique. Ou plutôt il serait d’un comportement identique si ne se précipitaient pas vers lui les bras commisérants de l’assistanat.  A se demander si cette assistance n’est pas une manière des gouvernants de justifier leur raison d’être de dominants ? « J’assiste donc je suis » ou encore « voyez comme je vous suis utile », sous entendu votez pour moi, « vu que je suis là pour prévenir et guérir tous vos petits bobos ». Comment rejeter tant de bonnes intentions de nous cajoler ?  Comment oser réclamer que ces promesses-bonnes intentions ne soient pas toutes, et de loin, tenues ? Pour la classe dominante la partie est bouclée et elle peut recommencer son jeu dont elle fait règle et début-fin. Tout ceci n’est que continuation d’une duperie où le désir de l’individu a été détourné. D’une aspiration-désir l’institution  en a déduit et légifère un besoin. Qu’elle n’assume pas. Dont l’individu désirant est frustré, parce que ce n’est plus ni son exact désir ni sa capacité personnelle à le réaliser. Sans retomber  dans une assignation à mériter son salaire à la sueur de son front, il nous est nécessaire de parcourir nous-mêmes les allées vers le désir. C’est une construction personnelle de notre esprit  d’abord ;  se donnant ensuite des moyens du corps et du matériel pour y accéder. Seul l’individu seul peut ériger son désir. Le désir ne peut faire l’objet d’un pré formatage consistant à motiver les citoyens dans un sens particulier de désirer. La caverne personnelle de notre individu recèle nos inviolables trésors de percevoir et émettre nos sentiments. Le désir fait partie de ces secrets bien gardés, dans lesquels les institutions ne peuvent venir y exercer séduction et flagorneuse incitation à voter pour elles ou à suivre leurs commandements à vivre selon leurs désirs, désirs à eux cette fois. Ce grand luxe de posséder en nous caverne ou clairière d’absolu liberté de désir nous flatte et nous contraint à la fois. Flatterie d’être le maître de notre univers, d’être le constructeur de notre « construis-toi toi-même », le connaisseur de notre « connais-toi toi-même ». Contrainte de savoir ne pouvoir compter que sur nos seuls moyens pour avancer dans la réalisation de notre désir. Mais l’assurance que la société n’y fera pas obstacle est déjà une garantie extraordinaire que notre champ et latitude d’action vont être libres. Dans l’éducation dont je me souviens, ma reconnaissance viscérale va à mes parents de ne jamais m’avoir empêché en rien, et de surplus de m’avoir encouragé en tout. Non pas qu’ils avaient décelé en moi des points particuliers de potentialité à réussir que je n’ai d’ailleurs jamais eus et que je n’ai toujours pas. L’encouragement et l’éducation, qui veut dire accompagner, mener vers, puis l’important du moment d’être lâché  dans la vie, sont les tremplins d’un homme. Ce rebond le poursuit toute son existence comme s’il se demandait constamment « ai-je sauté assez haut » ? « Suis-je à la hauteur de la confiance que l’on a mis en moi » ? Les institutions devraient ne pas faire autre chose que de donner confiance à ses enfants, à ses citoyens, ses entreprises, ses groupes constitués pour qu’ils aient chacun cette envie d’entreprendre plutôt que de ressentir une protection, voire une castration de leurs élans. Les institutions seraient autrement plus dynamiques si elles savaient susciter ces élans rebondissant. Elles seraient trampolines plateformes générale d’exaltation des sursauts de chacun. Le tout et ses chacun y trouveraient largement leur compte. Pour ce faire il ne manque présentement rien en termes de moyens déjà mis en œuvre. Ne fait défaut que l’audace de croire en soi, en son individu pour être la source de son énergie. Oser dire à l’Etat, à l’Economie, que l’on sait se débrouiller et qu’on les supplie de ne pas nous y entraver, qu’on lui suggère de nous en fournir, en les redistribuant, les moyens de la solidarité sociale, de l’éducation, des lois régissant individus et entreprises. La réorientation des moyens est une remise à plat  du système qui partirait désormais de l’horizontalité, là où se trouvent chacun de nos désirs ; au lieu de la verticalité actuelle qui arrose de moyens des désirs mal ciblés. Retrouver le sens végétal par lequel les désirs comme les plantes peuvent monter s’épanouir et fleurir. Les grosses pluies venant de trop haut ne discernent pas les désirs d’irrigation différents à chacun de nous. A certains elles donnent trop voire inondent, à d’autres elles assèchent et désespèrent la pousse. Revoir un réseau d’irrigation de manière horizontale requiert que les chacun assoiffés manifestent clairement leurs aspirations : ce que je suis, ce que je veux améliorer. La réalité du challenge est entre les mains des concernés ; et non pas dans celles qui pourront motiver. Un énorme travail d’information et de suggestion du possible de chacun peut commencer par d’honnêtes incantations, à la manière anglo-saxonne des « YES I CAN », dont la rhétorique fonctionne, à la manière également américaine de repérer ce que l’on peut faire pour son pays , sa communauté, d’abord, avant d’exiger ce que son pays, sa communauté, doit faire pour vous. Si les sceptiques pronostiquaient d’avance que c’est là mission impossible il n’y a plus en effet  rien à attendre ni de la société, ni des individus. L’humanité n’est plus alors qu’en liquidation totale de biens dont les plus habiles se servent les premiers. Mais les sceptiques ne représentent qu’eux-mêmes et de toute façon pas moi qui, devrais-je être seul, relistera toujours ses désirs, du plus grand au plus petit, pour commencer justement par le plus simple et en faire ma tâche à réaliser aujourd’hui. Les sceptiques, et même les réalistes, ne comprennent rien à l’instinct, qui n’est pas réaliste, de survie, poussant chacun à se demander pourquoi il vit, et, ayant trouvé une minime réponse, décide d’y mettre un sourire personnel pour que ce pourquoi identifié se produise. Le réveil, ou l’éveil du désir en chacun de nous, est la capacité de milliard d’étincelles seules capable de démarrer le moteur d’une humanité calaminée par trop de réglages et d’automatismes. Cette dissociation n’est pas anachronique, alors que les entités au contraire se mutualisent, se fédèrent, s’agglomèrent. Le rapprochement des individus est le prolongement logique des guerres séparatrices dont il ne veut plus, de l’éducation qui nous met en connaissance des comportements et désirs de chacun, des distances  de transport des personnes  et de l’information qui se raccourcissent faisant de notre société un grand village. Chacun se rapproche mais ne se dissout pas dans l’autre. Chacun reste lui-même dans sa substantifique moelle vivrière-bouillon de culture d’idées pensées originales capables de devenir désirs à réaliser ; tant d’abord pour nous-mêmes que pour leur mise en contribution dans de plus larges creusets de nos communautés, région, pays, humanité. Ces contributions émanantes de chacun sont la seule fertilité véridique de l’humanité. Le progrès en tant qu’espèce vivante n’existe pas. Pas plus que la politique ou l’économie ou quelque institution. La seule chose qui existe c’est nous desquels tout démarre et vers lesquels tout revient. Omni présence de cet alpha et oméga que nous sommes n’est pas égocentrisme mais plutôt ethnocentrisme : l’individu au centre du fonctionnement d’un monde dont il est le déclencheur d’aspirations et le destinataire de réalisations. A s’étendre sur ce sujet d’homme central on se demande quels ont été les obstacles ayant retardé la réflexion. Pourquoi en d’autres mots ne pas y avoir pensé avant. Comment les brillantes pensées, réfléchissant le passé le présent et l’avenir de l’être humain, n’ont-elles pas détecté cette mine d’or que constitue la richesse individuelle de chacun. Il y a chape de pudeur au-dessus de l’individu. Comme si parler de l’homme obligeait par décence primale à ne le voir que petit, diminué, non fini, imparfait. L’humanité est grande mais ses composants humains en seraient petits. Comme si la masse formée impliquait des divisions infinitésimales. Il serait intéressant de chercher l’origine de ce rapport de force si défavorable à l’individu dans sa notion de plus petite unité du genre humain. L’histoire, la culture et maintes autres connaissances me manquent pour y contrecarrer mon point de vue opposé. Là est d’ailleurs le début de la clé pour comprendre le rapport d’infériorité devenu définitif complexe d’infériorisation de notre rôle face à la complexité du monde. Le sujet en est tabou une fois pour toutes : par le fossé de connaissances intelligentes dont nous manquerions, par la minimalité de notre arithmétique situation de seulement 1 par rapport à 7 …milliards d’autres ; de quel droit aurions-nous la parole et pour quoi dire. Le débat s’en clôt immédiatement laissant place aux institutions en place trop contente de combler immédiatement le vide de notre couardise. Personne n’ose demander. Personne n’ose proposer. La plainte même personnelle devient fatalité voire punition divine ou en tous cas impossibilité de l’éviter. Le resserrement du débat sur la petitesse congénitale de l’homme satisfait les petits et les grands. Petits hommes pour accepter leur sort, grands instituants pour pérenniser leurs dominations.  L’objet n’est pas de pousser le petit à la rébellion en semant un vent immaîtrisé devenant tempête. Le but est que chaque parti, petits et grands, prennent conscience de leurs rôles et présences avant qu’ils ne se qualifient petits et mortifiés de l’être, ou grands et justifiés, auto-justifiés, de l’être. Reprendre chacun dans son unité arithmétique du grand tout afin que s’ouvre à lui ce qu’il peut et veut faire de sa vie, personnellement dans son comportement individuel, collectivement dans son comportement social. Le grand bouleversement des consciences c’est de nous secouer pour nous faire penser et dire que je peux penser ma vie. Que cette introspection, au contraire d’un nombrilisme ou d’un narcissisme, est une construction d’un moi qui ira très bien et fera mieux aller tout ce qu’il côtoiera. Tout le contraire que se sentir coupable d’une désolidarité. A l’inverse d’une demande de repli et de retraite de la vie, entraimant à ce que la société soit obligée de vous assister. Le regard constructif de soi est un acte de simplicité au sens d’accepter une purification de tous les carcans empêchant de se voir. Accepter de se constater dans ses forces et ses faiblesses au lieu de se lamenter sur ce qui en effet nous empêche d’avancer. Il y a presque humilité  de soi à accepter de s’évaluer en véracité plutôt que de se réfugier en fatalité. Oser se voir dans le miroir c’est accepter le clin d’œil implacable que nous nous jetons, sans pouvoir le capter, et qui nous dit de nous réveiller, de ne plus nous lamenter, de nous donner des bonnes raisons d’attendre alors que notre leçon de courage commence comme chaque jour aujourd’hui, ici et maintenant. Le surinvestissement de notre individu, par cette ardente volonté de notre moi, effraye nos habitudes à courber l’échine, à ne pas nous croire capable de, à penser que la montagne est trop grosse à déplacer. L’érosion des blocs faisant adversité commence devant nous. Il n’y a pas dans les nuages ou au fond des océans de grands bulldozers ayant tâche régulière de faire table rase ou reconstruction globale. Les grandes mutations géologiques, comme la tectonique des plaques, font ce qu’elles peuvent pour nous reprendre et nous ramener, disent les moralistes, à notre petitesse. Même si nous n’y sommes, elles physiques et nous humains, que des entités désynchronisées. Partageant et nourrissant vaille que vaille le même monde. Ici comme ailleurs, l’homme ne peut compter que sur lui pour faire évoluer sa condition. Même Dieu ou ses pareils sont parties de notre décor si ainsi nous aimons le théâtre de l’existence ; mais l’on voit bien, et ce n’est pas leur faire injure, que nos vies humaines et personnelles vivent en juxtaposition sans coordination avec ces forces occultes. Il n’en est pour preuve démonstratrice, si un doute subsistait quant à l’impérieuse nécessité de chaque être humain de se reprendre en main, qu’est la liberté qui nous est donnée, et qui est bien notre réalité, quand nous disons oui ou non, quand nous faisons bien ou moins bien. Que l’individu se positionne en acteur décideur, ou plutôt l’inverse, décideur-acteur de son destin en y exprimant des désirs, n’est donc pas un crime de lèse majesté par rapport au reste infiniment responsable de la création. L’individu ne peut y être décrété supérieur, tant que nous ne savons pas tout des qualités intrinsèques de chacun des autres éléments de l’univers. Mais force est de constater la potentialité de l’homme à dépasser son constat de la naissance par l’expression de ses désirs et l’acquisition de moyens pour les réaliser. Là est une caractéristique spécifique au genre humain nous donnant obligation d’en faire usage en tant que moyen de notre survie. L’ambition de soi n’est donc plus une option mais une obligation de notre espèce humaine. Quiconque ne participe pas en ne voulant pas exhiber son envie de vivre retarde le projet global. Fort heureusement la participation ne relève pas seulement de la manifestation d’un désir formel. Il est aussi des instincts de survie ou plus prosaïquement des expressions de désirs naturels qui surviennent sans crier gare et font avancer le train sans que les passagers ne s’en aperçoivent. Ainsi se forment les wagons en voies du monde, dans une continuation d’exploration de paysages qui se renouvellent tant en physique terrienne qu’en expériences humaines. Chaque instantané de combinaison espace et humanité oblige à un renouveau du regard, de l’enrichissement, de la place et du rôle que l’on peut y jouer par désir personnel et aussi par travail dans l’intérêt général. C’est une double attache que nous avons ainsi à la marche du temps : personnelle pour y trouver notre envie, collective pour y apporter notre contribution, dans une égalité de droit à l’envie contre devoir au travail que la société n’aime plus ou ne sait plus apprécier. Mon désir personnel s’exprime ici dans cet écrit  pour qu’il puisse être lu et susciter le lecteur lui aussi d’exprimer ses désirs. Surtout ne pas en avoir peur. Ne pas croire qu’il franchirait une limite entre son inhibition et une exhibition ;  qu’il deviendrait extraverti alors qu’il se croit ou qu’on le dit introverti. Le « genre » psychologique n’est que mots que la société nous attribue et répète au point de nous y sentir enfermé, nous rendant gardien consentant de notre propre état de prisonnier. Il faut en faire cure de désintoxication. Pouvoir se réveiller demain, en se sentant plus que nous-mêmes dans notre peau physique et psychique qui ce jour là n’aurait aucun compte à rendre à quiconque, qui pourrait dire à toutes les inévitables rencontres puisque la sociabilité est notre état, que nous sommes un homme neuf, sans savoir passé sur ce que les gens pensent de nous, sans prospective de ce qu’ils penseront de nous. Que de fois nous croisons des situations sociales, au travers des hommes des femmes et des événements, où tout semble figé. Les visages sont burinés, les paysages sont modelés de sorte qu’il n’y a plus qu’une espèce d’attente de la fin des temps ou du moins une espèce de passivité à laisser le temps passer malgré eux. S’il est vrai que le temps arrange bien des situations et réinsuffle souffle à la désespérance humaine, l’espace temps spécifique d’attente ou de passivité est un tunnel pour ceux que la conjonction met à cet endroit. Ils n’y auront peut-être pas tout perdu mais en tout cas ils n’y auront pas vécu. Or, en cette période de tunnel pour eux, il s’est passé des tas de choses dont ils auront loupé l’opportunité d’y participer. Le temps qui passe est un grand show permanent où les scènes se renouvellent sans cesse. Nous n’avons pas le don de l’ubiquité pour tout y voir et à tout y participer. Mais nous y avons un pass à durée illimitée ou limitée à ce que nous en savons le temps de notre vie terrestre. Ce pass n’est pas une option mais un marquage indélébile, comme d’ailleurs dans certains parcs où l’on vous marque le poignet pour que vous puissiez jouir de tous les agrès y compris en entrant et sortant à votre convenance. Vous êtes bienvenu et reconnu en continuité pour la vie. Plus encore, ce show de la vie souhaite votre présence, votre animation, votre sens du spectacle pour rendre plus efficace ses attractions et montrer aux alentours que cette vie est bien vivante pleine de gens comme vous. L’appel n’y est pas obligatoire. Il est émulatoire. Sans vous, sans moi il n’y a pas de show, pas de partage, pas de redistribution : rien que des individus repliés et en quête impossible d’une jouissance personnelle, alors que nous avons biologiquement besoin de société, dans le grand zoo humain. Comme le dit Peter Sloterdijk, dont nous sommes les pensionnaires. Caste zoo aménagée par la nature et par nous nous offrant de multiples combinaisons d’envisager notre animalité évoluée. Nous pouvons happer la bouillie commune dans la mangeoire centrale, ou nous pouvons grimper tout seul dénicher la subtile noisette. Nous pouvons varier nos comportements, rencontrer d’autres profils, essayer des nouveautés. Nous y sommes seuls à décider quelle sera notre orientation du jour, sur la base inchangeable de ce que nous sommes déjà, ce que nous savons, ce que nous voulons. La base sécuritaire du parc humain est assurée, ne nous laissant pas grand risque de nous y égarer. L’équilibre instable, mais en tout cas toujours en construction, est assuré par l’ensemble des indigènes modulant leurs velléités de façon qu’harmonie minimale règne. Sauf en des moments de l’histoire, passée, présente, au demeurant plutôt calme, future dont on ne sait, où une alchimie sociale a formée des bulles de haine de l’autre, d’agressivité et de volonté d’anéantir l’ennemi et de s’accaparer ses richesses et son territoire. Ce sont des paroxysmes que le bon sens commun regrette et rejette dans une formulation audacieuse de « plus jamais çà » car elle n’est prononcé que dans un moment apaisé. Les vents peuvent tourner et justifier le genre humain de prendre ce qu’il croit être les bonnes mesures de survie, voire simplement de bien-être du moment. Notre époque excelle dans cette prise en main rétrospective de tout ce qu’elle considère comme les erreurs du passé. La collecte des archives de l’histoire, de la géographie, de l’ethnologie, de la sociologie permet de tout savoir sur tout et de le comparer. L’exercice en serait formidable si nous avions capacité d’en être extra…terrestre c'est-à-dire n’ayant aucun trait commun avec les personnages dont nous visitons à rebours les comportements. Il n’est pas compliqué à comprendre, aujourd’hui, que la terre tourne autour du soleil, que le QI d’un homme noir dans le même parc humain est égal au QI d’un homme blanc. Facile aujourd’hui parce que des faits observables et répétitifs, ainsi que s’appelle la science, nous permettent d’être sûrs. Mais la même science ne nous donne aucun instrument d’introspection du cerveau de celui qui il y a 400 ans voyait la terre au centre de l’univers, et de l’homme blanc supérieur à l’homme noir. Que savons-nous même aujourd’hui de celui d’hier que nous jugeons avec une conscience de l’universel dont nous serions enfin dotés ? Quels actes en cours, en notre début de XXIème siècle seront ces œuvres à jamais universelles, dont nous prétendons être les grands prêtres devenus infaillibles. Notre idéologie du bien fondé de notre universalisme n’est pas aussi inquisitoire dans les méthodes barbares pour faire renier les fois infidèles ;  mais elle utilise le réseau mondial de la bien pensance de manière totalitaire, c'est-à-dire sans alternative à toute autre possibilité de vérité. A y bien regarder cette omnibulation, d’être enfin arrivé au moment vérité de son histoire, pousse l’homme à une fatuité et une démesure. Jamais, aux pires moments de leurs affrontements, les hommes n’ont eu un tel pouvoir de coercition du genre humain, de leurs contemporains. A travers deux faits n’étant jamais encore arrivés : l’instantanéité de l’information, l’automatisation des tâches. Ce sont là deux paradigmes auxquels l’homme rêvait depuis peut-être le jardin d’Eden et qui ne lui sont désormais plus défendus. Car cela se concrétise en vie concrète de tous les jours : la possibilité de tout savoir et de ne plus avoir à faire quoi que ce soit, pénible ou loisir, car l’automatisation peut coordonner toute seule notre circuit désireux de plaisir. Que la description ne donne pas le vertige apocalyptique ; car ne tombe dedans que celui ou celle qui abandonne son moi. Ce n’est pas une question de croquer ou non le fruit soi-disant défendu mais question de savoir ce que l’on veut soi-même manger. Que le progrès et ses exponentielles possibilités courent côte à côte de nous ne nous donnent aucune obligation de tout y prendre, de tout y donner, d’y signer un blanc-seing. L’instantanéité et l’automatisation sont des disponibilités, des opportunités, se présentant à nous comme des champs d’agriculture du possible que nous ensemençons, travaillons, récoltons selon notre méthode personnelle de nous « cultiver ». Certes des parties communes de la vie sociétale nous contraignent, mais après nous avoir convaincu, qu’une carte de santé Vitale, instantanée de lecture et automatique de mémoire de notre état, est le moyen le plus performant pour confier notre, ce qui en reste, notre moi individuel à la médecine. A l’opposé l’insertion sous cutanée d’une puce électronique, qui signalerait partout instantanément et automatiquement notre présence, est un moyen déclinant précipitant la réduction de notre périmètre individuel. La question qui nous titille chaque jour est celle que nous propose le progrès. Des masses de données s’échangent, venues de toutes les parties du monde, augmentées de toutes les intelligences de la terre, boostées par l’appétit entrepreneurial et financier de start-up mobilisées en quart de tour pour être revendues encore dix fois plus vite et cent fois plus chères. Le mouvement perpétuel nous titille sollicite comme l’aiguille des secondes d’une montre qui nous demanderait « veux-tu monter avec moi car tu seras un segment de minute plus loin soixante secondes après ». Que sommes-nous pour nous sentir obligés de monter à bord de cette aiguille, de ce train dont nous ne savons jamais à priori que il est d’abord en mouvement ? La question du progrès doit d’abord venir se poser calmement à la conscience éveillée de chacun de nous, dans une interrogation personnelle ne craignant pas d’y répondre à contre courant des autres répondants. Le progrès doit savoir nous séduire avec des propositions appropriées à ce que nous sommes, et à ce que nous aspirons d’être ou de faire.  On ne donne pas à manger de la même façon à deux corpulences différentes. Notre appétit ou notre retenue n’a pas à être ignorés par la grosse machine. La question simple et de réponse rapide est donc celle d’avoir envie, le désir, puis éventuellement d’avoir besoin, la nécessité, de cette avancée du progrès qui vient me solliciter. On peut donc faire confiance à notre filtre du désir pour mettre en avant, de manière subjective et objective, ce que nous voulons et ce que nous pouvons. Si nous désirons quelque chose, cela ne peut être à long terme mauvais pour nous. Si le progrès nous permet la satisfaction ou la voie vers cette satisfaction, il faut lui répondre de bon cœur « banco ». Si nous ne désirons pas quelque chose cela est forcément un élément exogène, c'est-à-dire étranger à nous, qui sera toujours en parallèle, voire plus, en opposition à nous. Notre corps et notre esprit vivront en territoire corps physique ennemi, source de  confrontation, de clash, de défaite, d’anéantissement définitif de notre individualité, définitivement asservie à ce progrès auquel nous n’aurons pas su dire non dès le départ. Le progrès n’y est pour rien et n’a même pas l’esprit de gagner ou en compter ses points de victoire ou de défaite. Il n’aura fait que remplir notre vide, qui ne voulait plus réfléchir et faire ses choix de vie, et qui s’est laissé persuader que ce qui était instantané et automatique lui enlèverait le risque de ne pas savoir lui-même et de se tromper tout seul. Le progrès aura réussi à déshumaniser l’homme, être pensant et décideur. Il n’y aurait plus alors d’individus mais seulement une masse purée écrasée de tous les individus, ensaucés par la suavité d’un progrès que les individus, amputés du don de saveur, ne pourront même plus apprécier. Avant cela les antidotes et contrefeux de nos intelligences individuelles, et aussi de nos autodéfenses instinctives, ne vont pas se laisser faire. L’anti-progrès se manifeste épars et désordonné en mouvement de décroissance, de new âge, de créationnisme, de manif pour tous, de tout enfin de ce qui fait obstacle à la démesure de la grosse machine sur l’autoroute matérialiste que nous lui laissons. Ce sont autant de petits grains de sable, bien contestables sur le fond de leurs convictions, mais bien utiles sur la forme de leurs résistances. Ils sont numériquement peu nombreux mais leur cri fait attraction dans un monde se cherchant de toute façon distraction. C’est là un point sensible de vulnérabilité de nos sociétés de l’instantané et de l’automatisme – ici le grégarisme ou mouvement moutonnier – où tout ce qui bouge devient attractivité pour ceux qui n’osent pas bouger. Il y a là comme un fascisme du scoop, une prise en otage des opinions, qui se laissent faire par celui qui veut faire parler de lui. Rien n’aura jamais été plus facile. La démocratie d’opinion encourage ces émergences de points de vue parmi lesquels se solidifient, par de vrais arguments, des détails de vraies causes. Personnellement j’apprécie ceux qui s’expriment : leurs sensibilités et leurs expressions  tissent un bout de notre étoffe commune. A moi, comme pour le progrès, de savoir ce qui m’en fait, ce que j’en fais, quelles sont mes convergences, mes divergences. Avec  quand même une distance pour respecter l’activisme que je n’ai souvent pas. « Je ne suis pas d’accord avec vos idées » disait Voltaire « mais je me battrai pour que toujours vous puissiez les exprimer ». Ma condition d’écoute de ceux qui s’expriment est la sincérité de leur expression. Je crois que l’on peut dire ce que l’on veut si on le pense. Du moins au moment où l’on le pense et le dit. Un monde de menteurs n’est jouable que si tout le monde ment ; sinon il y a rapidement des vainqueurs et des vaincus menant fin à la partie. L’expression sincère n’est rien d’autre que le souffle intime venant du profond de l’individu. Cette part de l’humanité, puisque chaque individu la compose, est forcément quelque chose de juste pour celui qui l’exprime, et quelque chose de sincère pour celui qui l’entend. On ne se trompe jamais lorsque l’on se met dans le réseau des sincérités exprimées du monde. Les lieux communs, d’adage populaire, selon lesquels « tout vérité n’est pas bonne à dire ou à entendre » ou que « il ne faut pas tout dire »  ne sont que des conventions de société respectables dans l’échange courtois, pour ne pas choquer ou tuer la vulnérabilité de l’autre. Mais leur absolu n’est pas vrai : il faut organiser le circuit de l’émergence de la vérité des faits, du pourquoi des idées et des comportements. Les retarder est faire acte élitiste de savants sur-ignorants destinés à le rester. La diffusion a pour but de mettre de mettre en connaissance l’humanité pour que des informations existent sur son sort et sur son devenir, que ce soit dans le domaine collectif ou individuel, et qu’il est loisible à chacun de chercher ce qui lui est sensible, de compulser les moyens dont il pourrait avoir besoin, de proposer ses propres idées à la manière des groupes activistes ou interventionnistes, mais cette fois de manière individuelle. Le Progrès, que je choisis quant à moi et entre autres, c’est de participer au melting pot de la connaissance. De la parole qui circule, avec une volonté contributive de construction d’un meilleur soi et d’un meilleur grand tous les autres, ne peut sortir que la bonne idée. Car chacun, ayant écouté puis donné la sienne, ressent le double savoir d’avoir été, premièrement individuellement respecté, et, deuxièmement, collectivement utilisé. L’apparition de nos différents nous-mêmes, dans cette démocratie participative, soulève le sarcasme de ceux qui n’y croient pas et qui y voient le danger de trop en dire sur une existence qui ne serait que fatalisme. Leur méfiance est le contraire de la connaissance dont ils ont fait l’étude et dont ils se prévalent pour maintenir leur contrôle sur la société. Il est paradoxal qu’il faille entendre des voix fluettes de gens simples, disant que plus ils savent plus ils voient qu’ils ne savent rien, ou de gens génies comme Albert Einstein prouvant scientifiquement la relativité de toutes les connaissances. La connaissance n’est qu’un chemin pour aller vers d’autres connaissances qui ne sont pas dans une pyramide ascensionnelle, du moins au plus intelligent. La connaissance se sème et s’essaime au vent pour être recueillie par n’importe quel manant ayant la simple curiosité, le simple désir, d’y tendre sa main. La connaissance se retisse et se distend à tous les instants et par tous les participants de la vie. Personne ne vous accusera, ou même ne vous jugera, d’être curieux, d’avoir le désir à vif. Et ceci est bien un remarquable progrès de l’ordre du spirituel, mais aussi maintenant de la communication instantanée, que de rendre l’homme libre de savoir et de pouvoir entreprendre sur le champ bien nommé, son entreprise de culture et de moisson. L’incitation ne peut en être institutionnelle. Un gouvernement ne sachant plus quoi dire d’autres, que de rejeter aux gens d’avoir des idées, est un pouvoir qui aurait lui-même boucher les routes du désir auparavant et qui demanderait  ensuite aux emmurés de creuser leur propre escapade ; sans plus d’outils que leur bonne foi car il n’y a plus d’argent pour se donner des  moyens. L’aveu d’impuissance ou de désastre n’est final que pour ce roi devenu nu. Ceux à qui l’on dit, pour finir, ne croyez qu’en vous, ont au moins l’avantage d’un discours clair : ils ne s’en sortiront que par eux-mêmes ! Bien sur on aurait pu nous le dire plus tôt, verre à moitié plein, mais aussi aurait-ce pu être plus tard, verre à moitié vide. La lucidité n’attend pas son heure ! La lamentation n’étant plus de mise, puisque nous voila prévenu qu’il n’y aura plus personne pour éponger nos larmes, il ne reste qu’à retrousser ses manches. Que de moments de vie à jamais promis à damnation se sont relevés par le courage des hommes. Et que de ces moments d’effort deviennent souvenirs futurs de bons moments individuellement vécus. Parce qu’il a été fait appel à la lucidité, au courage, à l’effort, à la solidarité, à la satisfaction du résultat. L’expérience ne peut être reprogrammée pour que se renouvelle ce cycle de bonheur individuellement vécu par chacun. «  Une bonne guerre », disait-on autrefois, pour remettre tout à plat dans le sens de l’effort, ne nous reconstruirait pas du tout. Nous avons introduit dans notre schéma des connaissances humaines et géopolitiques nous faisant haïr au fond de nous même l’élimination de l’autre. La suppression de la peine de mort est une composante de notre mentalité. Nous avançons comme une marée qui se retire de certains oripeaux mais nous ramène d’autres composantes. Nous en ignorons le bienfait ou la nuisance. La tentation nous les fait saliver. Nous goûterions d’aucun et en rejetterions d’autres. Et nous en serons jugés assassins ou bienfaiteurs par nos descendances, à la lumière de tout ce qu’ils sauront exhaustivement de nous, alors que sur le tarmac de notre vie nous ne voyons que nos décollages et atterrissages sans bien comprendre le plan de vol. Tout n’est pas maîtrisable ; notamment ces tendances systèmes d’instantanéité et d’automatisme qui surpassent en vitesse et en mémoire toutes nos capacités. Pour autant cette supériorité de vélocité ne donne au progrès aucun droit hiérarchique sur nos vies et en tout cas sur la mienne. Je n’ai même pas le besoin de me retrancher dans une conception créationniste d’être homme ou femme conceptuellement à jamais supérieur. Qu’en sais-je ? Ce que je sais des univers,  puisque l’on sait qu’il y en aurait jusqu’à sept dont le nôtre, laisse penser que tout ceci n’existe pas pour rien. L’exploration actuelle, si j’ai bien compris, teste l’existence d’air et d’eau pour déduire ensuite qu’il y ait trace ou possibilités de vie. Rien n’est à être comparé ou projeté. Ce qui existe a sa raison d’exister, et, je m’en tiens là, prêt à accueillir les formes de comportement de ces existences. Supérieur ou inférieur être humain là dedans n’est pas mon problème. Mon seul réflexe est de me préparer à une cohabitation quelque soit l’état dans lequel je serai transporté par ces mutations. Entretemps l’ici et maintenant n’en est que plus urgent à être saisi lorsqu’on sent monter en soi l’appel du désir. Songeons au ridicule que sera notre réticence lorsque les grands chamboulements arriveront. Et ce n’est pas catastrophisme de l’envisager car des évolutions ont déjà bien eu lieu en permettant à l’homme de s’y adapter ; avec en plus aujourd’hui la surmultiplication de la révolution industrielle déjà passée et de l’explosion numérique encore en plein boom. Le ridicule est bien de se cramponner à une peur de soi quand on se refuse à toutes les opportunités de la vie autour de nous. Pourquoi ne pas saisir l’opportunité d’un bout de voyage terrestre et connu bien ensemble alors que demain peut arriver les plus étranges phénomènes imprévisibles, indescriptibles mais dans lesquels on sera obligés de vivre. En ce sens  l’obligation de bon sens de vivre son présent est acte d’humilité ; acte d’acceptation de sa condition dans sa composante rayonnante malgré vous. J’en veux aux gens qui ne savent pas se laisser vivre, ou plutôt, ne pas laisser vivre leur rayonnement potentiel. Ils sont nombre, lestant le navire de l’humanité, l’empêchant d’y être en plein vent. La tolérance m’oblige en tant que pensée à les y laisser peser de leur poids ; mais la connaissance, de la mécanique des fluides, me permet de constater leur incapacité d’efficience dans le grand parc humain. La remarque qu’il faut de tout  pour faire un monde est une remarque que tractent les actifs bien obligés à tolérer les passifs. L’inégalité de rôle ne me gêne pas dans la mesure  où je n’ai pas choisi moi-même mon profil de casting. Je ne vais que là où mon désir m’appelle, que vers là où je sens que la pièce de théâtre va être bonne et que je peux m’y éclater et rayonner sur les spectateurs, fussent-ils tant pis de la remorque à la traine. Fort heureusement on a encore le droit d’être ce que l’on est ou envie d’être. A se demander d’ailleurs si l’équilibre du monde, en constant ajustement, ne compte pas implicitement sur la complémentarité des rôles distribués même s’ils s’avèrent contraires. Rendant plus juste qu’il faille de tout pour faire un monde. Alors serait mal à propos mon incantation à vouloir faire bouger les choses qui ne veulent pas bouger, à vouloir ouvrir au désir celui qui ne veut pas désirer, à décoincer le conventionné social qui aime bien son carcan. Oui, il ne faut pas forcer à boire un âne qui n’a pas soif ; mais il faut préalablement indiquer où il y a de l’eau. Il est plein de désirs et de destins inassouvis parce que les prétendants se croient pour toujours dans des trajectoires sans issue. N’importe quel être humain doit savoir qu’existe en lui une fenêtre, voire un tout petit hublot ou même un périscope, lui montrant un monde de possible. Ainsi le cheminement en cours de la pensée me fait douter d’une assertion que j’aime. J’aime partager ce que je crois de la disponibilité que nous devons avoir à la vie, telle qu’elle se présente, dans des circonstances où j’en suis le premier témoin. J’estime ne pas pouvoir faire autrement, instinctivement et avant le raisonnement, que de me présenter à elle, la vie, et de lui proposer d’être à sa disposition si elle veut bien de moi. Prosaïquement, si quelque chose traine sur la table ou dans la cour, je ne me pose pas la question de qui et à qui en incombe la faute ou responsabilité. J’y coure, j’y vis. La tâche est faite. On passe à autre chose sans gloriole pour soi et sans rancune pour ceux qui auraient dû mais n’ont pas fait. Je m’interroge maintenant sur le bien fondé de proposer à tous ce genre de réflexe.La désynchronisation de nos tempos nous donne deux optiques différentes de la même situation. La mienne est-elle mieux que la tienne ? Autrefois je l’aurais cru. Mais aujourd’hui, je remercie, non de respecter l’autre point de vue, mais de me le faire apprécier comme si j’avais la possibilité d’être dans ta tête de l’autre , dans les neurones ou synapses de sa sensibilité. Au point de pouvoir honnêtement me transporter dans un « si j’étais Elle, si j’étais Lui » je percevrai ainsi. C’est un long chemin que de rentrer dans le psychisme de l’autre sans volonté de jugement et encore moins tentative de le changer. Nous parvenons souvent à des situations fusionnelles avec les nôtres, avec mon épouse, mes enfants, mes amis, mes relations professionnelles ou sociales, mon entourage qui nous- en tous cas moi – font croire que nous sommes arrivés à un point définitif d’assemblage avec l’autre. Que nous sommes dans l’autre. Que l’autre est en nous. Avec la tentation auto-réalisatrice de s’en prononcer des promesses de non retour, de fusion totale de nos matières comme si de deux ou plusieurs entités nous n’en soyons plus qu’une. Tout naturellement, et sans aucune attitude dominatrice de l’un vers l’autre. Jusqu’à ce que tout à coup, patatras, la construction solide et unique que nous étions s’étiole et s’écroule devenant château de cartes à terre dont nous nous empressons en réflexe pavlovien de reprendre vite fait les nôtres. Écœurante situation mais réaliste en ce qui me concerne. Constat d’une espèce d’élastique qui me fait revenir à moi ce qui est mien. Impossible d’éradiquer ce sentiment de quant à soi ! C’est un besoin d’autodéfense sur ce qui nous reste pour vivre avant un désir de vision sereine de l’avenir. Je laisse les cartes à terre. Je ne les reprends pas. Je redistribue les rôles et les jeux de chacun, dans une nuance que la construction ne s’est pas écroulée par les secousses conjuguées et en bataille de toutes les parties en présence. Toutes les parties y ont leur responsabilité, leur constat, leur désir sans doute de ne pas en rester là, de repartir sur la route, d’espérer le nouvel appel que, par nature de répondre toujours à l’appel de l’événement, je saisirai le premier. La faculté de l’homme de reprendre ses cartes à terre, de les redistribuer et de se recentrer dans la partie est étonnante. Il me vient toujours la comparaison avec une machine, une photocopieuse par exemple, qui lorsqu’elle se coince est définitivement bloquée et dont on vous dit même qu’il vaut mieux la changer. On ne change pas l’homme. Encore que la culture de cellules souches ou l’insertion d’implants revient à des minis clonages d’une partie de notre matériel humain. Mais dans ce qui est l’Homme global nous ne changeons pas. Nous trouvons en nous-mêmes notre nouveau départ. Une injonction instinctive nous commande de ne pas nous laisser abattre. Etrange phénomène d’un point de vue mécanique car il va à contre sens de la logique, de la prévisibilité, et même parfois de l’esprit y compris le nôtre. Notre désespérance se heurte souvent à notre résistance malgré nous à devoir et vouloir vivre. Ce ressort est compliqué à comprendre dans le fonctionnement de notre individualité que nous croyons plénipotentiaire pour gérer les entrées et les sorties, librement, de nos affects. Ici intervient une grande ramasseuse de nos sentiments pour les diriger vers une non moins grande trieuse. Que fait-on de nous lorsque nous ne voulons plus nous occuper de nous ? Comment temporiser le négatif et survaloriser le positif ? Ainsi se passe notre cycle de redémarrage qui n’a besoin de notre part que d’une seule chose : que nous ne nous opposions pas en lui. En ce sens le mot volonté d’en finir est réellement un volontarisme de notre part alors que se laisser mourir n’a que très peu de chances de nous survenir. Les périmètres de notre individu sont à la fois une conduite manuelle dans laquelle nous intervenons en accélération et freinage, selon nos paysages rencontrés et notre tempérament d’en profiter ; et une conduite en boîte automatique, dans laquelle l’instinct prend soin de nous ; soit parce que la situation n’a pas un spécifique besoin de notre doigté, soit parce que notre fatigue nous met en absence de la réalité. Point besoin de se sentir coupable, parce que passif, en laissant sa conduite de vie en automatique. Cela est moins passionnant et moins donnant de retour sur un investissement personnel que nous ne fournissons pas. Mais les variations de nos cycles nous font passer de situations passives à situations actives. Il n’y faut que le respect de notre individu, que la considération de notre droit à n’être pas machine, à performance linéaire, mais être humain à variation progressive ou dégressive. Nous sommes en position d’individu alternatif subissant les modulations de notre environnement interne et externe. Position qui n’est pas bien comprise par un air du temps qui se veut linéaire, à performance non seulement constante mais toujours en croissance. A l’instar de l’économie des biens que l’on veut toujours, d’un mois à l’autre ou d’une année à l’autre, plus de consommateurs engendrant en amont plus de production alimentée elle-même par plus d’emplois y œuvrant, ou plus de capitaux s’y rémunérant. Cette courbe ascendante porte déjà en elle-même, géométriquement parlant, son point de déséquilibre comme un arbre qui monterait jusqu’au ciel avec toujours à sa base les mêmes racines. L’économie des biens est de toute façon un autre domaine que l’économie de nos ressorts spirituels. Même s’il est incongru d’employer le mot monétaire économie, s’agissant presque de l’âme, il faut se rappeler que économie signifie le cycle, le parcours, le transit qu’effectue une chose ou une donnée. L’être humain n’échappe pas à ce processus au demeurant fort respectable, où l’on voit clairement les entrées, les étapes et les sorties de ce qui nous motivent ; de même que dans l’économie des biens où l’on part d’une matière première pour aboutir à une valeur ajoutée. La différence, énorme différence, est que notre économie de l’âme, expression voulument parlante, n’a de compte à rendre à personne ; elle ne s’apprécie à la hausse ou à la baisse d’aucune salle de marché boursière du monde. La valeur ajoutée, car il y en a une très belle, est celle que nos efforts individuels vont mettre dans le travail sur nous même et avec les autres, pour que notre comportement fluidifie la marche et l’état du monde. La comparaison de l’économie des biens et l’économie des individus n’a donc pas les mêmes critères de bien aller. Un état satisfaisant de notre individu n’est pas le résultat d’une croissance spécifique d’un état x à un état y. Notre mutation est une globalité, comme celle d’un gros navire qui s’amarre doucement à son nouveau point d’ancrage. Nous n’avons pas à y constater de bénéfice segmenté d’un bilan parcellaire. C’est toute notre vie qui s’inscrit dans la poursuite de notre serpentin, si possible sans rupture ni à-coup. Se découvrir en fonctionnement machine a ses limites ; lesquelles sont d’ailleurs nouvelles puisque les civilisations précédentes n’avaient pas de machines auxquelles se comparer et s’étalonner. Que sera demain lorsqu’on, pas moi mais d’autres surement, se mesurera aux technologies numériques et automatiques dont nous sommes à performances identiques déjà largement dépassés. Signe de plus, s’il en fallait, que notre individu n’a pas à jouer dans cette catégorie de jeu homme-machine, homme-technologie, homme-surhomme et pourquoi pas homme-extraterrestre. Nous ne pouvons jouer que notre jeu dont nous essayons de connaitre cartes et dessous des cartes. Le progrès nous sollicitera toujours en qualité de consommateur. On a déjà commenté qu’il faut y répondre par le désir bien pensé et non par le besoin imposé. Avec le progrès, et non dans le progrès, me parait être la position équilibrée de l’individu : sur la selle tenant les rênes et non dans le cheval fou dont on devient fou soi-même. Ce qui ne veut pas dire choisir son progrès, à la carte, dans une exigence de variétés de possibilités rendant le travail en cuisine impossible pour satisfaire tout le monde. Mais prendre dans le progrès l’onction personnelle qui va nous permettre d’éviter telle corvée et au contraire de développer telle opportunité.  Ce picorage, dans le lot commun de l’économie de biens, maintient de nous un rôle d’arbitre et de déterminant du progrès lequel s’alimente de nos choix pour orienter son avenir. Il n’est jamais assez fou pour s’engager seul dans une voix dont il ne susciterait pas de suiveurs. C’est donc par une participation active, consciente, clairement décisionnelle de notre individualité, et aussi modeste voulons nous l’être, que le progrès sera intelligent et utile à nous et aux autres. L’inexorable propension du progrès, à poursuivre sa course sans notre consentement, doit être arrêté par le moyen bien simple de ne plus lui donner le combustible de notre participation passive ou irraisonnée. Même si nous restons théoriquement libres d’adopter ou de rejeter ce qui nous est bon ou mauvais, un progrès que nous n’arrêtons pas, alors que l’on dit que l’on n’arrête pas le progrès, devient une gangrène globale s’insinuant par tous les pores de notre peau collée au monde. Ne pas dire non c’est accepter d’être envahi de progrès auxquels nous n’avons pas dit oui. Par effet de masse, et de majorité active ou passive, des effets matériels deviennent des faits de société s’imposant comme évidence irréversible dans nos vies. L’air du temps qualifie de réaction, à moralisme négatif, ce qui s’oppose à ces évolutions. Pourtant il ne s’agit que de processus de décision dans lesquelles la moralité n’a rien à voir. Le raisonnement revient chez moi à l’individu. Est-il oui ou non questionné, concerné, informé sur ce qui se met en place ? Le combat est épique, entre individu dont on a souligné que sa force est de se revendiquer 1 seul et unique alors que sa faiblesse est de n’être que 1, face à une masse dont la lecture des désirs individuels, parce que cumulés, est impossible. Alors, on lit l’état de la masse, par l’idéologie du moment synthèse de lieux,  ou de sens supposés communs mais argumentés subjectivement par des esprits de synthèse se croyant mieux éclairés que l’individu de l’ombre. De gigantesques  faits de société sont ainsi vus à l’envers ou à l’endroit, côté face ou pile, sans considération qu’il ne s’agit que d’une seule pièce de monnaie, d’un même problème qui ne peut avoir deux visages même si on veut y mettre deux appréciations. Prétendre qu’une vue face serait concrète et l’autre pile serait abstraite raccourcit trop ; car ce qui nourrit les arguments abstraits ont leur part d’utilité pour éclairer un concret trop brut, trop ponctuel, pas assez relativisé par les tenants et les aboutissants. Côté pile et concret l’écoute quotidienne des suites de la votation suisse rejetant l’immigration est révélatrice de ce qu’un peuple a réellement choisi à 50,3 %. Les intentions exprimées sont sans ambages, les conséquences sont immédiates, la révélation de ce que pensent les peuples ici et ailleurs est criante de vérité…que le côté face et abstrait ne peut pas ne pas reconnaître. Un déni d’une votation qui heureusement, dixit ose-t-il dire, n’existe pas ailleurs. A l’interprétation différente ou au rejet des votants les analyses essaient de sauver leur peau de classe à penser, idéologie, pour les autres. Pourtant il n’y a point drame à regarder la vérité physique et visuelle de l’envahissement des espaces par des cultures exogènes et intrusives. C’est le droit de chacun, en tant qu’individu, de choisir, sur quel trottoir de la rue il veut se promener et quelles rencontres il veut y faire ; s’il est à priori chez lui et qu’il y est consulté, votation, sur le genre de vie qu’il souhaite. Il est sain que soit exprimé par le vote, dans sa neutralité arithmétique, ce qui est vécu quotidiennement dans la méfiance, la haine, voire la violence. L’expression du ressenti permet au contraire de prendre le sentiment, fut-il de xénophobie à sa racine, pour qu’il n’y pousse pas de branches de rupture et de menace. Le côté face abstrait vit l’expression populaire comme un affront personnel qui lui serait fait d’une éducation et d’une moralité, dont elle serait possesseur, et que l’individu du peuple ne voudrait pas. Il faudrait que l’élite ne se considère comme plus haute, que pour le temps et les outils dont elle dispose pour analyser en profondeur et proposer pragmatiquement des solutions. Je demande à l’expert, au savant, au sociologue, au politique de décortiquer les soubresauts de la société mais non de la juger et de lui asséner diagnostic et médicament qui ne sont pas fait pour son cas qu’elle refuse de voir réellement. Le déni des élites est un véritable problème, voire une grenade qui se dégoupille sous la pression des autres moyens de savoir qui ne passent plus par cette élite. La diffusion horizontale déculpabilise de n’être pas de l’élite, de ne pas avoir les buts ascensionnels habituels qui prévenaient l’élite du parcours de chacun. L’éclatement de l’univers de l’information pulvérise le jeu de rôles attribués jusqu’ici. L’élite s’accroche en règle de jeu inégale puisqu’elle a l’immunité de l’institution. Les individus vitupèrent, s’indigent, se dispersent, se regroupent mais en tout cas bougent. Signes de vie que pourraient en plus irriguer le rappel à chacun qu’il  peut être lui, qu’il peut désirer et vouloir, qu’il peut pouvoir, avec la conduite simple de se considérer en priorité, utile à une collectivité, dont il retire efficacité pour se reconstruire. Quoi qu’il arrive, et plus spécialement nous arrive, il y a au bout du problème posé une finalité bien simple : Nous. Notre individu. Le moi, en bout de course que je suis, est le butoir au-delà duquel la machine infernale ne peut pas foncer plus loin. A l’image des grandes gares où les quais perpendiculaires d’arrivée  se meurent à une unique grande plateforme. Chaque rail arrête sa course à un énorme buttoir sur lequel viendront s’amortir les deux tampons du convoi forcé de finir son voyage. La comparaison me va bien par rapport à tous les événements de la vie qui ne peuvent aller plus loin que mon moi à moins que de vouloir me tuer. Au-delà de moi il n’y a plus de moi. Il n’y a que corps désincarné, esprit décervelé dont on a vu l’analyse expérimentale dans des régimes totalitaires véritablement inhumains. Mais dans le cadre habituel du traitement que subit l’individu, il y a, de reconnaissance mutuelle des éventuels agresseurs et agressé, une ligne finale étanche que l’on ne peut franchir ou violer : notre intime individualité. Quoique nous soyons, quoique nous fassions dans le cadre des règles ou lois acceptées de part et d’autre, nous sommes dans le droit de notre individu. Ce périmètre ultime de nous est comme un petit lopin de terre retranché où nous pouvons, comme au jeu de chat perché, dire « pouce », je suis protégé. La poésie du lieu n’est pas ma  source d’inspiration du moment. Ce qui est intéressant c’est la stratégie de repli ou d’attaque que ce rempart nous permet d’avoir. Par comparaison, les machines n’ont pas cette sauvegarde. Parfois elles ont une boîte noire d’enregistrement mais ce n’est qu’un constat tardif. Nous, nous disposons d’un poste de ressaisie et de combat actif. La seule condition d’accès est que nous nous conformions à des règles de sincérité pour en ouvrir la seule et bonne porte ; parce qu’il s’agit de la porte de notre profond nous-mêmes. Il s’agit presque d’un code de sécurité où notre seul iris de l’œil, ou notre empreinte digitale, peut nous faire reconnaitre de notre vrai nous. Ce seuil franchi nous ouvre le cocon de notre espace, de notre bulle, de notre retour, avec bagages, à nos origines. L’osmose qui s’y crée, entre nos expériences extérieures ramenées et notre sédimentation intérieure enrichie, provoque protection et chaleur. Nous sommes à l’abri. Personne ne peut nous y faire de mal. La porte s’est refermée, car aucun autre que nous ne pourrait y montrer patte blanche pour nous y rejoindre même avec les meilleures intentions. Mais il ne faudrait pas que trop de mots abstraits m’écartent du mode d’emploi basique et pratique de cet outil. Savoir, que nous avons toujours à notre disposition un lieu qui nous fera du bien est une assurance tous risques propice justement à nous faire prendre tous les risques. Savoir que la fatalité, la méchanceté ou le mauvais sort ne peuvent être plus intrusif, que dans notre périmètre social, est une ressource pour ne pas avoir peur d’autrui. Concrètement, lorsqu’il m’arrive d’être seul contre tous, ou à contre courant d’un mouvement de foule, ou en idée individuelle opposée à une idéologie collective, ou à un constat de mon petit David contre le Goliath de la puissance institutionnelle : à tous ces moments d’acculement où le doute vous prend d’être ridiculement isolé je pense à cet abri en moi. Je m’interroge sur la question de la justesse et de la pureté qui me rend solitaire. Ai-je les bonnes informations ? Me suis-je correctement baladé dans le raisonnement honnête de causes à effets ? Mon audace ne flatte-t-elle pas mon outrance, à être preux chevalier se faisant plaisir tant pour le paraitre chez l’autre que pour son être chez lui ? Si au bout de ces questions pointues, entre mon moi osant et mon moi vécu, il y a affirmation sincère de mon engouement il n’y a pas de raison de changer d’avis. L’argument d’être minoritaire  dans une cause n’est pas pertinent ; et encore plus quand cette cause est personnelle. Nous seuls aurons à gérer les répercussions de nos orientations seuls contre tous. Avec effet boomerang bien sur immédiat, qu’il ne faut pas attendre secours des autres après avoir fait le contraire de ce qu’ils nous préconisaient. Seul n’est pas forcément une stratégie gagnante dans un champ de victoire ou de défaite. En matière de combat replié sur son individu il nous faut reparamétrer ces notions quantitatives gagnant-perdant dans une échelle de valeur où il n’y a plus de points sur notre permis de vivre. Il n’y a que nous, avec nos bonnes décisions ; car elles ne peuvent être que bonnes puisque venant et retournant à nous. Non point que tout ce que nous fassions soit bien ; mais, dés lors que sorties de chez nous, nos actions deviennent des acquis dont nous ne pouvons pas nous débarrasser, dont nous devons être solidaires dans une fierté bien placée qu’elles font désormais partie de nous. La société dira de nous que nous sommes imbus de nous-mêmes parce que nous incorporons en effet en nous les traces de nous-mêmes. Etre plein de soi de soi est au contraire acte responsable de contenance, pour assumer ses actes et ses pensées dans une sincérité linéaire de vie. Qu’importe la variété des comportements de nos contemporains si nous sommes assurés qu’ils assument leurs actes. A nous d’en profiter ou de nous en prévenir. Celui au contraire qui change expressément, par tactique de l’intrigue, est quelqu’un qui nous trouble et nous ment pour que ses actes forcent notre consentement surpris. Point de refuge ultime d’ailleurs pour le tricheur ou le menteur incapable qu’il est de savoir qui et quand il est vrai ou faux. Sa course devient un perpétuel exercice d’enfumage de ses interlocuteurs. Sa vie, pour respectable que l’on doive garder distance et empathie à autrui, n’est pas celle que l’on décrit avec faveur ici. Le moi intéressant est celui qui ne triche pas. Menteur ou tricheur n’ont aucun autre besoin de trucs pour améliorer leur vie que de faire dire à chaque instant ce qui leur est le plus favorable, que ce soit vrai ou faux. Celui qui ne ment ni ne triche pratique un exercice hautement attractif pour lui-même d’abord. Le fait qu’il soit toujours vrai et crédible, pour son extérieur environnement, est secondaire dans le plaisir à se comporter net. Le besoin et la tentation de tricher-mentir vient à lui comme à tout un chacun. Nous sommes constamment sollicités à devoir répondre, justifier, prouver, excuser. L’interpellation constante, à nos devoirs ou à notre gentillesse, peut s’avérer épuisante au point de trouver normal que nous y trouvions échappatoire. A l’impossible nul n’est tenu après tout. Ne pas prendre un coup de fil est anodin, si l’on n’y voit qu’un envahissement à arrêter de notre espace. Mais ne pas imaginer,  que le correspondant  qui nous appelle avait un besoin de nous parler, devient un égoïsme, une insociabilité ; d’autant plus si on s’en justifie de ne pas avoir entendu la sonnerie ce qui devient mensonge. Le virus sournois commence dans les petits détails. Parler d’un livre ou d’un film que l’on n’a pas lu ou vu c’est porter un message falsifié à autrui. Nous avons des milliers d’occasions de nous taire ou d’en parler autrement. Il me semble possible de parler abondamment de tout et de rien en n’en disant que le strict de ce que nous en savons qui est souvent déjà énorme. Et l’étonnement est aussi, et parallèlement souvent, de voir les interlocuteurs apprécier un parler vrai de choses réellement vécues. Si l’on sait de nous, que nous ne mentons pas, que nous ne nous arrangeons pas, que nous ne nous cachons pas derrière notre petit doigt, nos interventions valent de l’or car chaque mot y est une entité sonnante et trébuchante telle une pièce de monnaie dont le destinataire des propos peut faire usage parce qu’elle existe dans la vraie vie. La présentation des faits vaut aussi pour la présentation des impressions, des opinions. Si l’on en comprend, qu’il s’agit du point de vue, que l’on n’essaye pas de faire passer pour faits réels, la réflexion peut s’enclencher et libérer un échange avec l’autre sur le même registre. La qualité de la parole, ou de l’écrit, n’est pas affaire de beau parleur ou d’écrivain, mais de classification compréhensible pour l’autre de ce que l’on veut exprimer. Des faits exacts et leurs commentaires spécifiés comme n’étant que notre pensée. L’exercice d’honnêteté intellectuelle a ceci de passionnant que l’on en est que le seul témoin et juge. A la limite des tas de mensonges tiennent la route au point que l’on les estime parfois nécessaires à l’acceptation des faits trop durs dans leur précision. Pour soi, se forcer à pouvoir décrire de manière positive sans falsification demande un travail précis : récolte méticuleuse de l’information, mise en état réflexif de notre système de pensée pour analyser, mise en appel ou en simulation d’arguments différents contre par exemple l’énoncé de la vérité, projection de l’accueil de nos propos ou écrits. Et enfin expression sans hypocrisie ne nous donnant pas l’impression d’être illusionniste ou prestidigitateur au lieu de vulgaire menteur. Quand on réussit le parcours, avec le résultat d’avoir dit le vrai qui a convaincu et rassasié l’auditoire ou les lecteurs, il y a impression de sans faute, de réussite, d’atteinte des butoirs de nous-mêmes en ce que nous rentrons à nouveau en nous-mêmes, y ressourçons nos racines, y ramenons expérience sans que n’ait bougé un iota de notre moi profond. Le circuit positif peut tout aussi bien être une démonstration de l’absurde ou du négatif. Nous y aurions été pareils et ce ne sont que les événements qui ne nous auraient pas été favorables. En une période de changement professionnel forcé où je réapprenais un métier les résultats concrets tardaient et se dérobaient avant éclosion favorable. Pourtant la reconversion se dotait des bons outils, apprenait les vrais gestes et en tout cas faisait de son mieux. Il me fut dit, alors que je désespérai, que je devais être admiratif de mon travail et ne pas juger la non visibilité de mon résultat. Que le travail réalisé était un fait, ou plutôt des faits, s’accumulant comme des matériaux-alluvions d’une île qui émergeraient un jour ou l’autre de la mer. La qualité de mon travail en construction ne pouvait inclure le forçage des éléments terre contre mer ni la prévision sismique de l’éruption. Le travail dont il est question était ce for intérieur qui n’appartenait qu’à moi, que personne ne voyait, mais dans lequel je devais croire et surtout voir mon ultime recours, mon chez moi. Chacun a cette part d’infinie originalité qu’il doit cultiver en terre inviolable et impénétrable par d’autres. Au bout de soi il y a toujours ce chez soi qui ne dépend même pas de nos qualités et de nos défauts, ni d’ailleurs de notre volonté ou de notre indolence. Il est la caverne auto-protectrice de nous-mêmes. Nous nous y replions tel l’escargot sous la pluie. Nous en repartons appelés par l’éclaircie. Mais personne ne nous indique l’entrée ou la sortie. Nous savons seulement qu’en bas de la piscine il y a ce fond où pied touché nous fait immédiatement remonter. Sans faire exprès, car le phénomène ne fonctionne qu’en automatisme de nos besoins, de nos chutes ou élans non prémédités. Utiliser cette partie tabernacle de nous-mêmes, où est allumé tout le temps notre signe de survie, ne peut se faire dans l’opportunisme de circonstance. Nous n’arrivons à solliciter nos forces régénératrices que si le bien aller courant de tous les jours et des grandes performances nous fait défaut. Je ne peux pas planifier ni analyser de manière voyeuse inconvenante ce canot de sauvetage de nos destinées. Son efficacité est en relation avec la surprise que je sais en attendre de lui, dans une approche de foi, de conviction qu’au-delà de mon constatable il y a de toute façon mon réalisable. Le langage populaire commun abaisse l’individu à une petite unité, une petite entité, une quantité négligeable. Simple individu, pauvre individu sont couramment entendu pour qualifier l’isolement de l’être seul tant qu’il ne s’est pas résolu à adhérer et à se fondre dans la masse. S’attarder sur les expressions en vaut la peine : quelques individus sont non seulement très peu mais signifie qu’ils ne représentent qu’eux même ? Que pourraient-ils faire d’autre ? Cela veut dire, qu’à un moment de fusion avec trop d’autres, notre représentation individuelle est diluée, malaxée, atrophiée, anesthésiée et finalement utilisée par ceux qui ne compteront que les têtes et en gommeront ce qu’elles contiennent. Un groupe d’individus est toujours suspect ; car le groupement ne peut éviter qu’il ne s’agisse d’individus, avec cette inconnue que l’on ne sait pas qui ils sont, d’où viennent-ils, ce qu’ils pensent. La multiplication des exemples d’usage du mot individu renvoie toujours à de l’étrange, du non identifié, du mystérieux. J’y vois dans tout cela une grande appréhension pour ce qui ne nous est pas connu : l’autre en tant que pensée et possibilité de comportement ; mais aussi l’autre en tant que nous-mêmes nous refusant de nous voir dans notre individualité. Pour les autres et pour nous-mêmes, notre rattachement à un groupe à motivation identifiée est plus rassurant  qu’un comportement erratique solitaire ou en groupe restreint d’individus. Nous nous faisons peur. Nous n’osons pas nous regarder. Or ce ne serait point fantasme  que de vérifier ce qu’il y a d’immuable en nous-mêmes si nous nous donnons les moyens de vouloir le changer.  Cet inventaire de nous nous est contournable aussi longtemps que nous le voulons, que nous laissons émerger ou sonner en nous la petite lumière ou sonnette pas forcément d’alarme qui nous dit « je suis là , ton heure sera la mienne car de toute façon je ne peux pas bouger de ma position fondamentale en toi ». « Toi tu peux trouver tous les décors de la vie, toutes les combinaisons pour te faufiler dans les circonstances, mais tout ce que tu ne feras pas avec moi, ton plus sûr ami, tu ne  le verras pas bien, ton vrai chemin ». Un peu biblique tout cela mais même les plus superficiels de nous ne peuvent être sourds au dialogue qui se passe en nous. Les appels auxquels nous ne répondons pas sont des occasions loupées de rendez-vous avec soi-même. Le point crucial est de se persuader que l’on n’est jamais faux lorsque l’on s’écoute. C’est au contraire du vrai de vrai. Qu’en faire est une autre question dépendant de la conjonction de circonstances dans lesquelles nous nous trouvons. Des obligations, des devoirs, des conventions sociales ou ésotérico-religieuses peuvent modérer nos instants de vérité avec nous-mêmes. Ce sont la des filtres de société qui nous font voir les choses selon un point de vue commun au lieu  de nous laisser les voir avec nos propres sens. S’y plier dans la forme n’est pas y adhérer forcément dans le fond. L’appartenance nécessaire à une communauté, qui commence au couple jusqu’à la mondialisation, oblige à une discipline et à un partage diminuant notre moi mais tout aussi capable de l’enrichir. La forme nous invite, sans grand autre choix, de vivre ensemble. Le fond nous invite et devrait nous interpeller à y rester et cultiver une personnalité individuelle. Pour chacun de nous nous devenons champ de recherche, laboratoire d’analyse du cobaye que nous sommes, ainsi né non fini, que nous avons vocation à compléter de connaissances de pensées et d’échanges avec l’autre. Continuelle recherche, dont nous avons fondamentalement les outils et l’établi de travail de base, mais dont le maniement ne nous est pas inné. Se relier à une méthode de recherche de savoir est l’apanage de tous les « religare » , toutes les religions, du monde depuis qu’il fut dit, vrai ou faux, que l’homme était trop petit, trop dans un péché originel, pour croquer lui-même et tout seul dans un fruit depuis éternellement défendu. Raccourci simpliste auquel personne n’échappe. Même d’audacieux fuyards, lorsqu’ils font fi de croyances précédentes, n’ont de cesse de réinstaller une idéologie fut-elle du néant qui est un nouvel appel pour que l’on se rallie à eux. Non point que toutes les religions se valent ou soient condamnables ou exécrables sans nuance. Mais il s’agit toujours d’enrôler, en pensant à la place de l’individu que l’on ne croit pas capable de faire sa conscience et son éveil tout seul. Toute religion est en mission, missionnaire, vers l’autre dans un goût de l’autre prévenant au lieu de n’être que bienveillant. La pérennité du phénomène, de tous ces autres que nous sommes d’être reliés-religare par un soutien idéologique révélé, déiste, ou acquis, laïque, signifie et est besoin quasi biologique de trouver des nourritures spirituelles compensatoires à notre désir de recherche. Le savant, qui ne l’est pas encore puisqu’il se recherche, s’épuise lorsqu’il est seul dans sa bulle de référence. Il a besoin d’environnement de connaissances et d’opinions qui vont déneutraliser inconsciemment sa pureté originelle. Preuve en est le profil d’hommes connus pour leur intelligence et courage dont les éloges de vie ont été carrément différentes parce que les connaissances et les expériences à leur portée n’avaient rien de comparable. Jules César, Charlemagne, Napoléon, Karl Marx, De Gaulle, Bill Gates, Richard Branson… même profil de conquérant mais traces dans l’histoire différentes. L’éclatement et la diffusion de l’information laissent présager de nouveaux parcours surprenants. Et c’est tant mieux révélateur de la versatilité de l’homme à générer du nouveau alors que son lui intime recherche fondamentalement qui il est, en se faisant éventuellement accompagné. La religion ne serait pas alors une dépendance forcée par le haut mais une aimantation qui nous pousserait vers l’autre devenu groupe d’autres reliés, religare, en communautés de pensée au départ libres l’une de l’autre, puis devenant coercitive au fur et à mesure de leur montée en puissante terrestre organisation de nos âmes et de nos corps. Ainsi sont nées les religions, dans un but de garder le peuple qui n’était au départ qu’individus brebis éparses, dans un enclos protecteur pour eux. Prisonnier est un mot trop fort pour qualifier ce consentement à se laisser guider. Liberté surveillée ou plutôt guidée serait le terme juste pour situer ce niveau de recherche de quoi faire avec notre liberté. Elevé dans le judéo-christianisme catholique de l’époque de mon enfance j’ai reçu la confiance, vers l’âge de 15 ans, de la part de mes parents de faire de la base qu’ils m’avaient de bonne foi donnée ce que bon me semblerait. Je n’ai plus souvenir exact de ce qui fut une rupture  par rapport à mon - leur - milieu mais il n’y eut pas de heurts. J’en retiens au contraire le souvenir d’une possibilité de mon envol, énergisé par les ingrédients de civilisation dont catholique en paquetage. Ce langage en douceur  d’une croyance répétitive de messes, catéchisme etc… vers une pensée libre ne m’a jamais donné envie de bouffer du curé, de haïr la calotte,  ou, d’une manière générale de juger ceux qui n’étaient pas comme moi. Et plus encore, ne m’a jamais atteint un parcours intellectuel me faisant croire que j’étais en avance sur un chemin de raison dont les autres, les malheureux, seraient à la traine. Je ne songe même pas à interpeller ce qu’ils appellent Dieu pour lui demander de foutre la paix aux Hommes. Je n’ai pas de respect pour ce que je ne sais pas qui existe. Et le doute qu’il puisse exister ne me  met dans aucune crainte  de recevoir en contrecoup le courroux de celui que je n’aurai pas respecté. Il serait hypocrite de se mettre dans la position de croire, au cas où ! Ma sincérité du moment, et c’est la seule sur laquelle je dois être regardé, me fait exprimer une reconnaissance d’un besoin de croire ; et d’être aidé par le commun des mortels, d’un désir personnel de m’assumer en être  infime poussière d’étoile autosuffisante pour se générer et se mouvoir sans besoin pour ma part de croire à extérieur à moi-même. Puisse cette déclaration envisagée et perçue comme un cri fort de simplicité de moi-même ; même si la non demande d’assistance à croire relève dans les mots signifiants une autosuffisance socialement désagréable.  Mes prises de position ne valent que pour moi, avec d’autant plus d’acuité depuis que toi le croyant ou la croyante je te sais fondamentalement baptistalement ancré baigné par ta foi catholique. Ce qui parait étrange, vu de loin en tant que pratique de tous, devient interrogateur lorsqu’il s’approche de vous incarné pratiqué par la personne que l’on admire. L’inhibition en général et la réserve pour communiquer, faire communier, la foi en particulier me rendent  malhabile  pour soulever ne serait-ce que le couvercle du sujet. Qu’est pour l’autre sa foi ? Protective elle le devient par conséquence que tu te ranges aux commandements terrestres. Tu feras, tu ne feras pas. En dix points l’affaire est réglée pour que tous les individus du troupeau se tiennent tranquilles et s’en sentent grégairement protégés par le grand pasteur Dieu régisseur. Mais tu n’es pas pieuse à ce point que la protection soit ton but. Ta recherche est plus astrale d’un monde de beauté dont tu es membre ou du moins élue à devenir membre. Le chemin sur Terre y prend là tout son sens. S’y perfectionner et s’embellir en vue du grand festin. Je m’arrêterai dans ce visionnaire ou fictionnel destin que je n’envisage pas pour moi. C’est ici et maintenant que cela se passe pour moi, avec la contrainte des défauts du présent, avec  l’impossibilité d’idéaliser un monde qui n’existe pas pour moi. Néanmoins je comprends que le paysage paradisiaque promis, terre promise, soit de l’ordre à faire patienter dans les tourments terrestres, terre acquise, d’aujourd’hui. . Par généralisation, ceci me fait craindre que la gangue de la religion, promettant bien-être demain contre sagesse trop prudente aujourd’hui, fasse passer, oublier,  à tous de même comportement le spectacle complet de l’ici et maintenant qui est le seul que l’on est sûr de voir. La vie est un cash and carry, un payer et emporter avec soi. Pourquoi, même si je suis iconoclaste accepter un payez aujourd’hui et jouissez demain ? C’est une promesse de quelque chose ou de quelqu’un que je ne connais pas. Et si cela va à d’autres je m’interroge sur leur envie de vivre et aujourd’hui dont ils paient le prix sans en avoir immédiatement pleinement les bénéfices. Je conçois que mon analyse a un côté monétaire de donnant-donnant qui ne fonctionne  pas forcément dans toutes nos individualités différentes. Je dois apprendre et comprendre que ce que j’aime dans ma manière de penser ne sera pas aimé dans la manière de penser de toi et des autres. Difficulté d’accepter une logistique dont on ne comprend pas la mécanique. L’indifférence à son égard n’est pas la solution car elle nous amène à des vies différenciées, éternellement parallèles et sans point de jonction. On ne peut être définitivement indifférents ou neutre à la différence ou la neutralité de l’homme. Une curiosité naturelle proche de l’amour de l’autre vous vrille continuellement pour chercher à comprendre, à prendre avec soi le point de vue de l’autre. Le summum étant atteint lorsque l’on a compris le mécanisme de l’autre sans envie ni de le critiquer ni de l’admirer sur le fond de ce qu’il représente, mais de goûter en partage respectable, comme si nous croquions ensemble une pomme, une denrée de la connaissance, venant en nous sans aucun esprit de conquête ni de prise de possession définitive. Les inconnus des religions, en tant que mémoire de relier les hommes, mais aussi de l’ésotérisme en tant que remontée dans les inconnus, voire jusqu’au paranormal faisant cohabiter et parler ce qui ne se voit pas, sont des pistes que je ne m’interdis pas. Les chemins sont toujours surs ;  si j’y mets le pied bien droit dans la botte de mon individu profond qui est toujours à ma bonne pointure. La découverte de l’irrationnel ne doit pas faire peur, dès lors que l’on décide d’en rester l’explorateur conscient. On y parcourt les cartes et les guides en ce qu’ils sont informatifs et non dogmatiques. La frontière ligne de partage est ténue, entre ce que l’on peut comprendre et ce que l’on doit croire. Aucun moment qui ne prévient pas le non visible et non compréhensible se plantant devant nos sens, avec beaucoup d’empathie, pour nous tancer d’un « et si c’était vrai » dévastateur de tout rempart raisonnable. C’est une espèce de force du Beau, voire du Bien, qui nous sollicite pour transcender notre réalisme. Y résister ou s’y abandonner n’est pas affaire de lâcheté ou de laxisme. Il y a un réel besoin de placer la réalisation de notre désir de savoir ou d’espérer dans ce qui apparait comme une doucereuse explication. Le message que tout ira mieux demain est d’une limpidité dévastatrice par qui, comme nous le sommes tous, n’est pas au top de son attente aujourd’hui. La proposition d’y croire est alléchante. Je comprends que nos individus, dans leur moi profond, aient une écoute accueillante à cette invitation. Je comprends la transformation qui s’opère pour se dire que dans le doute, et l’absence d’autres alternatives, il ne coûte rien d’essayer. Je comprends que la plupart des humains ait cette inclinaison à se croire comme en auto-persuasion croyant de quelque chose ; parce que ne pas se croire croyant est une invitation, pense-t-il de leur condition humaine de se rattacher – religare - à quelque chose. Et pour finir les autosuggestions de croire cumulées des uns au dessus des autres finissent par constituer une croyance propre à souder ensemble les individus qui la constitue. Quitte ensuite à s’apercevoir que plusieurs croyances cohabitantes finissent par se confronter et se quereller laissant les individus d’origine dans un embrigadement terrestre et guerrier, alors qu’ils venaient individuellement que chercher leurs voies, éponger leurs doutes. Mais ceci est la dérive  habituelle de tout groupe lorsqu’il monte en puissance : le spirituel a besoin de se donner des preuves  de conquêtes matérielles. L’individu au départ n’en demandait pas tant. Il ne voulait que croire pour expliquer son temps présent. Les non-croyants se définissent trop vite et de manière brutale et binaire aux croyants. Puis-je proclamer que je crois en moi-même sans que vous me preniez pour un égocentriste se « croyant » justement le centre du monde ? Croire que ce que l’on voit, Saint Thomas, limite  notre potentialité. Mais croire ce que l’on sent de soi est un dialogue, entre soi et soi, à fois intimiste et réaliste. Qui peut nous voir mieux que nous-mêmes ? Qui croira en nous si nous ne croyons pas en nous? La démonstration de la nécessité de s’occuper de nous est d’une évidence mécanique. Une partie de nous qui ne fonctionne pas empêche notre ensemble de fonctionner. Ne pas fonctionner pour nous-mêmes immobilise totalement notre possibilité d’agir dans la société. Le Soi, et avec l’indispensable Foi de Soi, est le rouage de base de la mécanique humaine. C’est erreur de lui opposer l’effacement ou l’humilité de tel saint, héros ou prix nobel de la paix. Tout homme est forcement d’action, nécessitant un carburant pour se vouloir et pouvoir. C’est une foi en soi. La manière de le dire importe peu ; et le secret de la motivation des cœurs et des consciences est dans le profond individuel de chacun. Chacun a sa partition de sensibilité et d’action mais personne n’en est dépourvu. Chacun arrange son intérieur comme s’il disposait ses meubles en fonction de ses goûts et de ses gestes. D’aucun ont besoin de symboles et de signes pour les soutenir dans l’action, d’autres se préfèrent nus dans le seul rationnel ;  quand des derniers préfèrent se laisser porter par l’opportunisme des messages et des événements obligeant au lax positionnement pour que les choses arrivent et qu’ils y jouissent. Mon inclinaison va vers ce non savoir trempé de tout vouloir permanent. Ni le jour ni l’heure ne me sont donnés mais je suis toujours sur le quai, la valise à la main. Qu’importe le bagage des autres voyageurs pourvu que le poids de leurs idéologies ne leste pas la vie terrestre que je n’ai pas, en tant qu’idéologie, à partager avec eux. Et que chacun se sente libre d’établir le pourquoi de ces croyances dans une approche de partager plutôt que de convaincre. Le questionnement des croyants m’intéresse toujours, par l’espoir sincère que me soit révélé quelque chose que je ne sache pas encore. Que me soit désenclavée la caverne d’obscurité au-delà de laquelle je me refuse personnellement d’aller. Certains interlocuteurs savent me séduire plus par l’engouement fusionnel qu’ils ont dans leur foi que par la véracité des étapes ou des événements qu’ils me racontent. Jusqu’au point d’extase en eux-mêmes où il n’y a pas, où il n’y a plus, de progression possible dans leur raisonnement. Pour aller plus loin avec eux il faut arrêter le rationnel et emprunter l’engouement de leur foi. Ils le disent eux-mêmes : « après tu ne peux plus comprendre », sous entendu à partir d’ici il ne faut plus que  me croire. Ce n’est pas ridicule. C’est une belle histoire. Elle nourrit et décore des tas de parcours de vie. Elle inspire l’art en général et la musique, la littérature, la peinture en particulier ; l’organisation de la société aussi qui sans ce que dit du bien et du mal la religion serait restée barbare et inégale. L’invention du message « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé » est une flèche qui a percé l’humanité jusqu’à moi et ira au-delà. La cible touchée par cette incantation est exactement cette reconnaissance des uns et des autres comme individus les uns à côté des autres : indépendants, autonomes, plénipotentiaires de leurs destinées et en même temps conditionnés biologiquement à une obligation de vivre ensemble dans un aimez-vous les uns les autres. Je n’ai rien inventé. L’irrationnel, s’il n’est que partie de notre vie, ne nous empêche pas de vivre normalement. La religion est un des outils qui peuvent nous aider à construire notre identité. Ce peut être un moyen pour se connaître, se développer, s’épanouir, libérer des parties de soi recluses dans le rationnel excessif. Notre individu n’est pas encore, et à mon avis ne sera jamais, rassasié par la science et les démonstrations sans bavures. D’une part notre monde malgré la rapidité du progrès ne s’est pas encore dévoilé complètement. Qui plus est ce monde n’est pas aussi fini qu’on le pense. Tout continue à y bouger, et surtout nous les premiers dont chaque venue au monde est un renouveau de la connaissance. Il n’est pas encore là le processus qui plaquerait à la naissance une carte mémoire de toutes les connaissances du monde qui nous précède. Très subtilement notre parcours recommence toujours à une case départ d’accouchement même s’il ne se fait plus dans la stricte douleur ; encore que je suis un homme !. Ce n’est pas évident si l’on se compare au dernier smartphone, qui de version en application nouvelles se surenchérit toujours. Nous, nous repartons, ou plutôt nous partons en coque vide qui se remplira de sa base jusqu’à son sommet théoriquement avec ses propres choix. Preuve en est que des sciences de la vie ne sont pas enseignées avec les mêmes données de savoir parce que la connaissance globale du sujet s’est affinée. Voire quelquefois contredites. De quoi garnirons-nous demain nos cerveaux est une question ouverte. L’apprentissage de la taille des blocs de granit pour y inscrire des hiéroglyphes est moins utile que le doigté glissant des enfants de deux ans sur la tablette tactile. L’omniprésence de la science est donc toute relative aux circonstances dans lesquelles nous l’utilisons. Et nous serons mêmes peut-être un jour dans l’opportunité de décrocher de cette science. Sommes-nous, serons-nous toujours, obligés de croire, d’adhérer à la dernière version ? Pourrions-nous en rester à la précédente ou attendre la suivante ? Sommes-nous forcés de monter dans tous les trains qui passent ? L’individu libre, ce qui est un pléonasme, peut faire ce qu’il veut dès lors que sa vie en société n’en soit ni un handicap pour lui, ni une charge pour les autres. Le refus n’y est pas une idéologie négationniste du non à une évolution de la science qu’il ne nous appartient pas ni en compétence ni en propriété de contester. Refuser une évolution, si l’on veut ou peut s’en passer, n’est qu’une attitude personnelle de l’ordre du périmètre exact de ce qu’est un individu. Les cas devant nos yeux vont se présenter voire se précipiter. La médecine est en plein dans ce dilemme : avortement, fin de vie, implantations deviennent-ils des obligations dans un système de couverture sociale mutualisée où c’est l’argent de tous qui peut intimer à chacun comment il doit se comporter. Sujet technique éthique et moral suscitant déjà trop de débats pour l’individu confronté entre son moi profond et son moi social. D’autres domaines, à environnement de découvertes scientifiques, nous interpellent avec moins d’acuité vitale mais tout autant de choix de société. Garder sa voiture à cheval, développer ses photos argentiques, chauffer sa cuisinière au feu de bois, écrire au stylo à encre, lire un livre papier ressemble à des  pistes écologiques de préservation d’un genre de vie ; alors que ce peut être simplement un choix de ne pas aimer les gaz d’échappement du pétrole, de préférer le fumet du bois pour odorer les aliments, de tenir un objet de lecture. En dehors de tout phénomène de mode peut-on faire une halte individuelle dans le cours des applications de la science et du progrès ? L’usage des objets est le plus facile des exemples, alors que l’attitude concerne l’ensemble des changements engendrés par cette science fuite en avant. Sommes-nous obligés de suivre toutes les étapes ? Le créationnisme qui recadre l’évolution sans Darwin a une connotation religieuse lui marquant sa valeur de refus de la science. Mais est-on par exemple obligé de croire à l’égalité des races ? Ce n’est pas ici ma tendance que j’exprime ; mais le droit en général à penser autrement que ce que la science vous enjoint à penser. D’autres exemples sont toujours difficiles tant ils font appel à considérations humaines d’égalité que la bienpensance idéologique ne permet pas de remettre en cause et même de parler. Seuls les cas concrets de notre vie courante peuvent dresser le tableau du dilemme de respecter ou de ne pas respecter les diktats de la science. Car c’est une chose établie, que lorsque la science et son cortège d’officiants décrètent, il n’y est toléré aucune parole contradictoire. L’exemple des dates de péremption sur les aliments est caractéristique de ces vérités qui s’imposent, dans un champ de besoin vieux comme le monde qu’est l’alimentation des individus. Les hommes se sont toujours débrouillés pour manger même si des pénuries ou famines les ont empêchés quantitativement. La science depuis quelques décennies est venue préciser les conditions de la conservation des aliments qui n’étaient autrefois que basique par le froid, le sel, le milieu aseptisé. Elle y a mis des dates limites au-delà desquelles l’aliment n’est plus consommable, ne serait plus mangeable, sera dangereux et dès lors interdit. Peut-on, nonobstant ces avertissements interdisants, continuer à manger quand on veut en prenant le risque comme toujours d’une absorption propre au métabolisme de chacun ? Peut-on brûler ses feuilles et ses branches d’arbre avec prudence pour soi et autrui dans son propre jardin ? Tous ces exemples ridicules, dans leur simplicité quotidienne, veulent simplement interpeller sur ce qui reste de nous dans une société si prévenante qu’elle pense à notre place, devance nos intentions, prévient nos imprudences qu’elle prend pour pronostic certain que nous allons commettre le mal. Le défi individuel à la science n’est pas mon objectif ; mais je veux mettre en cause notre allégeance obligatoire à ce que l’on dit vérité. Le but n’est pas de remettre en cause la dite vérité. Elle est prouvée, incontestable. Mais suis-je, en tant qu’individu, obligé d’y croire comme incontournable vérité ? Puis-je me passer d’elle et en revenir à une vérité plus ancienne. Afin d’étayer ce droit à l’indépendance de notre vision individuelle du monde pourrais-je – tenez-vous bien – vous prétendre que pour moi c’est toujours le soleil rougeoyant qui se couche derrière ces montagnes ? Que d’où je vous écris je ne vois ni ne ressent aucun mouvement de ma terre entrain de s’incliner par rapport à l’astre soleil ? Puis-je, sans que vous me preniez pour un fou, vous tenir de bonne foi ce propos dans la mesure où ma déclaration ne gêne personne et n’arrête pas la marche du soleil ni l’éventuelle rotation de la Terre ? Je ne réclame pas le droit à la folie individuelle dans les comportements et dans les propos. J’interroge seulement le droit fondamental pour chacun de penser ce qu’il veut de ce qu’il observe du monde, quelles que soient les objections totalement fondées de la science. L’opportunité de pouvoir continuer à penser ce que l’on veut est consubstantielle du concept de ce qu’est un individu. Si l’on croit à ce droit il faut savoir le préserver jusque dans l’absurdité, jusque dans le seul contre nous ainsi que l’était l’enfant naïf dans le conte d’Andersen osant dire que le roi était nu. Ce n’est pas une arrogance ou droit de dire n’importe quoi selon ce qu’en disent ceux qui fustigent les irrationnels. La liberté de penser de l’individu concerne tous les domaines ; comme une réserve de détente où l’on a de compte à rendre à personne. On y rejoint un peu le domaine de l’utopie, qui est ce pays de l’impossible, dans lequel l’utopiste projette son possible. L’exercice de savoir penser, à ce qui ne sert présentement à rien de normal, est une forme d’hygiène dont nous aurons besoin pour respirer du monde aseptisé. Il est urgent de créer des bulles de l’impossible où le sens commun se dissout en retrouvailles d’individus, livrés à eux-mêmes, sans plus aucun contrôle. La part de nous-mêmes à l’abri du regard des autres est la question émergente et urgente. Elle apparait, lentement et soudainement à la fois, sous l’effet d’une démographie passant de deux à sept milliards d’hommes en un siècle, ce qui est long ; mais sur la même surface de la terre, ce qui rend courtes les solutions. Au nombre de personnes dans le même parc humain de l’enclos terre s’ajoute une ubiquité permettant à tous d’aller partout et vite, tout y voir et entendre en temps réel instantanée. En résumé, cinq fois plus de gens cent fois moins isolé, et toujours sur le même espace, rend la part du gâteau global beaucoup plus petite en terme d’espace temps. Vu de haut l’Homme d’aujourd’hui doit, c’est mon imagination, ressembler à une feuille souffletée de toutes parts par des vents énergiques et positifs mais ne lui laissant pas d’endroits calmes pour se reposer. L’homme d’aujourd’hui sur-sollicité n’a plus d’espace temps pour lui. Problème physique de trop d’agitations ambiantes inévitables que sont les nécessités de gagner sa vie, d’organiser sa vie sociale, de satisfaire ses besoins. Mais aussi air du temps psychologique qui se veut tuteur du bien aller de tous, de la naissance à la mort. L’assistanat social épouse une dimension matérielle et psychique. Une idée du bon être humain s’est installée qui se concrétise par ce que la République peut manipuler du bon citoyen. L’intention ne part pas d’une malveillance. L’idée est au départ de donner au citoyen, être humain, tous les instruments de sa liberté, en considérant une quasi virginité de culture des êtres dont la République a charge. Intéressante perspective posant la question du champ d’action des institutions sur les citoyens. Indécrottable idéologie républicaine ne pouvant éviter de reproduire la coercition du religieux, la mainmise de l’Eglise qu’elle a tant fustigée. Mais au point maintenant de pousser la séparation jusqu’au bastion du cercle communautaire ou familial d’où l’enfant, jusqu’à plus ample informé, ne peut que venir. L’enfant, confié à l’école par ses parents, est physiologiquement un être en voie de  formation de son corps et de son esprit. Qui donne quoi devient la question, amplifiée de surcroit par le vide réel côté parents créé par les divorces ou les décalages culturels enfant moderne – parents anciens. Il n’empêche que l’enfant ne peut être, quelque soit le changement, que le produit d’un homme et d’une femme qui en gardent devoir d’éducation et de protection jusqu’à majorité. Une ambiance de mœurs et de condition de vie secoue cette logique de la filiation. La morale des pour et des contre s’en mêle avec violence idéologique au-delà des partis politiques, eux-mêmes divisés en pour et contre en leur sein même. Ce qui est plutôt sain en tant que état de dialogue possible dans la société. Je n’y ai qu’un avis de tête chercheuse y testant des pistes de possible avec les nouvelles données certes mais avec en constance l’immuabilité de la condition de l’homme qui doit être celui qui décide de lui-même. Ce que chacun de nous, une fois informé, pensons de possible pour notre vie doit être le désir à prendre en compte dont on fera synthèse de vie en commun. Si chacun de nous pense que notre individu doit être garni de connaissances, dont il n’appartiendra qu’à lui ensuite de faire une pensée, aucune institution ne doit alors s’interposer entre l’enfant et sa famille pour l’amener à voir le monde d’une manière qu’il n’aurait pas forgé lui-même. Cas pratique de ce qu’il en est des notions d’égalité plaquées sur un jeune cerveau à l’école, alors que chez lui dans un bonheur qu’ils se sont choisis, maman accepte la protection patriarcale de papa ; qu’à son travail papa, parce qu’il doit gagner sa vie, accepte l’autorité de son patron. L’insinuation à l’enfant, que ses parents subissent une situation d’exploités, entraine un risque de désenclavement. La théorie de l’émancipation totale de l’individu par rapport à son milieu devrait prévaloir de ce que ferait alors la République de tous ses enfants qu’elle aurait déracinés. Loin de moi l’idée qu’une idéologie veuille délibérément ce schéma d’une nouvelle humanité apatride de liens, in vitro de tradition, aseptisé de sentiments, neutralisé de tradition. Mais la tentation tendue aux enfants d’une société égocentrée sur le seul moi de l’enfant, alors qu’il est non formé physiquement affectivement et psychologiquement, semble un contre sens mécanique de fonctionnement de l’individu enfant en puissance. L’âge dont il est question, au contraire des animaux qui sont très jeunes finis, exige une continuation synchronisée du milieu ambiant en général et des parents en particulier. L’observation concrète de mon petit-fils de 8 ans, de ma petite fille de 3 ans ; mais aussi d’adolescents  l’une de 15 ans seule au monde alors que terriblement douée, les deux autres de 11 et 15 ans chouchoutés en milieu motivant mais strict, m’amène des va et vient d’informations. Aucune conclusion ne se dégage. Point de solution que je puisse qualifier de bonne ou mauvaise. Rien que des expériences en cours, dont quand même un impératif se dégage, qui est celui que puisse exister pour chacun des enfants ou ados un adulte qui les écoute. Ecouter c’est ne pas savoir à l’avance, c’est laisser venir en comparaison constructive les matériaux que vous amène en vrac brouillon l’enfant-ado. Scolarité, envie d’objets, haine de la copine, brouille avec les potes, arrogance contre parents ou tuteurs : tout se mêle et explose vers une oreille qui doit être là comme une brouette qui récupère le surplus-ras le bol de ces ados. Leur montrer d’abord que l’on accueille tout ce fatras, d’où qu’il vienne, quelle que soit l’origine, et peu importe les adultes concernés. Ecouter, trier, ranger, canaliser, motiver pour repartir dans l’ordre existant des choses. Je connais des CPE, conseil d’orientation scolaire, faisant au sein de l’école ce travail de décompression. Suggestion me vient d’un élargissement de ce rôle sociétal, qui personnellement me passionne tant il est d’abord utile à l’enfant et qu’il est ensuite si épanouissant pour celui comme moi qui le pratique. Le point d’observation sur la société, à travers le prisme des jeunes que l’on écoute, vous rend des connaissances privilégiées de l’état du monde en marche : mœurs, genre de vie, objets à la mode, mentalités, désirs d’une génération. De quoi orienter ses efforts d’une vie quotidienne qu’il faut de toute façon bien remplir avec de la jeune énergie plutôt que de la vieille nostalgie. L’école n’a pas le temps individuel pour chacun dans ce rôle d’écoute du profond des jeunes êtres. Sa mission première est de dispenser des savoirs dans des matières exactes, avec, si elle en a le temps, un éclairage encyclopédique humaniste. Les sciences exactes servent l’entrée dans des métiers précis, alors que l’entregent social-humaniste enrobe l’être dans une aisance sociétale dont l’environnement familial est le décor principal. Toute autre mise en scène pour l’école est une mise en situation de choix, pour ou contre la république ou pour ou contre ses parents, lesquels parents doivent tout autant que la république se tenir à distance. L’éducation et ses officiants les enseignants ne sont pas un produit de consommation. L’institution qui leur est conférée par statut, garantie d’emploi, est une volonté que ce temps de l’école soit un espace protégé de toute autre influence que celle de pouvoir accueillir des connaissances, avec une objectivité ne visant que l’intelligence ; et sans aucun autre conditionnement. L’enfant, dans le temps de sa scolarité, est, entre la République et ses parents, dans les mains des enseignants qui n’ont de compte à rendre ni à l’une ni aux autres, par le mandat d’indépendance et de compétence indispensable à la fonction de formation des êtres. Ce n’est donc ni à la République, toujours politiquement et idéologiquement orientée au moment d’élus en charge de gouverner où elle parle, ni aux parents imprégnés des problèmes de leurs instants, de dicter et surtout tutoriser les enseignants et les contenus des savoirs à enseigner. Et puis, quand on y songe, quelle superbe tranquillité de l’esprit que de savoir que quel que soit le régime politique, la religion, l’état de l’économie, l’humeur à la maison, le couple qui s’aime ou se déchire, la richesse ou la pauvreté, l’état heureux ou désastreux du monde…quelle paix de l’âme que de savoir qu’en franchissant la grille de l’école, que quand la cloche sonne, le tohu-bohu du monde s’arrête et que commence l’espace de sérénité constructive de l’éducation. Intermède de la vie, et construction en cours d’une nouvelle vie, tels sont ces merveilleux plans pour continuer l‘humanité. Cela vaut tous les sacrifices et les priorités de budget. L’école est au cœur de ce culte de l’individu qui m’est si cher. La connaissance dispensée avec précision et pudeur dans chacun des jeunes individus les enrichit personnellement. Ce n’est pas un élevage en batterie avec un gavage commun pour des consciences interchangeables. Chacun peut y exprimer son être et y requérir son menu en termes de qualité diététique et de quantité nutritionnelle. Laisser parler les appétits de chacun, au lieu d’imposer un menu fixe tel que le diktat que 80 % d’élèves doivent avoir le baccalauréat, est une prérogative de l’école. Personne ne devrait pouvoir parler à sa place et inverser ainsi les priorités de son travail. Car qui est imposé du quantitatif de 80 % de réussite sera induit qu’il ne pourra pas faire dans le qualitatif, dans la détection individuelle des profils et potentialités de chacun.  80 % n’est qu’une anticipation d’il y a 30 ans de l’éternel théorie et idéologie de l’égalité à tout prix. C’est vouloir pour les autres, alors que l’on ne connait pas l’individualité de chacun de ces autres. C’est prendre le plus fort et le moins faible, ou le moins fort et le plus faible expressément dit, pour en montrer le ridicule de toute moyenne. C’est prendre un tout hétérogène pour en vouloir un résultat homogène. Ne pouvant s’occuper de chacun individuellement, qu’il soit élève ou citoyen, l’institution devrait avoir la modestie et la grandeur de sa tâche consistant à installer un état de droit d’accès égal justement pour chacun. Cela veut dire qu’il soit clairement disposé, pour chacun les outils du savoir, de la protection, de la justice, de la solidarité avec un mode d’emploi courant mais n’allant pas dans le particularisme de chacun. L’institution n’a pas à spécialiser ses démarches dans un but de satisfaire les sous-groupes et les communautés. C’est au contraire à chaque groupe, et en son dedans à chaque citoyen, de trouver son point d’ancrage dans une société pourvoyeuse de moyens, comme les transports en commun ; avec la compréhension de la part de chacun que la vie en société est un partage de l’espace ; comme par exemple les routes où il y faut un permis de conduire, le même pour tous, garantissant l’usage et le respect des règles de ces mêmes tous. Cela fonctionne puisque l’on y constate une circulation fluide de millions de personnes sachant s’abstenir de conduire après avoir bu ou en dépassant les limites de vitesse. Preuve du bon fonctionnement possible d’un réseau hyper dense lorsque les règles mutuelles et réciproques sont comprises. Exemple caractéristique, et sans doute parce qu’il n’est que matériel de pure tôle, sans aucune origine ni finalité idéologique à part le machisme ou le sexisme de l’homme ou de la femme au volant que l’on a su ridiculiser et éradiquer. L’inspiration de cette gestion, du parc automobile dans un espace limité, pourrait-il donner des idées pour décloisonner d’autres enclos bloqués du parc humain. Utopie ? L’Hôpital en particulier et la santé en général ne pourraient-ils pas faire appel aux bons réflexes et sens de l’usager à qui on rappellerait aussi qu’il en est le financier. Casser sa voiture coûte cher individuellement alors que casser sa pipe,  en santé mutualisée, est financièrement indolore. Simple détail pour mener une réflexion de responsabilité de chacun, sur des services dits  public ; dont on oublie qu’ils sont dans leur financement et leur finalité l’affaire de chacun. Autre idée, dans le pêle-mêle des sujets bateau éternels problèmes et déficits dont on dit à tort que l’on a tout essayé, le chômage. Nous tous, concernés et plus particulièrement ceux qui sont présentement sans emploi, nous posons nous une seule fois d’où vient l’absence de travail ? Tout simplement parce que l’on achète ailleurs ce qui donnerait du travail ici. L’économie et son cycle est une roue simple à comprendre : c’est un engrenage d’actes qui entrainent des conséquences de développement ou de régression. Il n’y a pas d’équilibre ou de croissance si une partie consommatrice n’y met pas son effort productif. Toute autre solution n’est que discours se souciant peu du réel et n’espérant que refiler la dette ; car il faut emprunter aux suivants pour payer les chômeurs du présent. Une remise à plat de ce qu’est un travail, un coût de matière et de transformation, une distribution pour un prix final abordable éclairerait celle ou celui qui pense pouvoir exiger. Les systèmes de troc, c'est-à-dire d’échanges nets valeur contre valeur, sont moquées par ceux qui ne veulent pas l’envisager dans une prospective et avec des moyens modernes y compris de l’informatique et de l’automatisation. Mais l’économie n’est qu’une vaste place de troc ou les biens services et personnes s’échangent leurs prestations ; que l’on mesure en monnaie laquelle n’est originalement qu’une unité ultime division d’une valeur. Paradoxalement d’ailleurs, la numérisation des échanges et leurs transferts virtuels de compte à compte en instantané, n’a plus besoin de matérialité. Seul un chiffre compte ; peu importe de quoi. Ceci pour dire que l’on pourrait remettre tout cela en cause pour que cette économie soit remise en place…en place pour chacun. Que chacun y trouve son compte selon l’investissement, humain s’entend, qu’il veut y mettre. Non point  que chacun se mette sereinement à se décider d’être riche ou pauvre mais que chacun puisse envisager la place de l’argent dans sa vie avec la conséquence immédiate pour lui de ce qui lui en coûtera personnellement et à lui seul pour y parvenir, sans le lot commun à notre humanité d’y réussir et, ou, d’y échouer. La méthode de prendre l’économie par la base de l’aspiration individuelle de chacun ne rencontrerait pas l’opposition que prédisent les sceptiques ou les adversaires ou les non convaincus. Il ne s’agit que de remettre à leur juste place des partenaires de l’offre et la demande. Le marché est suffisamment vaste, les besoins et les désirs suffisamment abondants, pour que de part et d’autres il y ait beaucoup d’échanges en perspective en même beaucoup plus que dans une société bridée par des clivages et des fossés. Le développement numéraire en argent de la niche des riches, et le développement parallèle quantitatif de la masse des pauvres, obligent de toute façon à reformuler les termes de l’échange. Les produits de luxe pour peu de riches seront toujours moins intéressants, pour l’économie globale, que des produits de grande consommation pour beaucoup de pauvres. Le raisonnement, sans aucune connotation morale, tient la route tant pour le profit des entrepreneurs que pour les millions-milliards d’emploi pour les travailleurs. L’économie ne peut plus être une lutte des classes ni une redistribution pour chacun. Par sens bien compris de la mécanique de l’effort vers le profit  elle peut partir du désir de chacun, avec finalité de lui revenir sous forme de satisfaction de bien-être ou pécuniaire. Il semble presque présomptueux de tracer cette nouvelle géométrie des rapports humains. C’est pourquoi il est aérant d’oser ouvrir d’autres fenêtres, aussi néophytes soyons-nous. Qu’y risquons-nous sinon d’y trouver une piste qui ne peut se tromper si elle part bien de nos désirs et qu’elle veut y revenir. Y penser tout seul peut faire peur à l’image d’un désert que l’on voudrait traverser en marcheur isolé. Chacun fait comme il le veut et d’aucun se targue d’ailleurs de s’être fait tout seul alors que, humoristiquement et avec une certaine vérité, ils auraient mieux fait de se faire aider. Le bon sens commande à mon avis de ne jamais se fermer d’avance à l’opportunité d’une rencontre, d’un clin d’œil de l’autre, d’une amitié, d’un soutien, d’une affection. Si l’homme nait seul  et meurt seul, entretemps il fait des rencontres. La vie en tant que passage d’un état bébé à un état vieillard, n’aurait pas de sens si l’on y restait seul, comme dans une ligne de course dont les parois nous seraient cloisonnées. Nous courons, à côté des autres et même plus, nous gravitons comme un astronaute dans l’espace dans l’univers des autres. Il n’y a pas de bulles étanches pour chacun. De la poche du ventre de la mère au linceul du cercueil nous sommes nus, et à vif, avec les autres, dans un frottement instinctif mais dont il nous reste la conduite. Se frotter à l’autre est plaisir intellectuel et physique, autant que risque d’affrontement moral et charnel. Tout peur arriver, selon l’empathie qui est une forme naturelle de notre gestion du contact de l’autre. Nous ne sommes pas tous pareillement dotés pour accueillir l’autre, et exprimer vers l’autre. Question double de comportement par les gestes, qui se voient, et par les sens  qui se sentent, n’empêchent pas l’existence de notre véritable désir de ce que l’on veut faire de l’autre. On peut être gauche dans les gestes et à côté de la plaque dans l’expression des sentiments, tout en étant terriblement épris d’une personne qui va avoir un mal fou à nous comprendre. Cela prendra simplement plus de temps. La profondeur compensera la maladresse. Les êtres finiront par se rencontrer, dans une espèce de devinette de l’autre, où ce sont nos individus profonds qui s’expriment sans médiation de gestes ou de paroles. Ainsi naissent les meilleures rencontres, en ce qu’elles sont dégagées de tous artifices. Lorsqu’est ressentie en nous cette étincelle de l’autre nous n’avons pas à nous demander la vérité de ce déclic : il est une attirance magnétique de deux matières physiques ou intellectuelles qui étaient programmées ou faites pour se rencontrer. Ce que j’en dis s’écarte de l’explication rationaliste par laquelle notre société formatée ou conventionnée veut aujourd’hui tout vérifier. Il est vrai que les critères de bien aller  entre personnes, si subitement éprises l’une de l’autre, n’ont pas le temps dans ce cas d’être listés et comparés. La substitution à ce contrôle est de l’ordre du coup de foudre, avec toutes ses conséquences légendaires de brutalité et d’électrocution. Le coup porté transformerait, voire transfigurerait les êtres touchés. Soit ! Mais après ? Notre vie n’est-elle pas commencée par un traumatisme de l’air et de la lumière en sortant du liquide utérin ; ne se termine-t-elle pas, brusquement ou lentement, mais clairement, par une extinction, un tomber de rideau brutal sur des milliards de moments de mémoire se faisant pschitt et puis plus rien. La rencontre est une forme plus douce et consentie de ce genre d’éblouissement. Les communautés privilégient et organisent ces moments, à l’insu de l’individu concerné, par exemple dans les rites d’initiation ou de passage de l’enfant ou adolescent à l’état adulte. Le choc de ce qu’il découvre fait partie de la charnière, d’une étape à une autre, qu’il doit vivre comme une rupture, un adieu à l’un, un bonjour à l’autre. Vécu en profondeur, l’individu se trouve et se retrouve ensuite en passant d’abord par sa solitude lui permettant de se vérifier, puis par sa trouvaille de l’autre rencontré qui lui permet de se réchauffer. On ne choisit pas sa rencontre. On ne peut que s’y laisser porter. Dès lors que nous sommes en tant qu’individu en bonne disponibilité de nous-mêmes il n’y a pas de risque d’égarement. L’être clair avec lui voit clair devant lui ; et attire à lui celui qui le verra clair. Peu y importeront les affinités et les contradictions si la demande est détachée. A l‘inverse, toute démarche entamée, d’un intérêt particulier ou d’un but autre que l’accueil global de l’autre, est vouée aux déconvenues. Ce que nous cachons à l’autre dans la phase séductrice se révélera à cru dans la phase réalisatrice. Ce n’est pas incompatible mais ce ne peut être le calme plat. La rencontre d’affaires est en cela très éclairante de ce que l’on peut échanger dans un cadre défini et connu à l’avance par les deux parties. La finalité financière y permet de mettre une valeur sur chaque concession que l’on fait à l’autre. C’est un crescendo ou une descente abyssale d’unités monétaires, mesurables. Donnant-donnant. Gagnant-gagnant. D’autres rencontres ne se pèsent pas avec autant de poids en argent ; mais ce que peuvent les protagonistes est quand même toujours de l’ordre de ce que je donne par rapport à ce que je reçois, que ce soit sécurité, honneur, respect, considération, soumission consentie, autoritarisme accepté. Au-delà de ce réalisme, ayant le mérite de l’échange respectable et respecté, existe la rencontre sans règle. L’indéfinissable accroche que les êtres se font l’un de l’autre, sans savoir d’où cela vient, ce qu’ils en font, où cela les mènera. On n’y est pas en train de bâtir, mais on est en pleine action de vivre. Sans pourquoi ni comment. Passant de l’état d’individu oubliant sa raison, à l’état de deux ou plusieurs individus toujours mais cette fois en fusion. Pour un temps, pour un but et comment, que l’on ne se cherche pas à définir. Et sans autre souci de l’autre que celui de ne faire de mal à personne ; et au contraire, par prévention dynamique, de commencer à faire du bien à tout ce qui est à notre portée. Le laisser faire de la rencontre ne comporte aucun laxisme de soi ni envers les autres. L’individu ne fait que projeter le seul vrai de lui, vers ce qu’il sent être le seul vrai de l’autre. Sans calcul les deux individus se lancent et se rejoignent, dans un état d’enclenchement de leurs potentialités individuelles devenant dans une quasi sortie du temps normal une exponentialité. L’envie de l’autre est le ferment qui nous pousse à agir. Pour aimer, pour se faire aimer, pour dominer, pour être dominé. Quitte à être avec l’autre, l’efficacité m’incline à saisir les opportunités de rencontre que le cours de la vie procure. Inclinaison est le mot qu’il faut pour définir un choix, que l’on n’a pas été cherché, mais que l’on accepte par gravité favorable de ce qui penche positivement vers nous. Ce qui arrive n’a rien de destin auquel nous ne pourrions échapper, et auquel, au contraire, nous devrions soit obéir soit fuir. Les choses, au sens d’événements d’êtres humains et de circonstances, nous arrivent en spectacle que nous croyons neutres voire distants de nous. Ce n’est pas vrai à mon avis : ce que nous nous mettons à voir, entendre, ressentir, insensiblement devient « Nous ». Nous ne sommes plus le même après qu’avant. C’est donc perte d’expérience que de ne rien faire de ce que nous avons déjà vu ; de ce qui est là dans nos bagages. Avoir vu la misère de quelqu’un que nous pourrions soulager et n’en rien faire est une erreur pour nous. Avoir eu envie d’être riche et de se dire que ce n’est pas notre genre est une erreur pour nous. Sentir le regard affectueux et l’attitude motivante d’une personne pour la première fois rencontrée, et de s’en écarter pour ne pas s’en laisser séduire est une erreur pour soi. Le vagabondage de notre éveil à l’autre n’est pas une errance menant obligatoirement à une perte oubli de soi, de nos valeurs, de nos devoirs, de nos engagements sociaux. Le déroulé des phases de la vie devant nous ne nous appartient pas. Nous ne sommes ni romancier, ni metteur en scène, ni scénariste ; seulement un peu costumier accessoiriste, dialoguiste, de notre vie. Ce qui arrive a une force paradoxale d’être à la fois évidence, puisque existante, et choix offert qui ne nous oblige en rien. Le oui ou le non nous regarde dans un strict champ de notre envie de faire, oui, ou de ne pas faire, non. Mais le choix ne présuppose aucun bien ou aucun mal. Ce qui arrive n’est pas une malignité pour nous entrainer dans le mal, pas plus qu’il n’est garantie de nous élever dans le bien. Ce qui arrive constitue des matériaux de notre construction que nous seul pouvons assembler selon notre aspiration. Il se complique lorsque quelque matériau nouveau apporte un bouleversement des plans en cours. Avant je ne pensais plus et je n’avais d’ailleurs jamais pensé qu’un être vienne à ma racine bien avant toutes les branches de la raison dont ma mature personnalité s’était arborée. Je me croyais définitivement dans le paysage de l’humaine logique avec de bons outils efficaces et joyeux pour y réussir. Quelqu’un est venu secouer l’arbre dans un vent joyeux de bonnes intentions : épanouir, partager, ressentir. Ce fut assez pour que j’aie pareille envie d’épanouissement, de partage, de sentimentalisme. Très chaude osmose de deux personnes clairement et définitivement en distance l’une de l’autre mais dont les regards, comme deux épées, ont toujours envie de se croiser, de faire sonner leur timbre, de provoquer leurs éclats. Pour que chacun des duettistes, car nous le sommes plus que duettistes, apprennent crescendo l’un de l’autre la beauté des gestes d’attaque et de défense, l’arabesque de nos êtres, la chevalerie de nos comportements.  L’évocation personnelle  illustre le bien fondé pour l’individu d’avoir à s’affronter à l’ami de combat. Nous avons un biologique besoin d’une contradiction affectueuse. Avocat du diable, dit-on, pour faire parler un contrepoint injuste dans le fond mais aérant pour l’esprit dans la forme. J’ai trouvé sans chercher mais je n’ai pas refusé ce qui m’arrivait. Ici est le message que je veux laisser trainer au cas où vous le verriez. Il existe des moments, souvent fait de personnes, qui nous font clin d’œil de partager. Sans façon, sans raison. Uniquement parce qu’elles sont là à cet instant « t » et que nous y sommes, là en « t’ ». Instant dont la société organisée et préventive veut apprendre à nous méfier, parce qu’en effet aucune procédure raisonnable permet de le vérifier. L’instant vient de la profondeur intime des individus qui se rencontrent. Il n’a pas de critères ni de buts. Il n’est qu’à prendre par les individus comme une balle faite de leurs sentiments qu’ils pourront saisir, se renvoyer, faire rebondir de l’un vers l’autre. Le jeu de deux individus devient un projet commun de bien faire, d’agir, de construire ce qui était au départ inenvisageable par les seules compétences de l’un et de l’autre. La synergie de ces 1+1 qui font plus que 2 est une incompréhension soulevant la méfiance de la part de la société organisée. La sophistication de l’organisation sociale et étatique s’évertue à prévoir toutes les situations de la vie, sous forme de lois décrets mesures d’assistance ou de devoir intervenant dans toutes les situations de la vie. A l’instar de ces FAQ, foire aux questions, qui remplacent maintenant sur les sites téléphoniques et internet les résolutions humaines de problèmes. Malheur à vous si votre question n’est pas dans les cases de la compréhension machinalement prévue car on vous y dit carrément hors sujet, votre question et même vous. Vous n’êtes pas dans le schéma formaté de la société. Refaites vous d’urgence !  A quand un relooking psychologique pour que vous soyez sociéto compatible ? Alors que la rencontre, qui vous reconnait et vers laquelle votre cœur fait tilt, n’est pas dans cette connectivité branchée ou débranchée de vous par rapport à la société. La rencontre déclenche un déroulement réciproque de bonnes intentions. Que ce soit en relation d’intimité ou en partenariat d’affaires potentielles. La vision de l’autre me semble ne jamais pouvoir se tromper. Chacun restera ce qu’il est individuellement et profondément dans cette relation. C’est impératif de rester soi ; car un soi transformé, même pour faire plaisir, est un changement d’état de ce qui a provoqué sincèrement la première attirance. Les rencontres qui ne se concrétisent pas sont dans le cours de l’histoire humaine des balles perdues, des occasions manquées, des suites de l’évolution qu’on aura laissé s’évaporer. L’attention n’est pas, et n’est même pas du tout portée, sur notre rôle véhiculaire dans la suite du temps. Créé pour une mission semble trop pompeux ; car il ne s’agit que d’un fragment, que nous sommes, dévolu à quelqu’un quelque chose. Savoir à quoi est trop gigantesque. Savoir comment relève d’accepter les opportunités rencontres que nous propose la vie. D’y déployer nos désirs, d’y adapter nos besoins, nos ambitions. Et de remettre le chantier, en cours et par nous transformé, aux suivants à qui nous laisserons les outils pour se déterminer en rencontres comme nous l’avons pu nous-mêmes, sereinement en liberté. Se laisser porter par les événements est, à tort, un jugement de passivité de ce qui nous arrive. Pourtant notre rapport physique, avec lesdits événements, montre à l’évidence que nous seul ne pouvons pas les porter. Ni à plusieurs d’ailleurs. Mais que éclairé en nous-mêmes, ou avec l’aide de bons mentors, nous pouvons savoir profiter des vents et des courants de cette mer d’événements pour nous y mouvoir vers des endroits que nous affectionnons individuellement plus particulièrement . Etre deux ou plusieurs dans l’embarcation apporte du plus à chacun. L’idée est que si nous sommes effectivement dans un parcours de vie fondamentalement individuel, la rencontre est ce croisement de nos individualités, qui porte en lui la véritable possibilité que nous développions, que nous nous transformions, que nous devenions plus ; tout en restant fondamentalement 1. Nous devenons des 1+, pour nous-mêmes, pour les autres, pour l’ensemble des autres de ce qui s’appelle l’humanité. D’autres ont dû penser à cela à chaque génération. Chacun a du se poser, et se posera la question, du bon sens de qui suis-je ?  Rien de nouveau à cela ; mais pour la première fois dans cette suite de siècles l’impression que nous n’avons plus d’obstacles physiques et psychologiques pour y répondre, ou du moins pour poser très en amont la question de ce qui suis-je. Jusqu’ici, la non connaissance, que je préfère à une négation délibérée qu’est le mécanisme, obligeait notre quotidien à accepter des réponses toutes faites imposées par des croyances ou des règles de société, maintenues en place pour sécuriser l’espace commun des hommes et de leur environnement. D’une part on ne savait pas tout, mais en tous cas bien moins que maintenant, et d’autre part la cohésion protective du groupe verrouillait les divergences. Autrement dit, il ne suffisait pas autrefois d’avoir une question existentialiste de bon sens pour qu’il soit bon d’y répondre. Une certaine forme des priorités obligeait à des essentiels, au-dessus du bon sens de chacun. D’aucuns décrient l’évolution qui renverse la tendance vers ce confort de vie global, permettant à nos chacun de crier « et moi et moi et moi », à l’instar du prémonitoire Jacques Dutronc se comparant à 1 milliard de petits chinois…  et moi et moi et moi. Le confort nous remet les cartes du monde et nous demande ce que nous en faisons ; comment voulons-nous y jouer et continuer la partie… avec des joueurs qui s’y connaissent aussi. L’évolution n’est que la fin du privilège que nous avions de dominer les autres. Ce n’est pas inversion faisant de nous désormais des dominés, des inférieurs ; même si cela nous fait mal de ne plus pouvoir se dire supérieur voire égaux, dernier terme qui supposerait que les égaux d’en face sachent et veulent ce que cela veut dire. Bas les masques occidentaux, aurait-on envie de dire, et que vive le bon sens avant tout effet d’éducation et de société nous en donnant une version biaisée. L’Humain parmi les Humains ne peut y avoir que toute sa place. A condition que le sens, bon et unique, de ce qu’est un humain nous revienne : un corps et un esprit génétiquement doté pour apprendre de son monde environnant et y construire un apport supplémentaire à l’état trouvé. Cette définition du chantier global laisse libre cours à toutes les formes de contribution. Pour que tour de Babel de confusion ne s’y installe, les efforts s’organisent par qualification esthétique, les urgences se traduisent par des manifestations communautaires de région, de pays, de groupes religieux ou autres de pensées. Qu’importe si la forme du dialogue à la méthode constructive est entendue par tous, c'est-à-dire en partant et repartant toujours du bon sens individuel de chacun. Quand il n’est pas manipulé par raisons au-dessus de son bon sens personnel, l’individu a un rapport courtois avec son voisin, avec ses contemporains. Aucun de nous ne se croit sérieusement supérieur, dominateur ou savant. Le bon sens éclaire notre individu intérieur, dans cette sobriété vis à vis des autres : le laisser vivre, profiter de sa joie ou de ce qu’il peut concrètement nous apporter, lui apporter s’il le veut ce que nous pouvons partager avec lui. Les uns à côté des autres nous sommes cela. Au-dessus, les masses d’uns à côté des autres deviennent groupes à gérer,  à se faire représenter en élus, gouvernants, maîtres du monde que nous pouvons toujours rappeler à leur vocation d’origine ; justement grâce à la nouveauté, unique dans l’histoire, permettant à tous de savoir et de communiquer ces savoirs. La permissivité d’écrire et de recevoir vers et du monde entier donne à chacun la possibilité de rappeler aux instituants du pouvoir le contenu de leur mission, qui n’est autre que la promesse d’actes à réaliser au moment où nous avons votés pour eux. C’est une évolution extraordinaire que de voir en permanence l’en cours d’une action. Il se peut que les hommes de pouvoirs actuellement soient dans une vision de promesse servant à s’être fait élire. Mais les mandats passent vite pour que les prochains comprennent que les nouvelles règles de l’instantané s’appliquent, à eux aussi, désormais, quitte à en faire trembler le bouclier d’immunité de la durée des institutions ou l’idée régalienne d’un état au-dessus de tout. Le bon sens de base doit servir à susciter chez le gouvernant un bon sens au niveau de son travail au service de tous. C’est une fonction technique de répondre à ces critères du bon sens individuel par la mise en place d’une gestion collective de similaire bon sens. Le filé ou fil de nous qui coule de nous ne sait pas mentir. Un sens naturel le guide, de l’amont qui est nous vers un aval qui est toujours nous. Bon sens est le terme exact de cette trajectoire si nous la laissons y faire de bonnes rencontres avec nous-mêmes, avec les autres, avec les événements du monde. Ainsi rien n’est réellement compliqué lorsque nous laissons le courant des êtres, dont nous-mêmes et des choses, aller dans le sens général des bons sens additionnés de chacun. Tout n’y est pas toujours parfait. Au point quelquefois de regretter amèrement la confiance, tolérance, voire laisser faire par positiviste sens de cette action ensemble. Que sommes-nous venu faire dans cette galère d’incompétents, ou pire, de mal intentionnés pour ne pas dire plus malhonnêtes ou usurpateurs de valeur de notre bon sens ? Très bien de se dire tout cela et de jurer que l’on ne nous y reprendra plus ! La seule solution est alors de ne plus agir, ou pire de se rétracter en méfiance définitive à l’égard de l’autre et des autres. On s’y préserve de futures mauvaises rencontres mais avec le préalable de s’interdire désormais la rencontre puisqu’elle est par sa nature porteuse d’incertitudes. La rencontre sure de nous être 100 % favorable n’existe que dans l’acquisition de produits manufacturés, dont la description et la garantie mettent l’acheteur dans une satisfaction relative mais non totale puisque même si satisfait ou remboursé le retour d’investissement ne sera jamais jouissance totale de l’objet. Paroxysme de la société de consommation qui doit parler jusqu’à notre exigence. Il en est de ce que nous voulons et de ce que pour finir nous avons. Il faut se donner une marge de non atteinte de nos désirs. Au contraire du qui trop embrasse mal étreint, il est plus sain d’avoir de multiples projets sereinement mis en chantier, comme si chacun devait et pouvait réussir ; mais dont on sait à l’avance que des impondérables viendront contrarier passagèrement ou définitivement l’accomplissement. Ce peut être une analyse erronée au départ, des partenaires variant leurs efforts ou leurs intentions en cours de route, une conjonction de retournements humains et matériels, et même la découverte trop tardive de la vénalité de nos compagnons d’entreprise. Matériaux de l’humanité ils sont tous, dont nous sommes aussi. Nous, certes, n’avons pas fauté et jurons que jamais nous ne fauterions. Soit pour le constat mais quid de ce qu’il faut faire de ces matériaux qui n’aboutissent pas à l’édification du projet ? Ce qui n’est pas fini n’est pas pour autant inexistant. Nous y aurons mis  passion, effort et expérience. Nous en avons déjà avancement, leçon de choses apprises. Mais, comme une boule dans la gorge, nous asphyxie l’image de l’autre qui nous a trompé. Le mal nous vient-il de ce que nous n’aurons pas réalisé en tant que jouissance et profit, ou en tant que vexation et affront fait à notre personne ? Le profit, qui n’est qu’argent, renouvelle ses occasions. Ce qui est matériel s’arrange ou se répare. La blessure morale touche notre invisible profonde individualité. Touché nous sommes en ce que nous avions tout aussi profondément décidé de choisir. Là il n’y a plus de raisonnement. Nous étions sincères pour dire oui  et nous voici retourné en boomerang avec un non nous touchant tout aussi sincèrement. Ce va-et-vient nous est insupportable et même incommunicable à tiers pour s’en expliquer. Au point qu’il ne faut pas commencer à s’en expliquer, au risque de s’entendre conseiller qu’il y a de la raison et du tort des deux côtés. Personnellement j’aime être seul dans l’adversité de la déception de l’autre. Quitte à être abattu, autant se battre avec ses propres poings jusqu’à ce qu’ils se délient et se détendent pour se retendre ensuite vers de nouvelles opportunités. Les couleuvres ne s’avalent pas avec de la raison. Elles ont un besoin métabolique de faire en nous leur œuvre d’amertume jusqu’à ce que naturellement nous vienne un goût de pardon. Pardon à nous-mêmes de nous être envahi d’un projet mal ficelé au final mais que nous ne pouvions pas prévoir au départ. Pardon à notre suivi manquant de précautions. Pardon à la confiance mise et renouvelée en partenaires s’avérant délictueux. Somme de tous ces pardons qu’il nous faut faire dans notre tête d’abord, et simultanément dans une concrétisation matérielle pour réparer ce qui nous aura été cassé, pour apprendre ce que nous n’avons pas su, pour comprendre le processus de la dérive vers l’échec, et surtout pour visualiser sous un angle rétréci les personnes qui nous ont trahis. Se les remettre dans la situation de départ qui nous les avait fait choisir. Qu’elles nous aient choisis ou que nous les ayons choisies. A quel moment le décrochage les uns des autres s’est-il produit ? La reconstruction du scénario à l’envers permet de voir le point de ce qui a dévié de l’autre. Cette vision est déjà un grand ouf que l’on se donne. Un pardon sans esprit de tardive et inutile revanche. Voir clair permet de se voir et de voir l’autre aussi, adversaire ennemi toujours présumé, mais peut-être mieux cernable dans son environnement de bassesse personnelle ou d’intérêt supérieur, par exemple, qui n’était pas le nôtre. La culpabilité reste la même dans l’échec que nous subissons mais le concours de circonstances en atténue la haine personnelle. Là est le but de ce voyage introspectif qu’est le pardon. Remettre en perspective que nous puissions recommencer avec tous les éléments à nouveau clarifiés de la vie. Repartir avec le partenaire, traitre ou voleur, n’est pas le point d’humanisme prioritaire. On ne fait rien de bien en déplaisir de moyens humains et matériels. Le choix des armes nous appartient pour repartir au combat ; mais parmi les armes les plus utiles se trouve être la confiance d’un tout possible à nouveau, dans lequel il y a peut-être un traître en puissance, une erreur imparable, une conjonction imprévisible. Sans pardon nous ne pouvons repartir que méfiant, c'est-à-dire le contraire de confiant, c'est-à-dire amputé de la plénitude de vision qu’il faut pour tout envisager. L’histoire de l’humanité regorge d’histoires de pardons heureusement intervenus. Les après-guerres, après révolutions, après massacres ou génocides ; les  après divorces, abandons meurtres sont autant de manifestations de cette nécessité de repartir de l’avant une fois que l’on a vécu l’horreur. Au point d’ailleurs, de se demander par quel phénomène les mentalités individuelles arrivent à se déconnecter de l’horreur pour se reconnecter au bonheur. Usure du temps, passage d’une nouvelle génération et surtout volonté d’oubli au sens le plus matériel de l’effacement du visible, de la mémoire, des traces. Jusqu’à ce point où nous sommes de l’histoire, de notre histoire du monde, il ne nous reste pas de traçabilité totale de ce que fûmes nos ancêtres depuis la nuit des temps. Ce que nous savons nous vient de notre culture, de civilisations disparues ou du moins communément admises, d’histoire réputée incontestable et universellement enseignée. En un mot il y a consensus sur le passé qui nous a forgés. Sagesse des hommes qui a pu faire table rase des brouilles d’alors, vues de maintenant s’entend. Alors que des monceaux de souvenirs épars pourraient avoir ressurgis et animés, fut-ce artificiellement, des clans. Les matériaux d’alors n’ont pas laissé suffisamment de preuves pour que l’on s’en entiche. Effectivement, en cette circonstance, l’effacement a permis l’oubli et cimenté le pardon. La question se pose des bonnes relations permettant à l’avenir l’accès au pardon parce que nous aurons pu oublier, parce qu’aura été effacé. La nouvelle donne des instantanéités et des exponentialités de mémoire de l’informatique apporte un éclairage trouble. A la fois il n’y a plus de limite à la mémoire ni à son accès ; et son immatérialité numérique sans support physique la rend volatile. Plus sophistiquées dans le maniement mais moins pérenne dans la sureté ? L’ampleur du problème  dépasse la génération qui en fait usage et qui a l’obligation de vivre avec les données existantes de son temps. Le recours à la notion de pardon transcende en cela les stricts protocoles de la conservation ou de l’oubli de la mémoire. Le pardon est une carburation dont l’organisme doit se régénérer pour donner à l’esprit humain qui l’habite le désir de la ré-entreprise dans le temps de la vie terrestre qui nous est impartie. La séquence du pardon, breton autrefois célébré en des jours répétés et précis, est de ces instants de grâce où l’humain échappe au cycle de la pure rationalité. Ce sont de ces moments rassembleurs où nous échappons à l’addition des faits, à la soustraction des maux, à la multiplication des fautes, à la division des responsabilités. A cet arrêt du temps, l’homme dit à l’homme, tu n’es qu’un homme mais justement tu es surtout homme. Le reste n’est qu’épisodes qui ne m’intéressent pas. La globalité de notre corps-esprit individuel et indivisible est la grande surprise des restes de l’environnement dans lequel nous évoluons. D’autres qualités extraordinaires font rêver ; depuis le papillon du haut des airs jusqu’au dauphin du fond des mers chacun dans leur spécialité extraordinaire. Que ne pourrions-nous pas avoir leurs attributs ; mais en gardant d’abord la plus encore extraordinaire pluralité globalité de tous les moyens de l’humain. Sidérante panoplie d’outils pour percevoir, penser, agir jouir dans une suite de séquences logiques y compris la capacité d’y inclure l’inattendu et le non logique. La surprise de moi est ce qui me sidère le plus. Cette capacité à voir dans le non visible, à laisser venir le non souhaitable, à contrarier le bonheur en cours, à être sage puis chaotique, à aimer et à détester. Sans qu’il n’y ait volonté ou répulsion. Simplement parce qu’en l’homme il peut tout simplement tout arriver. L’individu a peur de se parler de ses incohérences. L’homme ne serait bien que dans la maitrise de ses pensées et de ses comportements. L’harmonie y est plus facile mais elle y masque des affleurements de faits ou sentiments réels nous survenant. Ne pas les voir n’empêche pas l’existence des phénomènes ; et c’est surtout méconnaitre la possibilité de notre être individuel de faire filtre naturel de tout ce qui lui passe par la tête. Les milliards de nos neurones du cerveau perçoivent du réel et de l’irréel, de l’utile et du futile, du tout et du rien, dans une variété et une capacité dont nous ne sommes pas encore prêt de connaitre l’ampleur du fonctionnement. Je pense, mais la science déjouera ma prémonition sans doute, qu’il y soit tout prévu y compris tous les neurones du non sérieux, du loufoque, de l’autodestruction, du sérieux, de l’imprévisible, pour quiconque, comme je le fais, tente de regarder ce qui devrait toujours rester de l’ordre du contraire de tout. L’idée est que nous soyons pourvus de tous les antidotes à ce qu’il nous prendrait de nous croire quelque chose. Une espèce d’anti sérieux qu’aucun mot ne saurait décrire ; sauf la possibilité d’être fou avec soi-même sans que cela ne se sache autour de soi. Pouvoir avoir au-dessus de sa  tête, mais toujours  arrimée à notre tête, une enveloppe montgolfière gonflée d’airs non identifiés par l’humaine raison, et plus léger que l’atmosphère ambiante ; donc par conséquent capable de nous faire survoler notre nous-mêmes parmi les autres. Une hauteur qui n’est pas une supériorité mais une aération des sens. Le grain de folie n’en est que le mauvais mot dont personnellement je garderai le terme grain masculin de graine capable de nous ensemencer vers les nouveaux territoires survolés par l’esprit. L’expérience nous arrive tous mais nous n’acceptons pas tous, ou du moins pas tout le temps, d’assumer la graine en nous qui nous fait découvrir du nouveau. Il y a une fonction définie, qui ne dépend pas de notre arbitraire bon vouloir, à vouloir nous emmener dans l’inconnu de nous sans qu’il soit dangereux de nous laisser nous y balader. C’est un voyage libre déclencheur de points de sensibilité que le réel habituel ne permet pas d’approcher. Décrocher du réel ou le transcender est reconnu utile par de méthodes artificielles y emmenant ceux de nous en mal de société. Tant mieux si cette assistance leur fait le bien qu’ils y recherchent, trop tard, alors que la méthode était plus tôt déjà et gratuitement en eux. La détente de soi est partie intégrante de nos outils de  vie. Un lâcher prise à notre façon, une évacuation, une évaporation, une prise à l’air, différent de celui que je ne suis pas mais qui n’est en fait que cet être que je ne crois pas être. Ce contre feu de nous-mêmes n’a de contre que l’aspect contre effets couramment attendus. La surprise est effectivement de taille que de voir surgir en nous des pensées, des désirs, des logiques de réflexion hors schémas connus jusqu’ici et hors de projections plausibles pour l’avenir, et enfin encore non destinés à ce qu’il en faille quoique ce soit retenir. Du simple vent apporté par le vent et périssable par le vent. Pur divertissement dont on ne peut s’avancer plus à en dire quelque chose sinon qu’il est. Comme la plume au vent, et ainsi qu’illustrait l’image du dictionnaire Larousse, où une femme soufflait sur la plume qu’elle tenait à la main, faisant voir les filés s’évaporant : nous tenons nous aussi, nos capacités caractéristiques entre nos doigts, pour que s’en envolent nos désirs et nos envies concrètes de faire dans la vraie vie. Tenir en nous ce qui s’envole de nous est la gageure de notre unique globalité ! La plupart des autres êtres vivants ou éléments de la nature sont des fonctions dévolues ou spécialisées à une tâche. Polénisation pour les abeilles, oxygénation pour les autres. Nous, nous sommes multifonctions et donc généralistes du goût humain. Tout ce qui se passe semble être fait pour nous. Tout passe par nous. Tout revient à nous dans une extraordinaire perception individuelle. Les paysages nous appariassent sublimes dans une combinaison de couleurs et de contrastes et de sensibilité qui n’est jamais pareille à celle de notre voisin. La capacité d’embraser tous les touts de la vie, dans une version totalement individuelle, est source de notre richesse personnelle que, par définition ainsi décrite, personne ne peut nous enlever. L’homme n’est pas maitre-propriétaire du monde mais il en est locataire avec vue unique. Et le nombre même s’il devait doubler après être passé de 2 à 7 milliards ne changera rien à ce privilège consubstantiel à notre état d’être humain, capable de tout voir à sa propre façon. Globalité de l’Etre unique faisant sa grandeur comparée à sa petitesse de sa condition d’ultime dividu, 1 dividu. Dualité programmée pour que l’envie de puissance dominatrice sur les autres dividus s’arrête sitôt que la sagesse nous fait voir notre richesse globale déjà à nous tout seul. Les institutions ne sont pas faites pour nous parler de cela : elles incarnent l’ordre établi des règles de vie en société. Pourtant le temps vient où les règles ne se font plus respecter par l’autorité, peur du gendarme, mais par le bien fondé constamment soumis à expériences concrètes, réactivité de ses usagers, écoute de suggestions. Il n’y a plus d’experts mais une somme d’expertises de chacun ayant les moyens de perception et d’expression instantanés et globaux. Les individus que nous sommes deviennent des 1 …dividuels qui se feront respecter chacun avant de s’additionner dans des projets communs. Chacun est une globalité mini-bulle ayant sensibilité et regard sur l’intégralité de l’environnement. Sa petitesse arithmétique n’est qu’une dimension de court terme. Sans qu’il soit question de morale, le tout petit fait ethniquement partie de la somme, et non plus de la masse. Chaque vie est l’objet d’une surveillance pour que s’y maintienne, en l’état du moins, ce qu’est une durée normale. Les morts nés sont exception d’un pour mille, les décès avant 60 ans sont morts subites, et chaque catastrophe enlevant l’un de nous est considérée comme drame. La mort n’est plus fatalité, au point de devenir, excessivement, l’ennemi à combattre et à repousser. Ne plus vouloir laisser la mort faire son œuvre débouche sur des problèmes d’augmentation du nombre des vivants dans le même espace-temps. Cinq voire six générations côte à côte suppose volumétriquement moins de place et d’importance pour chacun. Mais qui doit se serrer ? Tous ou un en particulier ? L’homme reste une globalité qui n’a pas vocation à se réduire. Vivre plus longtemps n’a d’ailleurs de sens que si c’est pour jouir plus de la vie. Aménagements structurels qui doivent impérativement émerger du bon sens global de chacun à qui l’institution doit savoir proposer des questionnaires checks lists permanents. Que faire aujourd’hui avec tel nouveau problème qui se pose ? Vous voulez téléphoner c'est-à-dire parler à tous et écouter qui vous chante alors qu’admettez-vous de ce que l’on vous a appelé vie privée. En d’autres termes ne demandez pas à la société de faire ce que vous ne voulez pas faire vous-même. La globalité des gigantesques nouveaux moyens change la mitoyenneté de chacune de nos vies que nous croyons encore gentiment les unes à côté des autres, dans un respectable voisinage. Notre globalité capable d’évoluer autonome nous rend spatialement voyageur du grand tout, tel le drone capable d’aller à endroit précis sans chemin cadastré par la société. L’éclatement du cadre, tous mini bulles dans la maxi bulle. La culture de bulle mini, mais autonome, s’y avère encore plus indispensable que le bon rangement en case et en classe sociale. L’autonomie rendue balaie en chacun de nous la solidarité que nous avions culturellement apprise à pratiquer envers plus faibles. Notre compassion, ou notre sens de l’autre, n’en est pas changé mais il doit trouver d’autres effets de levier pour agir après avoir détecté le besoin. C’est une occasion d’être plus sincère, du fond de notre démarche, pour assumer sans devoirs, mais avec bon sens et bonne raison venus de notre véritable réflexion. Concrètement nous n’aidons plus l’homme parce qu’il est pauvre ou mal né dans une prédestination à jamais figée : nous avons à porter un regard sur l’autre  dans son autonomie, par principe égale à la nôtre, mais que présentement il n’arrive pas à assumer. Coup de main ponctuel, leçon pour apprendre à pêcher disent les chinois ; mais absolument pas devoir moral d’assistance de nos pauvres parce que nous serions nés riches ou du moins moins pauvres. En un demi-siècle, qui est anecdotiquement extraordinaire panorama pour qui est né comme moi en 1945, la globalité du monde s’est globalisée en immense ascension de pays émergents, alors que nous nous voyons à tort en civilisation descendante. La nouveauté est qu’il n’y a plus qu’un seul sens à l’histoire, qu’un seul vase communiquant obligeant les uns à descendre si les autres sont en train de monter. La révolution est aussi celle de la mécanique des fluides, échappant désormais aux forces purement physiques et à la gravité. La reconnaissance du droit à la vie de chacun pour chacun fait plus penser à ces boules de verre où des flocons de neige bougent dans l‘espace bulle, en harmonie et sans collision, pour se déposer et repartir à la prochaine secousse. Ce mouvement du plus petit dans l’espace dans plus grand nous donne une impression d’immense voir, d’infinie autonomie. Merveilleuse impression de se sentir libre dans un univers quant à lui fermé, mais que notre petitesse nous empêche de toucher les limites, alors que notre grandeur nous pousse à nous croire tout permis. Que serions nous, à l’inverse si nos mêmes capacités avaient la contrainte de ne pas bouger ni en idées ni en mouvement ? Pourquoi d’ailleurs cette velléité de changement, d’aller voir juste à côté ou un peu plus loin ce qu’il s’y passe ; et si l’on n’y serait pas mieux tout en sachant que notre condition présente est la plus confortable le plus souvent. Aller voir ailleurs si j’y suis reflète ce désir pour nous transposer en pure versatilité. Ce n’est même pas un besoin de se rassurer qu’ici serait en définitive meilleur que là-bas. C’est un gratuit changement d’air, en nécessité viscérale de changer d’atmosphère. L’élan nous en vient de profondeurs insondables. Qu’intervient-il en nous pour que nous trouvions cet hiver trop long, avec l’envie soudaine d’en ouvrir n’importe quelle porte vers quelque chose d’autre ? Même versatilité pour ce vêtement au confort parfait mais que l’on a trop vu ; pour ce voisin lancinant de ses pas au même endroit toujours à la même heure ; de ce chien ; et quelquefois de cette compagne répétitive de gestes et sans nouveau regard sur vous. Rien ne peut y faire pour raisonner notre lassitude de ces permanents paysages. De l’air, n’importe lequel, il nous faut du changement. Selon notre respect des cultures nous nous alertons et nous nous réjouissons de ces appels d’air à autre chose. Or que vient faire le respect dans une envie pressante qui est de l’ordre de notre fonctionnement biologique et mécanique. Ce n’est ni plus ni moins que notre bête humaine, en tant que machine, dont les rouages ont besoin de fluide entre eux pour ne pas se gripper, ne pas se détester, ne pas se fracasser l’un contre l’autre. Il n’y a pas à réfléchir quant à l’urgence sanitaire d’arrêter le mécanisme ; et peu importe la rase campagne dans laquelle il nous laisse. L’organisme a ses réserves, ses aires de repos,  pour pouvoir continuer ou du moins survire au ralenti sans nous. Nous sommes de vrais individus, c’est à dire éléments seuls à décider de nous-mêmes, dans ces situations d’appels vertigineux aux changements. Les autres vous disent, raisonnes-toi, comme si en plus des habitudes accumulées nous désirions y rapporter des outils de changement et de redressement que constitue la raison. Tout le contraire est nécessaire pour s’échapper de tous les carcans. Pour se laisser être pensé par le pilote automatique que nos avons en nous et qui va prendre le relai le temps que nous ayons envie de revenir aux commandes. Le cycle de nos atermoiements est dans l’ordre de notre métabolisme, qui n’est pas linéaire. Nous y laisser aller et venir, en intensité ou en passivité de commandement, est signe que nous intervenons toujours à bon escient, au mieux de la  forme de l’instant. Le changement ne se décide pas  mais nous sollicite pour que nous ne nous y opposions pas. La faculté d’exécution de la pensée et des tâches est exactement le résultat de la disponibilité que nous y mettons : ne pas s’opposer à ce qui vient vers nous, encourager ce qui nous sollicite du monde avec lui. Le changement, c’est se déprogrammer du volontarisme abstrait pour se mettre en osmose  avec les germes potentiels de l’instant. Nous peinons et presque culpabilisons à croire que l’instant ou le changement ne serait autre chose que laxisme nous déviant de vrais buts. Apparemment le but déterministe fait une pause mais c’est pour se fondre dans une réforme plus globale de notre part, se refaisant des forces de tous ses pores et non plus seulement par l’artifice d’une volonté essoufflée. Le changement remet notre individu comme l’église au centre de notre village. Notre horloge ressourcée y indiquera la même bonne et exacte heure, pour tous les éléments de notre organisme. La période de flou du changement vient de la nouveauté d’atmosphère dans laquelle nous voici soudainement immergé. Nos codes habituels disparaissent justement pour que nous ne puissions plus rien prendre au pied des lettres de mots n’ayant plus de sens. Le changement est une sensation sans jamais être un ordre formel compréhensible par l’entendement rationnel. C’est en cela un changement, par l’abandon de la formulation précise que nous employons dans nos vies. Ce qui se passe,  en vie normale dans le déroulé de nos actes et de nos pensées, peut être fidèlement consigné dans nos perceptions, réflexions, expressions. Individu à l’intérieur de nous-mêmes nous sommes, mais vecteur communiquant nous avons à être dans notre vie avec les autres. La rugosité de notre abord et de notre approche peut servir de décor anecdotique à notre personnalité ; mais elle n’arrange rien de ce que l’autre peut comprendre de nous. Ce qui sort de nous doit être précis pour être compris. Le ressenti de l’autre à notre égard est une essence dont nous ne pouvons éviter que ses effluves nous soient négatives ou positives. Mais ce que nous exprimons doit être éléments précis de ce que nous voulons transmettre. Tout d’abord par clarté de nous même, la bonne joaillerie des mots que nous employons nous les fait entendre et vérifier qu’ils sont bien notre état. Ensuite le transfert de ces mots, grâce à l’éducation partagée des langues et leurs possibilités émotions, devient une véritable livraison vers l’autre qui ne peut nous déballer autrement que tel que nous nous sommes emballés. Il ne s’agit pas de jouer sur les mots ou de couvrir par la parole ou l’écrit des actes qui ne leur correspondraient pas. Ce serait à notre entendeur ou lecteur de ne pas se laisser gargariser. Mais dans la limite des compréhensions réciproques, ce qui est bien dit ou écrit est une base de comportement réciproque tout en restant dans la liberté de chacun de ce qu’il a exprimé d’un côté ou compris de l’autre. Plus qu’un savoir être ou une politesse révolue, à l’heure du raccourcissement du langage pour cause de culte du très vite et raccourci tout de suite, l’expression juste est un outil neutre entre les parties qui se donnent, avant quelque opinion l’un de l’autre, la promesse qu’entre eux la parole réelle circulera. L’emprise croissante du culte de soi, dans un moi d’abord et tout de suite, fait craindre à des cloisonnements des comportements pour cause d’incommunicabilité. La propension heureuse qui nous est donnée d’être sans scrupule des entités très personnelles fait de nous des profils hétéroclites. Vu de loin nous sommes patchworks multimatières multiidées, multisouvenirs, multidestins. Ce que nous croyons notamment en nous présentant comme une intégrité, est en fait un assemblage de facettes diverses et variées : en couleurs, en matière, en consistance, en plasticité, en variation de genre qu’il est même impossible à définir par les mots tant ils sont magmas évolutifs insaisissables dans notre volcan toujours en éruption. Des civilisations se nomment melting pot à quoi nous ressemblons, tant il y a en nous le projet commun de nous qui recueille de toutes parts ses insatiables curiosités de la vie qui nous environne. L’extraordinaire capacité de notre naissance nous dote, en mémoire individuelle, d’une capacité de saisir ce que l’on peut appeler toutes les richesses du monde passé présent et à venir. Il est d’ailleurs caractéristique que parmi toutes les comparaisons entre l’homme et la technologie, la capacité de l’homme n’a jamais été problème alors que la vitesse de calcul est passée en faveur des machines. Notre cerveau peut donc être le grand bazar caravansérail où s’accumulent le vu, l’entendu, le ressenti et peut-être le non encore porté à notre sensibilité réactive. Immense patchwork faisant office de couverture  enveloppant l’ensemble de notre être. Dans cette caverne de nous-mêmes il ne faut pas craindre la bizarrerie, voire même la loufoquerie, de tous ces matériaux. Ils n’ont pas de vocation à construction d’un mur lisse et homogène. Ils sont ingrédients sucrés ou salés, fades ou épicés, jetés dans notre marmite sans souci de bon ou de mauvais goût, de suavité ou d’indigestion. Prendre tous les interstices de la vie est la fonction d’accueil de notre individu. Pas de rejet, pas d’appréciation : simplement le vivant et notre ressenti pour ce qu’ils sont, en tant que phénomènes existants. L’intérêt premier est notre capacité à être au balcon de tout ce qui se passe. Si nous laissons tout entrer, sans préjuger, nous sommes en permanence dans le théâtre du monde et dans la seule limite de notre dimension unique individuelle qu’il faut savoir s’accepter. Ne pas être un grand savant n’empêche pas de recueillir les phénomènes survenant en tant qu’objets sensibles, même si nous ne savons pas les identifier. Qu’importe l’explication de tout du moment que nous éprouvons la juste présence de quelque chose. Il est important de se déculpabiliser de ce non accès savant au bien nommé savoir. Concrètement les nuages n’ont pas attendu que l’on décompose leur structure moléculaire chimique pour être beaux vers nos yeux éblouis. Le monde est à tous ceux qui lui ouvrent yeux oreilles et sens. En vouloir savoir plus n’est qu’un choix parmi d’autres dont celui de ne pas vouloir savoir. La limite de notre individu réside dans le périmètre inconscient du champ de savoir que nous voudrions absolument acquérir. Mon corps, par exemple, m’intéresse au point de vouloir l’ausculter de plus près comme si j’étais mon médecin. D’autres champs vont requérir une aussi totale dévotion en temps et en connaissance à acquérir. Nous ne ferions plus que cela ; au détriment de la polyvalence comme une statue de Shiva disposant quant à elle de multiples bras vers les champs de ses insatiables possibles. Patchwork nous sommes destinés à le rester ; joyeux, sans vouloir faire de nos expériences de multitudes de couches de savoir. Elles nous étoufferaient, nous culpabiliseraient, nous donneraient l’impression de n’en savoir jamais assez ; elles nous couperaient de l’individu modeste isolé pour nous faire croire en une empirique détention de leviers d’action sur le monde et les autres. Le confus de notre être est une culture personnelle, dont le mélange macéré fait apparaitre en nous l’individu social varié mais contenant de manière intégrée sa diversité intérieure. Les remue ménage et ménage que je mène sont déjà une forme de grattage de mes intimes individuelles parois. Je me demande si j’en ai le droit décent ? N’y-a-t-il pas une matrice originelle de nous qu’il ne faudrait pas commencer à toucher. Je m’en explique par la simple description de l’existence d’un phénomène dont je ne veux au contraire rien changer de la fonction. Décrire ce que l’on croit voir n’est vraiment pas l’arrogance de le remettre en cause ; ou de tenter d’en modifier le comportement. Révéler ce que l’on croit avoir en soi n’est ni présomptueux ni humble. C’est lucidité au sens de lumière que l’on projette pour se voir et souvent découvrir  des outils et des fonctions que nous ignorions et que l’éducation ne cherche pas à nous laisser entrevoir. La libération de l’individu est malheureusement une étape de notre évolution ; alors que l’état libre du même individu eut du être une constance. Des écrans protecteurs nous font voir le monde et les hommes en prismes déformateurs. A se demander si depuis le début de l’histoire humaine l’instinct de protéger l’autre de ce qu’il ne devrait pas savoir n’a pas été le ferment déterminant de toute l’action, répétée de génération en génération, et jusqu’ici aujourd’hui. Au point que ceux qui ne protègent pas plus que ceux censés être protégés n’ont pas de réelles prises de conscience. Ainsi serait l’ordre des choses ? Bien au-delà des dominants ou dominés, qui d’ailleurs peuvent permuter leur rôle, cela arrive, d’individus à autres individus, ou de civilisation déclinante à continent émergent. Les acteurs sont inconscients de la pièce qu’ils sont en train de jouer, convaincus seulement qu’il y a un ordre pour accéder au savoir. Que cet ordre vienne d’en haut, qu’il soit gouvernement du monde, de l’état, de la région, de la ville, de la communauté, du groupe de pression ou économique, du clan, de l’ethnie, de la famille ; sans parler de la subjectivité des religions se proclamant pouvoir spirituel sur des bases temporelles de légendes inventées mais symboliquement toujours sympathiques et fédératrices. Tous sont dans une conception de savoir figé dans son accès. La hiérarchie d’accès au savoir a encore de longs jours devant elle alors qu’aucune crainte ou danger intérieur ou extérieur ne justifie cette limitation. Chacun sur terre peut ressentir désir d’accès à la connaissance du monde. Chacun sur terre peut, à sa mesure, se bricoler des moyens pour y accéder par lui-même. La première marche est de n’y avoir peur de rien. La prétention à se revendiquer le droit d’être est la première fenêtre que chacun puisse se dire un grand cri proclamant, je suis. Facile apparemment à dire ; à condition de ne pas en dire plus car un, je suis, suivi d’un immédiat, donc j’ai droit, ne marche pas. Je suis, est une proclamation tonitruante individuelle se déclarant en entité autosuffisante dans sa volonté de ne compter que sur elle-même. La suite, quand les individus cumul de « je suis », s’organisant en vie sociale, n’est qu’une forme de structure choisie pour vivre ensemble. Mais les  « je suis » sont dans le fond des autoporteurs de leur raison de vivre, de leur désir de prospérer, de leur besoin de s’en cogérer l’espace commun. Ce que je pense de l’individu est voix dans le désert si l’envie me prend d’écouter concrètement les autres. Je n’entends aucun cri mais je ressens en intime conviction, sans qu’il soit besoin de se tweeter ou facebooker, que des milliards se disent aussi, je suis. Certains parlent ou écrivent plus vite ou plus fort que les autres. Pluralité fonctionnelle en action de nos tempéraments différents. Mais qu’importe d’ailleurs la forme ou la synchronisation décalée de ces expressions de ces je suis. Si elles existent, elles vivent sans besoin de défiler en rassemblement militant tous pour un derrière un drapeau. Les germes de blé aux semailles ne savent pas qu’ils seront moisson tous ensemble. Le travail commence avec le ressenti qui monte en chaque individu prenant conscience de ses potentialités et de ses moyens d’en faire usage maintenant instantanément et à travers le monde entier. C’est la grande différence avec l’illuminé d’hier, seul dans sa conviction, avec l‘éclairé connecté d’aujourd’hui, capable de détecter tous ceux qui s’allument dans leur coin de la terre et sans qu’il soit besoin de descendre tous ensemble dans la rue pour crier  je suis. Je suis, tu es, nous sommes n’a aucune valeur de somme à un moment donné de cette transformation en cours. Chaque je suis se suffit et érode l’édifice de l’ancienne mais toujours en active hiérarchie. S’agrippent aux parois, pour en enlever pierres constitutives, de plus en plus d’individus conscient de pouvoir agir c’est autant d’anciennes directives qui s’avéreront infondées et de moins en moins bienvenues. Mais en ce début d’escalade, il ne suffit pas de se prétendre il faut vouloir s’assumer. L’individu doit construire son indépendance, de corps et d’esprit, pour pouvoir proclamer son je suis. Sans  que cela soit une gesticulation fanfaronne, il y a quand même de la bravoure à remettre en question la société d’assistance dans laquelle jusqu’ici chacun a sa niche. Chambouler tout cela fera reculer, si l’on s’y prend brutalement. C’est par la mentalité individuelle, en tant qu’exercice intellectuel d’abord, que notre individu peut commencer à rassembler les matériaux et tirer les premiers traits de ses plans pour envisager son autonomie. Ce qui peut arriver à chacun n’a plus rien à voir avec les évolutions lentes des mentalités. La circulation des idées ne suit plus de parcours préconçus et connus. Il en est par conséquent ultra difficile et présomptueux pour se croire investi d’une prémonition. L’audace est permise d’en lancer des amorces, des pressentiments. Cela commence par un état des lieux de la terre. L’organisation de l’atlas du monde parle toujours de terre, de mer, de continents, de sous continents, de pays, de régions comme autant de boîte à contenu d’habitants qui y seraient homogènes et dont l’accès passerait par les délégations connues tel que l’état dont ils sont citoyens. Certes nous habitons tous physiquement quelque part, et même nous y affectionnons des parts de nous avec des parts des autres qui nous ressemblent plus. Les groupes ne présentent plus pour autant comme une seule tête. Chaque habitant du monde relève sa tête. Aucun éloignement, aucun retard politique ou structurel  ne peut désormais laisser dans l’ombre une population. Toutes régions, mêmes les plus reculées, sont accessibles et dès lors visitées par des voyageurs amenant des nouvelles du monde et en ramenant des nouvelles de là-bas. Tous les indigènes de quelque contrée savent qu’ils sont hommes parmi 7 milliards d’autres dont ils imaginent, comparent, envient ou rejettent le style de vie. Mais en tous cas le lien communicationnel existe, venu presque ex-nihilo sans être passé par le long phénomène de transit qu’en avait du expérimenté l’occident, en des dizaines de décennie. Alors qu’il suffit de dix ans pour organiser la couverture de tout le continent africain avec le téléphone cellulaire. Idem pour la circulation automobile, le réseau aérien. De même pour l’organisation décentralisée que permet l’informatique et sa gestion de l’instant et en tous lieux. Les petits pas de l’homme occidental sont remplacés par des pas de géants dans des continents, sans préjugés sur le progrès. Progression erratique, chaotique mais franchissement gigantesque de ce qui n’est même plus un retard de qui par rapport à quoi. Le constat est que la marche du monde avance à grande allure ; et d’ailleurs à la grande surprise des pays en avance se sentant dépossédés de l’écart protecteur dont ils jouissaient. Les pouvoirs de vivre se rééparpillent entre tous les individus du globe, dans des critères de redistribution surprenant. La surprise est que chacun ne manifeste pas le même appétit ni la même façon de vouloir manger et partager le gâteau. Nous avions été élevés dans un monde hiérarchisé allant de Développés à Sous Développés. Les uns dominaient tandis que les autres avaient vocation à suivre la même courbe d’ascenseur. La découverte fait de chacun des autonomistes de son rythme de développement. Les chemins de traverse sont permis puisque d’ailleurs rien n’est interdit. L’Organisation des Nations Unies ne regroupe pas pour rien plus de 200 pays ayant droits identiques et velléités exprimables, comme ils l’entendent, même si des rapports bi populaires du monde font croire aux puissants qu’ils ont toujours la main sur les petits. Les cartes d’influence se redistribuent sans logique ni préséance. Des bras de fer,  de David contre Golliath, peuvent avoir raison de la puissance convenue. La force n’est pas qu’une question de nombre, d’armes, de votants, d’idéologie. C’est une fourmilière où tout peut continuellement arriver. Happening permanent. Des petites idées émergent. Des grandes idéologies s’effondrent. Tel me semble être le tableau vivant du monde où grosso modo je vois sept milliards de têtes se dressant en capacité de dire je suis. La concordance des temps au moment propice est l’étincelle qui allume le feu de cette nouvelle évolution. D’un côté l’émergence de véritables consciences de pouvoir être autonomes de la part des sept  milliards d’hommes de cette terre. De l’autre côté la réalité d’un réseau physique permettant à ces hommes d’échanger. Cette rencontre unique, de la fin et des moyens, trouve son illustration extraordinaire dans le projet du patron de Facebook de créer internet.org comme un réseau quasiment gratuit pour tous les habitants de la terre. Au salon des technologies de la communication se tenant au moment où j’écris (fev 2014) à Barcelone il vient de mobiliser les dirigeants de toutes les sociétés nationales de téléphonie pour les enrôler dans ce rêve. Car il ne s’agit ni plus ni moins que de nous doter tous, sans restriction de moyens, de l’appareil et du réseau pour communiquer en instantané avec tous nos contemporains. Le fonctionnement, dans une telle horizontalité, de chacun à chacun dans une totale libre expression bouleverse toutes les conditions connues jusqu’ici des rapports humains. Ce que l’on peut dire de personne à personne n’a plus rien à voir avec les messages que l’on adressait aux autorités, aux élus qui nous représentaient sous une forme forcément hiérarchique et empreinte d’autorité. L’expression libre n’aura plus besoin de s’exposer en montant aux barricades, en allant combattre frontalement. Ce que nous pensons, dirons, écrirons deviendra marée montante et descendante apportant son lot de véritables sentiments ayant valeur d’expression populaire. Certes il faudra se méfier de faux courants, de tendances artificielles telles qu’il en a toujours existé quelles que soient les technologies du jour. Mais la tromperie de masse a justement aujourd’hui cette vulnérabilité de pouvoir être débusquée par le premier quidam venu. Le réseau de 7 milliards d’hommes interconnectés rend enfin la possibilité à chacun de participer à la gestion de son monde. Comme ce que les Suisses appellent leurs votations capable de poser une question sur n’importe quel sujet à l’ensemble des citoyens. En mots et en descriptions avant expérience concrète, le tourbillon de tous ces appels, se parlant de tout et de rien mais susceptible de forger nos futures manières de vivre, a de quoi faire peur. Qui maitrisera quoi  vient tout de suite à l’esprit si l’on se place dans la logique comparative de notre organisation d’aujourd’hui, par rapport à cette ébullition permanente de ce que serait demain. Plus qu’une peur c’est tout simplement un vide que notre esprit cartésien n’aime pas voir et dont il est pris de vertige. Par quoi le combler ? Par l’arrangement consensuel et permanent entre personnes, rendu possible à ce point de l’histoire, parce que nous avons acquis une maturité de respect de notre personne et des autres. Il y a un siècle encore cette latitude n’aurait pas été envisageable. Des emprises nous enfermaient de trop dans des réflexes d’inhumanité envers autrui. Aujourd’hui semble possible que chacun se rappelle le chemin de l’évolution jusqu’ici et qu’il considère les acquis inaliénables. Capacité de nos corps et esprits, droit au désir, cohabitation de la terre, inutilité de l’affrontement. Quels énormes pas ont été ainsi franchis et sur lesquels nous pouvons continuer l’histoire. Mais nous ne pouvons plus emprunter les mêmes chemins ; car la liberté de l’autre et de nous-mêmes, que nous avons apprises et réussies, devient un outil devenu partie intégrante de notre pensée et de nos actes. Concrètement, parce que nous savons en permanence et en instantanéité la réaction possible des affaires du monde, il nous est désormais inacceptable de laisser faire au dessus ou à côté de nous ce que nous pouvons réprimer. Les adversaires de la consultation des peuples dénoncent les risques de cette démocratie d’opinion disent-ils. Erreur, c’est d’abord une démocratie de circulation de faits réels, se déroulant effectivement, susceptibles d’être arrêtés ou encouragés. Ce que l’on en pense, opinion, n’est que la conséquence de ce que l’on sait réellement. L’expression revient, souvent à propos des génocides du XXème siècle, que l’on ne savait pas, laissant justement l’opinion s’installer dans la bien pensance de ces moments d’ignorance. Maintenant il est impossible de ne pas savoir. Et si nous n’intervenons pas immédiatement et directement, c’est parce que ce savoir ne nous décerne pas le rôle de chevalier pourfendeur de toutes les causes. Mais être dans la connaissance d’un événement, quelle qu’en soit la réaction en action, construit en chacun de nous une maturité de détenteur d’un savoir du monde. En ce début de XXIème siècle, l’homme intègre un véritable corpus de lui-même, un corps que la santé lui donne pour un temps biologique qui n’a jamais été aussi long et qui écume psychologiquement une multitude de possibilités d’accomplissement de désir ; un esprit structuré aussi bien pour raisonner que pour rêver. Et devant cet individu de corps et esprit équilibré s’ouvre pour la première fois une vaste zone de libre échange, qui n’est  plus seulement vaste mais totale puisqu’elle recouvre toute la terre et tous ses habitants. Cette plénitude de moyens  Etre humain et son environnement porte dans sa description la peur que nous soyons arrivés à un point trop satisfait de nous-mêmes et donc de notre histoire globale. Nous sommes comme à un moment du film, c’est souvent aux trois quart, où nous voyons un trop bel épilogue et que nous nous en disons que ce serait trop beau ; que non, çà ne peut pas continuer ou finir comme cela ; que cela va se casser la gueule. Il n’y a aucune raison à ce que l’entreprise humaine et terrestre ait toujours cette fatalité à faillir. Je crois au contraire, et ce serait ma seule Foi, que nous sommes justement là pour réussir la conjonction. Et que c’est peut-être maintenant l’exact moment. Non que nous serions choisis, élus ou sauvés. Mais parce que les mouvements tectoniques des plaques, de tous les éléments de la terre, parviennent à un territoire de rejoignement, de cicatrisation, de formation d’une nouvelle peau-écorce humanoterrestre. L’impression que cet avènement serait une utopie irréalisable est une réaction de frilosité. La réalité des faits devant nous doit nous secouer de cette peur. D’une part parce que tout cela est techniquement possible, d’autre part parce qu’il n’y a pas de raison d’en avoir peur. D’un côté notre constitution individuelle est capable, maintenant, de se ressentir dans son autonomie de moyens et de désirs tout en sachant les conditions de sa communauté de vie avec l’ensemble de ses co-habitants du monde. De l’autre côté, c'est-à-dire de l’autre pôle, le lien organique technologique permet de faire toile avec l’ensemble de ces habitants du monde. Faisabilité en progression douce sans qu’il ne soit besoin de faire la révolution par les armes, ou par l’idéologie, pour l’imposer. La pensée et le comportement individuel se suffisent à eux-mêmes pour attiser et entretenir cette vision interconnectée du monde. Chacun entretient ce qu’il veut de cette vision panoramique de l’univers. Chacun peut y commencer son écheveau, là où il le veut, au rythme qui est le sien en l’arrêtant ou le recommençant comme il l’entend. Autrefois il fallait enrôler les foules, fourbir les armes, former les combattants, avancer vers les champs de bataille pour espérer conquérir l’espace convoité. Entreprises terrestres ou politiques, croisades religieuses ou spirituelles. Cela demandait temps et surtout manipulation des intellects de chacun pour qu’ils se rallient à une cause dont ils devenaient masse, chair à canon, peuplade en adoration. Ainsi ont avancé, ou reculé, les territoires et les idéologies. Nous n’avons pas à les renier tant ils sont socles du point dont nous avons la jouissance de pouvoir en parler. Mais leur aboutissement nous a fait découvrir l’horizon nouveau de notre individualité dans le grand tout. Une fois que l’on sait ainsi ce que l’on est, individu capable, on ne peut accepter les méthodes anciennes avec le respect que l’on garde pour elles, d’enrôlement collectif. Quand on sait que l’on peut être libre il est inconcevable de préférer de ne pas être libre. Tel est le moment paroxystique, comme une pointe de l’épée, où nous sommes. La composante libre  fait toute la différence avec les mouvements précédents qui requéraient une délégation à autrui de cette notion d’être libre. Au point qu’il fallait souvent mourir pour cette liberté ; ce qui faisait une belle jambe à celui qui n’avait plus que la jouissance posthume de son nom gravé sur le monument aux morts de son village. Aujourd’hui, et sans qu’il soit nécessaire de proclamer le grand jour, le libre de nous peut se conquérir par petits segments successifs. Le gâteau est à la portée de notre main, consommable en petites bouchées. Cette indépendance des esprits et des dieux est la fin d’une soumission imposée par le non avènement en nous des conditions de notre autonomie. La crainte du manque, et même beaucoup plus en amont la hantise de déroger aux règles de l’autorité au-dessus de nous, ne pouvaient pas aboutir à notre émancipation avant ces présents jours.  Il fallait à toutes choses, dont surtout à nous même, le murissement de notre fruit pour que naturellement il s’envisage de se détacher de l’arbre de l’évolution. Ce n’est pas crime envers l’arbre, ni envers le pré, dans lequel nous tombons, que de constater l’effet de gravité naturelle dont nous sommes l’acteur. L’allégorie de l’arbre illustre combien tous les fruits ne tomberont pas en même temps. Leur exposition précédente à l’ombre ou à la lumière, leur positionnement dans la branche rendent leur éclosion finale imprévisible tout en les assurant de leur finalité inéluctable à devenir autonome. Ce mouvement d’un état à un autre respire de la passion qui anime  toutes les particules du monde. En être, en tant qu’individu, nous en rend passionné en même temps qu’attentif que tout s’y passe bien. L’énormité des faits en transformation sous nos yeux pourraient provoquer une inflation de notre considération envers un nous individuel devenu si puissant, si centre du monde en tant que pilote personnel de son évolution dans la toile du monde. La théorie de ce risque d’abus d’ego existe mais sa réalité d’advenir est nulle. Les ingrédients ayant permis d’arriver à ce point de décision, d’autodétermination de nous-mêmes, incluent une auto-restriction automatique de ce que nous penserions de puissant dominateur unilatéral en nous-mêmes. En d’autres termes la conscience fermement construite, parce que bien acquise, de notre individu ne nous fait être libre que parce que juste à côté, et tout aussi importante, est la case de la liberté de l’autre qui nous est tout aussi chère que la nôtre. La nouveauté de ce point de notre évolution est cette coexistence quasiment physique, mécanique, rendue réelle à cause de l’éducation et de la connaissance interpénétrées des faits du monde. Jusqu’ici les philosophies, les messages bibliques ou révolutionnaires depuis le aimez-vous les uns les autres  jusqu’au  liberté, égalité, fraternité  étaient des vindictes ou des harangues lancées en provocation à des masses incapables de les vivre. Aujourd’hui les mêmes masses, désabusées au fil des temps par ces interpellations généralistes, se sont mises à se demander comment vivre  individuellement ces vœux-désirs d’amour, d’être libres. De ce que la masse ne peut donner dans les idéologies collectivistes, les individus maintenant reprennent. Ils font le constat de ce qu’ils savent désirent et peuvent, au moment précis où la technologie vient opportunément structurer leur vie individuelle et aussi pour la première fois collective. L’avènement technologique n’est pas effet d’un miracle ou d’une manne céleste arrivant par hasard à l’homme. La quête de savoir pousse l’homme, par la découverte de ses applications, à une vie plus agréable. L’histoire des techniques n’est que cette fuite en avant, avec la particularité de n’être pas seulement devant ou derrière les aspirations de l’homme mais souvent parallèle à l’homme. Comme si l’homme et le progrès étaient deux rails n’ayant pas vocation obligatoire à se rencontrer, même si leur fonction commune de faire passer les wagons de notre meilleur genre de vie était bien claire. A l’instant de cette écriture une interruption me fait lire de Peter Sloterdijk concluant Platon : « recommencer penser  suppose l’invitation à lire de nouveau. Toutes les nouvelles lectures fécondes profitent des changements d’angles et des déplacements de perspectives qui conditionnent nos regards vers la tradition, dans la mesure où nous sommes les contemporains conscients des bouleversements actuels dans les rapports de savoir et de communication de la civilisation mondiale télématique en cours d’avènement. Beaucoup de signes avant coureurs plaident en faveur de l’idée  que les générations actuelles traversent une rupture  du monde au moins aussi importante, par sa profondeur et la richesse de ses conséquences, que celle qui a donné le jour, voici deux millénaires et demi, à la philosophie classique. Une étude de cette rupture ancienne pourrait ainsi inspirer la compréhension de la rupture actuelle. Nous n’acquerrons pas aujourd’hui de meilleur savoir sans participer aux aventures qui nous échoient lors de la révision de notre propre histoire. Un nouvel état d’agrégat de l’intelligence tirera aussi de nouvelles informations des anciennes écoles du savoir philosophique. Relire Platon : cela peut signifier s’engager dans un travail avec Platon, et en dépit de Platon, à l’actualisation de notre intelligence » Cette rencontre de Platon, ou de tout autre condensé du savoir avec la télécommunication que l’on peut lui donner maintenant, est hallucinante d’arrivée à un même point de pensées si éparse dont la mienne. Ce point de murissement arrive  à point nommé  au moment où la technologie revient à notre charge pour nous interpeller sur ce à quoi elle sert. Se déplacer, pour où aller ? Lire, pour quoi apprendre ? Chercher, pour quoi trouver ? Tous les verbes d’action de notre comportement doivent trouver leur complément d’objet direct correspondant à la satisfaction d’un désir ou pour le moins d’un besoin. Présentement le pouvoir parler ou écouter et le pouvoir écrire ou lire à chacun du monde entier doit se compléter avec un pourquoi. Les moi  je fais ci ou je fais çà s’échangeant avec des face à face vous répondant  je fais ci je fais çà  trouvent rapidement leur saturation dans nos têtes si nous n’en retirons pas une quintessence. Qu’y a-t-il derrière ces mots auto-descriptifs ? Qui est cet autre. Que fait-il ? Pourquoi pense-t-il comme cela ? Nous y venons immanquablement avec maintenant cette force de la véracité du témoignage direct. Sans qu’il ne soit plus besoin de se référer à un auteur de synthèse  nous racontant le genre humain, sans qu’un leader politique ou syndical nous émeuve sur la condition exploitée de nos contemporains, sans qu’un pasteur ou meneur idéologique nous fasse vibrer de la misère des hommes. Non point que nous ayons été jusqu’ici manipulés par ces leaders qui sans charisme déplaçant les foules ne seraient pas leaders. Les meneurs, dans lesquels il ne faut pas oublier les médias, n’ont fait qu’amener aux masses ce que les individus attendaient c'est-à-dire des raisons résumant le mal être et les boucs émissaires à combattre. Rapport de force somme toute permettant de désigner coupables chacun à une place suffisamment stable pour que l’on en conclut que ne pouvait rien en bouger, que l’on y avait rien à faire pour changer, que de toute façon l’on avait déjà tout essayé. La perte d’influence des leaders provient de l’erreur de leurs pronostics, du message de leur promesse, de l’inefficacité lorsqu’ils sont en fonction. Peut-être, et même sans doute, n’y peuvent-ils rien, sauf de leurs mensonges qui est un acte délibéré pour obtenir une confiance. Le reste est erreur parce qu’ils ne sont pas en condition opérationnelle de saisir le vrai des situations et des gens. Leur collecte d’informations de la réalité est trop ponctuelle, parcellaire, filtrée et de toute façon édulcorée par effet de n’en retenir que ce qui fait arithmétiquement majorité par le nombre. Alors que la sagesse émane de toutes les expressions. La possibilité désormais que chacun s’exprime est en déflagration gigantesque dans ce décor des institutions établies de la représentation. Il n’y a pas d’ailleurs plus que l’esprit des lois pour maintenir ces élus ou représentants sur leur statue dans justement leurs statuts constitutionnellement auto-générateur de leur protection, de leur inamovibilité, de leur immunité. Qui osera réellement déboulonner physiquement ces dinosaures ?  L’esprit n’est plus au coupage de têtes, fort heureusement. Mieux vaut supporter encore quelque temps l’inutile plutôt que de semer terreur et action revancharde des résistants à ce changement. Leurs fonctions s’éteindront d’elles-mêmes lorsqu’elles verront que l’information et l’action que l’on en fait ne passent réellement plus par eux. Curieusement ils, encore qu’il est difficile de dire ils, mais ils quand même, n’ont pas conscience du sol qui se dérobe sous leurs pieds, des oripeaux de pouvoir dont ils sont progressivement déshabillés. Les rois sont nus et leurs sceptres sont de pacotille. Mais entre eux ils se congratulent royalement ; ce qui est bien leur essentiel. Leur distance par rapport au réel est telle qu’ils ne connaissent plus de l’opinion que ce que leur en disent les sondages quasi quotidiens et instantanés sur des échantillons de pas plus de « 697 » personnes, représentatives nous dit-on, de quoi, interrogées par téléphone. Quelle crédibilité et surtout quelle fiabilité peut-on avoir en pratiquant une telle pêche si approximative de ce que désirent les gens qui ont été vaguement choisis ; car les vrais votants pour une personne élue ne représentent pas plus que 15/20 % après abstention, blanc, contre. Devant ce néant, ou du presque rien, n’importe quel rassemblement de témoignage échangés entre personnes a plus de valeur. Le champ du vaste échange de tous vers tous ouvre ainsi un horizon de félicité. Il ne peut ressortir rien de mauvais du dialogue de personnes échangeant librement. On ne prend pas la peine d’appeler son voisin pour l’agresser. La motivation est toujours l’échange dont on attend quelque chose qui va vous enrichir. Le réseau de la démocratie devient ainsi auto-constructif d’état d’esprit de ce que l’on pense, désire, propose, écoute, comprend, synthétise. C’est un inventaire en temps réel de ce que nous voulons de bonne foi faire. Reste le travail de faire apparaitre les possibilités de tout ce qui circulera. Le postulat que tout ne serait pas bon à prendre est déjà un jugement de valeur là où l’on ne veut que collecte de faits. A l’instar d’expériences de collecte contributive, comme Wikipédia, je suis sur que des groupes de citoyens se feront honnêtes ramasseurs trieurs et rangeurs de toutes leurs manifestations d’expression. Consultable, remaniable, expertisable, citant ses sources le constat du monde  en cours débouche naturellement sur l’agenda du travail à réaliser : long terme, moyen terme, court terme, urgence, instantané. Par qui ? Par vases communiquant plaçant les chantiers à réaliser d’un côté et les appels d’offres, ici les soumissions à appels d’offres de l’autre côté. Besoin réel contre expertise réelle immédiatement revérifiable par consultation dans le réseau véritable émetteur-récepteur de ses besoins et de leurs satisfactions. Cette automaticité des rapports, loin de les déshumaniser au contraire, leur apportera du concernement de et par chacun. Il y a, de par notre présence et notre condition sur terre une totalité de moyens en chacun de nous. Notre individualité est une grande méconnue ; des autres à coup sur ;  mais aussi de nous. L’expérience personnelle et la vitalité que procure l’autre que l’on aime amènent à se demander comment l’on fonctionne et vers quels buts de vie nous allons chaque jour où l’on a la chance d’aimer. Vivre n’est pas un choix mais une obligation joyeuse de profiter de notre état physique et psychique. Et ce n’est pas parce que ce qui nous précède aurait déjà tout dit que l’on ne peut pas essayer de découvrir soi-même. Le seul savoir nous vient de nous. Le seul ressenti est ce que nous sentons. Le seul amour est celui que nous recevons et donnons. Le quelqu’un que nous sommes est une unique au monde personnalité. Nous avons envers elle une obligation d’entretien de ses moyens, et, de satisfaction de ses désirs. Nous pouvons solliciter les plaisirs du monde et de tous ceux qui l’habitent pour participer à notre œuvre ; dans un vaste échange où nous y avons un devoir retour similaire. La découverte de notre plénitude d’individu intervient à un moment décent de notre histoire. Nous ne sommes pas égoïstes lorsque la conscience monte en nous de nous occuper bien de notre personne. La montée des connaissances en même temps que la descente des conflits a construit en nous un cerveau rafraichi, réorganisé en ce qu’il faut de rationnel et de fantaisie, embelli de la nouvelle vision d’un monde fait de sept milliards d’hommes dont nous ignorions le sourire, la culture voire la qualité d’être humain. Tout cela arrive. Non point que le monde ou nous-mêmes ayons changé mais parce qu’il nous est donné de le savoir. Les hommes et le monde arrivent dans le grand final du théâtre et se découvrent enfin. Tous existants sans du tout d’être pareils. Chacun son individu, son empreinte, sa perception, son désir d’action, son besoin animal de sociabilité. La scène n’est finale que dans notre esprit structuré habitué aux début milieu et fin. Il faut s’habituer à de nouveaux rythmes, calendriers, découpages. Tout ce que nous vivons de l’organisation terrestre et humaine fut construit, et bien, dans le temps de l’époque qui les nécessitait. Aujourd’hui les tables n’ont plus forcément besoin de quatre pieds pour tenir debout. Sans chambardement vont apparaitre des évidences de changement ou plutôt de fonctionnement. Elles seront Nous dans leur évidence de bon sens sans qu’il soit besoin de faire la révolution. Tout  va très bien se passer parce que tout vient de Nous avec le naturel du véritable besoin, du respect du besoin de l’autre et du désir au-dessus de tout que l’on a d’exceller pour qui on aime.

Viktorsberg février 2014, janvier 2015 / Obernai janvier, février, mars 2015/st.off

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